Les relations diplomatiques entre la Roumanie et le Japon
La Roumanie et le Japon entretiennent des relations diplomatiques depuis 1902, date à laquelle les deux pays ont signé un traité commercial. Pendant la Première Guerre mondiale, la légation roumaine à Tokyo a été ouverte en 1917. Auparavant, l'espace japonais avait été décrit par un Roumain dans le dernier quart du XVIIe siècle, Nicolae Milescu, un routard qui avait voyagé en Extrême-Orient. Retour.
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Steliu Lambru, 10.02.2025, 10:13
Les premières mentions du Japon par des Roumains
La nature humaine fait que les hommes ont depuis toujours été interpellé par la manière de vivre des autres, par leurs coutumes et par leur mode de vie, par leur culture et par des civilisations éloignées, et cela bien avant l’ère de la mondialisation. C’est d’abord du boyard, diplomate et explorateur roumain Nicolae Milescu qui a vécu au 17e siècle, que nous avons hérité les premiers écrits sur le Japon, sur le quotidien et la civilisation japonaise de ce temps.
Mais ce ne sera que bien plus tard, en 1902, que l’ambassadeur du Japon à Vienne va initier les premiers contacts dans le dessein de nouer les relations diplomatiques entre le Japon et la Roumanie. C’est encore la même année que sera signé le premier contrat commercial entre Tokyo et Bucarest. Ensuite, pendant la Grande Guerre, les deux pays se retrouvent côte-à-côte, alliés des franco-britanniques. Et c’est dans ce contexte qu’au mois d‘août 1917 la Roumanie ouvrira sa représentation diplomatique dans la capitale du Japon, alors que le Japon n’ouvrira qu’en 1922 son ambassade à Bucarest. Aussi, si la légation roumaine de Tokyo allait être fermée en 1922 pour cause de coupes budgétaires, elle rouvrira à nouveau en 1927 pour fonctionner sans interruption jusqu’au mois de septembre 1944. Durant la Seconde Guerre mondiale les deux Etats seront à nouveau alliés, à l’intérieur de l’Axe cette fois.
Après la Seconde guerre mondiale
Après la guerre, les relations diplomatiques entre les deux Etats ne seront renouées qu’en 1959. Ion Datcu, nommé ambassadeur de Bucarest à Tokyo en 1966, racontait son expérience du pays du Soleil levant en 1994, dans une interview conservée par le Centre d’histoire orale de la Radiodiffusion roumaine.
Ion Datcu : « La Roumanie était fort méconnue à Tokyo, même dans les cercles gouvernementaux. Je me rappelle leur étonnement lorsque nous appuyions une position divergente de la ligne soviétique. Pour les Japonais, le bloc de l’Est était un bloc doté d’une seule voix : celle de Moscou. Plus tard j’ai compris que les Américains voyaient les choses de la même manière. Avec les hommes d’affaires en revanche c’était différent. Je suis allé visiter nombre d’entreprises japonaises, nous développions déjà les affaires avec l’Occident à l’époque, l’on achetait des bateaux, l’on construisait des bateaux, de l’électronique. Les hommes d’affaires étaient souvent mieux informés, plus intéressés par le marché roumain. »
Rencontre avec l’empereur du Japon
Mais quel ne sera la surprise de l’ambassadeur roumain Ion Datcu lorsqu’il rencontra l’empereur du Japon.
Ion Datcu : « L’empereur Hirohito avait un vrai sens de l’humour, un grand monsieur, une personne conviviale sinon humble. Et j’ai eu la surprise de constater que l’empereur connaissait bien davantage de choses sur notre pays que les membres de son gouvernement. Il a commencé à parler du delta du Danube, il connaissait énormément sur la faune, sur la faune marine notamment, et il voulait en apprendre davantage. De retour des vacances, j’ai amené avec moi des livres avec des cartes du delta que j’ai eu le plaisir de lui en faire cadeau. Je lui ai même lancé l’invitation au nom de mon gouvernement de venir fouler le sol et traverser les eaux de cette région qui l’intéressait tant. Il n’arrêtait pas de s’étonner de l’énorme richesse de notre delta du Danube. Il avait étudié la biologie et s’intéressait toujours à ce type de recherches, aux animaux marins ».
Des relations dominées par les questions économiques
Mais les relations entre les deux pays étaient dominées par les questions économiques.
Ion Datcu estime que ce sont les Japonais qui ont inventé la diplomatie commerciale : « Mon mandat se concentrait sur les questions d’ordre économique. A l’époque, on était en train de moderniser toute une série de capacités industrielles, dont l’usine d’aluminium, et je me souviens avoir conclu un contrat avec un des grands noms du domaine, Marubeni. Grâce à cela nous avons développé notre chantier naval et avons pu construire par la suite notre flotte commerciale. Nous parvenons à exporter différents types d’alliages métalliques dont de l’acier, et cela dans un pays bien connu pour sa sidérurgie. Pour Bucarest, le Japon avait surtout un intérêt de nature économique, commerciale, l’intérêt politique étant plutôt limité. Les Japonais avaient pratiquement lancé ce concept de diplomatie économique et commerciale, alors qu’à l’époque la diplomatie couvrait surtout le champ du politique et le domaine militaire, son domaine de prédilection. Mais le Japon orientait déjà ses priorités en matière de politique étrangère et de diplomatie en fonction de ses intérêts économiques, vers les Etats-Unis, vers sa zone d’influence, vers son voisinage immédiat, mais aussi vers d’autres régions du globe ».
La Roumanie et le Japon, deux Etats bien éloignés géographiquement, sont parvenus depuis à mieux se connaître et à nouer des relations dans bien de domaines. Une relation bilatérale à la réussite de laquelle l’ancienneté et la tradition des relations diplomatiques concourent pleinement. (Trad. Ionut Jugureanu)