Teach for Romania
Enseignons pour la Roumanie, pour aider les enfants des milieux défavorisés
Roxana Vasile, 29.11.2023, 03:44
Radio Roumanie récompense Teach for Romania
Le 1er novembre, à l’occasion du Gala d’excellence
organisé pour les 95 ans de la Radio publique roumaine, l’organisation Teach
for Romania a été recompensée dans la catégorie Education, pour son travail
révolutionnaire auprès des professeurs. Elle forme, en effet, depuis 10 ans,
des enseignants afin qu’ils puissent donner à tous leurs élèves les mêmes
chances de réussite et la même confiance en eux. Les efforts et la réussite de
ces enseignants sont d’autant plus remarcables qu’ils s’adressent à des élèves
issus de milieux défavorisés.
Un modèle américain importé en Roumanie
Mara Niculescu, directrice de la communication à
Teach for Romania revient sur la création de Teach for Romania.
Teach
for Romania est une organisation non gouvernementale roumaine, inspirée d’un
modèle développé il y a une trentaine d’années aux Etats-Unis par nos collègues
de Teach for America. Nous faisons partie d’un groupe comptant des gens venus
de 63 pays et quand nous nous réunissons nous remplissons des salles immenses.
Tous appartiennent à des organisations équivalentes à Teach for Romania dans 63
pays du monde entier, chacune étant bien sûr adaptée au système scolaire auquel
elle s’adresse. Dans notre cas, Teach for Romania, nous travaillons avec
l’éducation nationale, pour l’éducation nationale, en partenariat avec les
institutions publiques, parce que plus de 95 % des enfants roumains vont à
l’école publique. Le défi que nous avons cherché à relever a été de trouver des
solutions afin d’élever le niveau d’éducation reçu par les enfants à l’école
publique, en partant de là où c’est le plus difficile, des écoles vulnérables,
le plus souvent situées en milieu rural ou péri-urbain.
Concrètement, que fait Teach for Romania?
Elle recrute
des personnes motivées, avec ou sans expérience antérieure dans l’enseignement
et les prépare, pendant 2 ans, à devenir éducateurs, maitres d’école ou professeurs
modèles, en partant du principe que tout enfant, quelque soit son statut
socio-économique, la région où il vit ou le type d’école auquel il a accès, a
le droit de recevoir une éducation de qualité. En 2014, Teach for Romania a
commencé avec 18 enseignants. Actuellement ils sont des centaines qui peuvent
sur une année scolaire aider plus de 20 000 enfants.
Est-ce beaucoup ou peu ?
Mara Niculescu fait le bilan.
Ca
nous coute 13 000 euros de soutenir un professeur pendant un an. Donc pour le
programme de deux ans proposé par Teach for Romania, on parle de 26 000 euros par
professeur. Qu’y a-t-il derrière cette énorme somme ? Ca commence avec le
recrutement, cette année nous avons choisi d’examiner 2000 candidatures afin de
pouvoir sélectionner 120 futurs enseignants qui seront encadrés par Teach for
Romania. Nous proposons ensuite de nombreuses heures de formation, notamment au
début avec l’Académie de formation initiale qui prépare les enseignants, qu’ils
aient déjà ou non de l’expérience au sein du système public, à intégrer une
école vulnérable et à y enseigner.
Abandon scolaire, anaphabétisme fonctionnel et plein d’autres soucis
Teach for Romania rappelle qu’un enfant roumain sur cinq
manque fréquemment l’école ou n’y va pas du tout, que quatre sur dix sont scolarisés
dans une école sans bibliothèque et que l’abandon scolaire en Roumanie s’élève
à 15 %, bien plus donc que la moyenne européenne de 10 %. Dans les zones
défavorisées, en particulier dans les zones rurales, six enfants sur dix ont
des difficultés de lecture et d’écriture à la fin du primaire, un quart des
enfants ne reçoit aucune aide chez lui quand il ne parvient pas à faire ses
devoirs. Plus encore, un cinquième doit marcher plus de huit kilomètres chaque
matin pour d’atteindre l’école. Les tests PISA, qui évaluent le niveau des
élèves à l’échelle internationale, montrent que dans les dix dernières années,
le niveau d’analphabétisme fonctionnel en Roumanie avoisine les 40 ou 45 %. Et
ceci en ne prenant en compte que les enfants scolarisés jusqu’à 15 ans. Si on
ajoute les enfants ayant quitté les bancs de l’école, l’analphabétisme
fonctionnel dépasse en réalité les 50 %.
Soutenus par une équipe de 12 mentors,
les enseignants formés par Teach for Romania travaillent avec des enfants qui
ont pris du retard dans leur apprentissage, qui ont des problèmes de lecture,
d’écriture ou de calcul ou qui peinent à gérer leurs émotions. Ces enseignants
aident à la réduction de l’absenthéisme et de l’abandon scolaire, soutiennent
la diversité et combattent la ségrégation.
Des techniques spéciales enseignées aux futurs professeurs
Et ce n’est pas tout, comme tient à
le rappeler Mara Niculescu, directrice de la communication de Teach for
Romania.
Il
y a une autre étape intermédiaire : il ne s’agit pas uniquement de techniques
d’enseignement individuel mais aussi de techniques de gestion de classe, afin
que la classe se façonne une culture commune, que les enfants travaillent les
uns avec les autres, qu’ils se soutiennent et avancent main dans la main avec
le professeur, pas en opposition ou de manière totalement dissociée par rapport
à lui. Nous incitons aussi les professeurs en partenariat avec leurs collègues.
Car nous savons grâce aux études internationales, pas seulement sur la base de
ce qu’il se passe en Roumanie, que l’alignement entre les pratiques scolaires
est l’un des changements les plus efficace, plus efficace même que la réduction
du nombre d’élèves par classe. On peut
avoir une classe plus petite mais dans laquelle chaque professeur enseigne à sa
manière, différente des autres collègues et avec des objectifs complètement différents, cette classe aura des résultats plus faibles qu’une classe avec un
effectif plus important mais dans laquelle les professeurs poursuivent les
mêmes objectifs, cherchent à développer les mêmes compétences, appréhendent de
la même façon le développement de l’enfant.
Quelque soit l’ampleur des difficultés, il existe des personnes dévouées qui les dépassent avec brio
Comme cette mission est ardue, à la mesure des problèmes
parfois extrêmement compliqués rencontrés en Roumanie, il y a un grand besoin
de professeurs formés dans cet esprit. Chaque année, Teach for Romania organise
un Gala au cours duquel elle récompense les meilleurs enseignants exerçant en
milieu rural. Elle entend par là montrer que quelque soit l’ampleur des
difficultés, il existe des personnes dévouées qui les dépassent avec brio. Ces
personnes qui font de leur métier une mission pourraient bien avoir sur le long
terme un impact important sur l’ensemble du pays. (trad. Clémence Lheureux)