Des solutions pour la cohabitation pacifique entre l’homme et l’ours
Sous la loupe : le rôle de la technologie dans le démenti des fausses informations et la documentation des dommages, mais aussi le pouvoir de l'intelligence artificielle pour générer des solutions afin de prévenir les conflits entre l'homme et l'ours.
Daniel Onea, 12.12.2024, 10:01
« TusnadEcoBearConf » arrive à sa 3e édition
La troisième édition de la Conférence internationale « TusnadEcoBearConf » s’est récemment déroulée à Băile Tușnad, dans le centre de la Roumanie. Cette dernière a réuni des dizaines de spécialistes venus des quatre coins de l’Europe, ainsi que des représentants des autorités et institutions impliqués dans la gestion et la prévention des conflits avec les ours.
Cristian-Remus Papp est coordinateur du Département des espèces sauvages au sein de l’ONG World Wild Fund Roumanie. Il nous a expliqué que les chercheurs, scientifiques et praticiens avaient participé à plus de 40 présentations sur la coexistence avec les espèces de grands carnivores:
« Beaucoup se sont concentrés sur des solutions pratiques. D’autres ont exploré la possibilité de créer des communautés « bear smart », comme c’est déjà le cas à Băile Tușnad. Nous avons eu l’opportunité de présenter notre projet, qui a débuté il y a maintenant deux ans, et qui semble déjà avoir attiré l’attention d’experts étrangers. Nous avons beaucoup à apprendre d’eux, mais la réciproque est aussi vraie. Il est certain que nos situations diffèrent, nous n’avons pas la même population d’ours et nous évoluons dans des contextes différents. Cet échange d’expériences est donc plus que bienvenu. C’est justement pour cette raison que la conférence de Tușnad est tout à fait pertinente et devient même emblématique, du moins pour toute la région des Carpates. Il s’agit d’une conférence qui, à terme, pourrait devenir la plus importante d’Europe dans le domaine de la cohabitation entre l’homme et les espèces de grands carnivores. »
Le rôle de la technologie
Parmi les sujets intéressants, on retrouve le rôle de la technologie dans le démenti des fausses informations et la documentation des dommages, mais aussi le pouvoir de l’intelligence artificielle pour générer des solutions afin de prévenir les conflits entre l’homme et l’ours.
Cristian-Remus Papp poursuit :
« Concrètement, la technologie a suffisamment progressé pour nous aider à minimiser les conflits. Il existe, par exemple, un radar de conflit potentiel, qui prend en compte les bases historiques de la présence des ours ainsi que les conflits passés. Il peut intégrer des informations en temps réel, émises par exemple par des colliers posés sur les ours ou des caméras à détecteur de mouvement placées dans les forêts et capables de transmettre des images des ours. Il existe également un logiciel qui permet d’identifier l’espèce qui se trouve face à la caméra. Sur la base de toutes ces informations, l’IA peut générer une prédiction, de la même manière que nous obtenons les prévisions météorologiques pour la journée en cours ou pour les jours à venir. Ce système peut également nous indiquer, sur la base de toutes ces données, quand et où des conflits indésirables avec des ours peuvent se produire. Ces informations sont particulièrement importantes, notamment pour les équipes d’intervention. À Băile Tușnad, cette dernière reçoit des signaux en temps réel sur la présence des ours, qui sont surveillés par des colliers. L’équipe est donc en mesure d’agir avant que l’ours ne pénètre dans la ville, évitant ainsi tout incident potentiel. »
Moins de conflits homme-ours à Tusnad
En 2023 et 2024, grâce à la mise en œuvre de nouvelles technologies aucun conflit entrainant des dégâts matériels ou autres n’a eu lieu à Băile Tusnad. De même, le nombre d’appels passé au 112 a diminué par rapport à 2021, passant de plus de 220 appels à 14 en 2024. N’oublions pas toutefois que la forêt reste l’habitat naturel des ours et autres animaux qui étaient là bien avant nous, et qu’il est important de préserver ces espaces et d’en prendre grand soin. Car c’est bien car leur habitat est menacé que les animaux finissent par se rendre dans nos villes et villages pour trouver de quoi se nourrir. La technologie est une solution, mais n’oublions pas de nous attaquer aussi à la racine du problème : respecter davantage la nature. (trad. Charlotte Fromenteaud)