Le Cap Horn à vélo
Gabriel Bota et Rudolf Nyari, deux des organisateurs du Festival du Livre Transilvania, se sont rendus en Terre de feu à vélo pour promouvoir le sport et la lecture

Ana-Maria Cononovici, 18.03.2025, 12:13
Nous évoquons pour vous aujourd’hui une première mondiale, mais aussi et surtout une mission très noble : promouvoir la lecture et le sport auprès des jeunes. C’est ce que proposent Gabriel Bota et Rudolf Nyari, deux des organisateurs du Festival du Livre Transilvania, qui se tient chaque automne à Cluj (centre-ouest). Leur idée la plus récente s’est concrétisée à la fin de l’année 2024. Inspirés par un célèbre roman de voyage écrit en 1954 par Radu Tudoran (Toate pânzele sus !/ « Hisser les voiles »), ils sont partis tous les deux, à vélo, en Terre de feu, au cap Horn.
Pourquoi se lancer dans une telle aventure ? Rudolf Nyari, l’un de nos deux protagonistes explique :
« Premièrement, il faut savoir que cette aventure est un projet qui a débuté il y a quelques années, en partant de l’idée qu’il fallait promouvoir la lecture mais aussi le sport. Ce projet intitulé « Read and ride/ Lis et pédale» en est déjà à sa 3e édition. L’année dernière nous avons été les premières personnes de l’histoire de l’Humanité à arriver à vélo à l’extrémité sud de la planète, sur l’île du cap Horn. Lors de la première édition du projet, Gabi, mon camarade, a parcouru l’Europe à vélo. C’était il y 6 ans ».
Associer lecture et sport dans une aventure hors du commun
Mais comment joindre le sport à la lecture ? Et comment les promouvoir ensemble dans les rangs des jeunes générations ? Gabriel Bota explique :
« Toutes les éditions du projet « Lis et pédale » se déroulent dans le cadre du Festival du Livre Transilvania. Notre objectif est de promouvoir la lecture et le sport chez les jeunes et pas seulement. La première édition a eu lieu en 2017. A ce moment-là j’étais tout seul et je suis parti de Roumanie pour visiter une dizaine de pays. En route, j’ai lu 10 livres et j’ai rendu visite à 10 écrivains à leur domicile. Plus tard, ils ont été nombreux à nous rendre visite à Cluj, dans le cadre du festival. En tout, j’ai parcouru 4 884 km en 40 jours et j’ai persuadé des dizaines de milliers de personnes de promouvoir davantage la lecture et le sport. Dès le début, notre message a été très simple : promouvoir la lecture et le sport en prêchant par l’exemple. Ensuite, j’ai formé une superbe équipe avec Rudy, dès 2022, lorsque nous nous sommes rendus au-delà du Cercle Arctique, au niveau du point le plus au nord du monde, arrivant jusqu’au cap Nord. Notre but était de nous approcher du Pôle Nord, ce qui ne fut malheureusement pas possible à ce moment-là. »
Un projet né d’une aventure littéraire roumaine
Comment a été perçu ce message au Cap Horn ? Rudolf Nyari:
« Ce fut la surprise la plus grande pour nous, puisqu’en parlant de ce projet avec tous ceux que nous avons rencontré, nous avons constaté que cette idée les a fait réagir et qu’ils nous ont soutenu tant qu’ils le pouvaient. Ils ont compris le message pour les jeunes mais en même temps ils ont compris aussi l’histoire derrière ce message et l’idée était d’envoyer un livre jusqu’au bout du monde. Il s’agit du roman de Radu Tudoran « Toate pânzele sus »/ « Hisser les voiles », un livre célèbre qui a marqué notre jeunesse. Et en effet, toute notre aventure a été construite autour de ce livre qui raconte justement l’histoire de deux amis qui ont eu pour projet de se rendre en Terre de feu. Dans cette aventure, ils se sont séparés, se sont réunis pour découvrir finalement ces endroits. En quelque sorte, nous avons suivi la même route de plus de 40 000 km, mais par avion, après quoi nous avons pédalé 1 700 km de Punta Arenas à Ushuaia, pour parcourir à vélo ce trajet en un temps record de 8 jours. Ensuite nous nous sommes embarqués sur un bateau pour arriver au Cap Horn. Ce fut un voyage de 5 jours durant lesquels nous sommes passés par les glaciers les plus importants de l’hémisphère sud, pour arriver au Cap Horn, où à l’aide de l’équipage qui a compris notre message, nous avons réussi à débarquer finalement avec nos vélos et porter le deuxième livre au phare qui se trouve sur l’île. Il est habité par un officier de la marine chilienne avec sa famille pour des périodes de 5 ans. Nous avons fait don de ce livre en guise de tribut de la littérature roumaine, pour que tous ceux qui mettent le pied sur cette île puissent y voire un morceau de la littérature roumaine. »
Gabriel Bota a également ajouté :
« L’histoire derrière le livre est d’autant plus impressionnante que Radu Tudoran est le frère d’un autre célèbre écrivain roumain: Geo Bogza. Tudoran n’est pas son vrai nom, c’est son nom de plume. Son vrai nom est Nicolae Bogza. Il cpnvient aussi d’expliquer pourquoi nous avons choisi d‘approter ce livre : le rêve de sa vie était de voyager autour du monde. Il n’avait jamais quitté la Roumanie. Qui plus est, il avait commencé à faire construire une goélette dans le port de Galati, qui n’a finalement jamais quitté son port d’attache. Nous avons donc décidé de faire voyager ce volume parce que les héros du roman y sont arrivés. »
Et c’est ainsi qu’un exemplaire de luxe, à reliure en cuir, un cadeau fait par la Bibliothèque universitaire centrale de Cluj, a été déposé à la bibliothèque d’Ushuaia, et une édition datée de 1967 du même volume a été laissée sur l’île du cap Horn. Et nous mettons fin à notre chronique par le message de nos deux aventuriers :
« N’oubliez pas de lire et de faire du sport »
En associant lecture et sport dans une aventure hors du commun, Gabriel Bota et Rudolf Nyari nous rappellent que la passion et la détermination peuvent ouvrir de nouvelles voies pour inspirer la jeunesse. Leur projet « Lis et pédale » est bien plus qu’un simple défi physique : c’est un véritable plaidoyer pour la culture et l’effort, démontrant que l’esprit et le corps peuvent s’élever ensemble. À travers leurs périples extraordinaires, ils prouvent que lire et se dépasser vont de pair. Une belle leçon de vie qui, espérons-le, motivera d’autres à suivre leur exemple !