RRI Live!

Écoutez Radio Roumanie Internationale en direct

Le goulag roumain du Bărăgan

Région fertile mais faiblement peuplé, le Bărăgan a été choisi par le régime communiste des années 50 pour y implanter le goulag roumain, lieu de déportation de près de 40.000 de ces « ennemis du peuple », comme le régime communiste appelait ses opposants. Les témoignages de certains des survivants du goulag communiste roumain ont été enregistrés et conservés par le Centre d’histoire orale de la Radiodiffusion roumaine.

Radio Romania International
Radio Romania International

, 08.04.2024, 11:25

Plusieurs vagues de déportations vers le Bărăgan

Région fertile mais faiblement peuplé, le Bărăgan a été choisi par le régime communiste des années 50 pour y implanter le goulag roumain, lieu de déportation de près de 40.000 de ces « ennemis du peuple », comme le régime communiste appelait ses opposants. Les témoignages de certains des survivants du goulag communiste roumain ont été enregistrés et conservés par le Centre d’histoire orale de la Radiodiffusion roumaine.

C’est en 1951 que les premières déportations en masse débutent. Il s’est agi en premier lieu de fermiers, fondamentalement opposés à la collectivisation des terres initiée au mois de mars 1949 sur base « volontaire ». Il s’est agi ensuite de certains membres des minorités nationales : des Sicules, des Serbes, des Magyares, des Aroumains ou encore des Roumains originaires de Bessarabie qui avaient fui en 1944 l’occupation soviétique de la région. Il y avait parmi ces derniers l’élève d’alors Elena Boroș, réfugiée de Bessarabie avec ses parents, qui avaient élu domicile dans la région du Banat, dans l’ouest de la Roumanie, près de la frontière yougoslave. Ecoutons-la raconter son expérience traumatique :

« J’étais élève à l’école technique agricole de la ville Sânnicolau Mare lorsque mes parents ont été arrêtés dans une rafle de nuit. Une rafle de nuit déroulée dans les régions de Banat et de Mehedinti. Il était minuit lorsqu’un policier et un agent de la Securitate, la police politique du régime communiste, avaient débarqués à notre domicile. Ils ont dû plier bagage et suivre ces agents sur le champ. Le lendemain, mon père me téléphone, m’ordonne de prendre le premier train et les rejoindre à la gare. C’est là, sur le perron de la gare, que je les retrouverai, en effet, avec leurs valises. Tout de suite après, l’on nous fait monter dans un autre train et l’on part vers une destination inconnue ».

L’angoisse du renvoie vers l’URSS

L’angoisse des déportés étaient à son comble se rappelle Elena Boroș. Les gens pensaient qu’on allait les ramener en l’Union Soviétique, les déporter en Sibérie. Poursuivons son récit :

« Le lendemain matin, notre convoi arrive à Nicoleşti-Jianu. C’est là que l’on s’arrête sur une voie de garage. Mon père s’inquiète, prend son courage à deux mains et ose questionner l’agent de la Securitate sur le sort que l’on nous réserve. C’est alors que l’on apprend qu’on a atteint le but du voyage. L’on nous embarque ensuite, avec nos bagages, dans des camions qui nous mènent à Satu Nou, le Nouveau village. En fait, il n’y avait pas de village. On était au beau milieu des champs. Il y avait en effet le tracé des rues, et quelques bornes qui faisaient office de clôture, pour séparer les futures propriétés. L’on répartissait à chaque famille une parcelle de 2500 mètres. Nous, l’on s’arrête sur une telle parcelle. Je me souviens, elle était recouverte de blé. Nous avons descendu nos bagages du camion et l’on nous abandonna là, sous les étoiles. On était sans voix. »  

Les familles déportées passeront la nuit dans ces champs, blotties dans les couvertures amenées dans leurs bagages. Le lendemain, les hommes tentent d’ériger quelques abris de fortune, des cabanes en terre. Ils creusent pour trouver de l’eau. Une semaine après, les autorités débarquent, pour envoyer les hommes travailler dans une ferme, récolter le coton.

Visite de la ministre des Afffaires étrangères de l’époque, Ana Pauker

Vasile Neniță, déporté encore enfant dans la région du Bărăgan, se souvient du désespoir que ressentaient ces gens abandonnés au milieu de nulle part :

« C’était l’été et la chaleur était étouffante. L’on n’avait pas d’eau sur place, on nous amenait l’eau en citerne depuis la ville de Borcea. Une eau d’une qualité douteuse. Beaucoup en sont tombés malades. Et puis, les gens commencent à mourir. J’avais 11 ans, mais je me souviens comme si c’était hier. La première années les tombes apparaissent en nombre. Beaucoup, surtout les vieux, ne sont pas parvenus à dépasser l’hiver. Et c’était la même chose dans tous les villages des déportés. L’on n’avait rien, il n’y avait que des champs tout autour de nous. L’on voyait un arbre de lieu en lieu. Et le vent, mon dieu. On était comme dans un roman d’horreur. »  

Vasile Neniță se souvient de la visite d’Ana Pauker, poids lourd du régime communiste nouvellement installé et ministre des Affaires étrangères, dans les villages de déportés :

« Les policiers font d’abord leur apparition et amènent tout le village sur un champ, pour l’accueillir. La ministre débarque en hélicoptère et tient son discours. L’on nous amène ensuite des planches, du matériel, et l’on nous intime l’ordre de bâtir nos maisons. L’on s’organise en équipes de 8 à 10 personnes, et l’on bâtira des cabanes en terre, sur structure de bois. Des cabanes comprenant 2 pièces et un coin cuisine, recouvertes des toits de roseaux. »    

En 1955, après 4 années de privations extrêmes, les autorités lèvent les interdictions et permettent aux déportés de quitter le goulag, pour autant qu’ils le désirent. La plupart de familles regagneront leurs foyers dans le Banat, marquées à vie par la terrible expérience de la déportation. (Trad. Ionut Jugureanu)

banner-Pro-Memoria.-960x540-2
Pro Memoria lundi, 18 novembre 2024

L’exil du prince Nicolas de Roumanie

 Nicolas, frère cade du futur roi Carol II   Né le 18 août 1903 à Sinaia, dans la résidence d’été des souverains roumains, le frère...

L’exil du prince Nicolas de Roumanie
banner-Pro-Memoria.-960x540-2
Pro Memoria lundi, 11 novembre 2024

La présence des statères dans la province de Dobroudja

Des monnaies de l’Antiquité   Le statère est un terme générique qui désigne en numismatique diverses monnaies en or ou en argent...

La présence des statères dans la province de Dobroudja
L’officiel du parti communiste roumain, le journal Scânteia /L’étincelle
Pro Memoria lundi, 04 novembre 2024

L’officiel du parti communiste roumain, le journal Scânteia /L’étincelle

La presse à l’époque communiste   Si la liberté de la presse était garantie depuis 1789 par l’article 11 de la Déclaration des...

L’officiel du parti communiste roumain, le journal Scânteia /L’étincelle
La Sécuritate et le KGB en divorce
Pro Memoria lundi, 28 octobre 2024

La Sécuritate et le KGB en divorce

  Le général Neagu Cosma, ancien chef de la direction de contrespionnage de la Securitate, racontait dans une interview de 2002, conservé par...

La Sécuritate et le KGB en divorce
Pro Memoria lundi, 21 octobre 2024

Le destin du responsable communiste Vasile Luca

Occupés vers la fin de la Seconde Guerre mondiale par l’Armée rouge, les Etats d’Europe centrale et de l’Est se sont progressivement vus mis...

Le destin du responsable communiste Vasile Luca
Pro Memoria lundi, 14 octobre 2024

Le parti communiste et la réforme agraire en Roumanie

La propriété privée, démonisée par les communistes   Selon les thèses de Marx, il fallait bien que dans un Etat communiste la propriété...

Le parti communiste et la réforme agraire en Roumanie
Pro Memoria lundi, 07 octobre 2024

La flotte militaire roumaine durant la Seconde Guerre mondiale

L’histoire de la flotte militaire roumaine démarre au milieu du 19e siècle   L’histoire de la flotte militaire roumaine démarre au milieu...

La flotte militaire roumaine durant la Seconde Guerre mondiale
Pro Memoria lundi, 30 septembre 2024

Ana Pauker

Il fut un temps où le simple fait d’évoquer le nom de Ana Pauker faisait frissonner l’interlocuteur. Dans l’histoire du régime communiste...

Ana Pauker

Partenaire

Muzeul Național al Țăranului Român Muzeul Național al Țăranului Român
Liga Studentilor Romani din Strainatate - LSRS Liga Studentilor Romani din Strainatate - LSRS
Modernism | The Leading Romanian Art Magazine Online Modernism | The Leading Romanian Art Magazine Online
Institului European din România Institului European din România
Institutul Francez din România – Bucureşti Institutul Francez din România – Bucureşti
Muzeul Național de Artă al României Muzeul Național de Artă al României
Le petit Journal Le petit Journal
Radio Prague International Radio Prague International
Muzeul Național de Istorie a României Muzeul Național de Istorie a României
ARCUB ARCUB
Radio Canada International Radio Canada International
Muzeul Național al Satului „Dimitrie Gusti” Muzeul Național al Satului „Dimitrie Gusti”
SWI swissinfo.ch SWI swissinfo.ch
UBB Radio ONLINE UBB Radio ONLINE
Strona główna - English Section - polskieradio.pl Strona główna - English Section - polskieradio.pl
creart - Centrul de Creație Artă și Tradiție al Municipiului Bucuresti creart - Centrul de Creație Artă și Tradiție al Municipiului Bucuresti
italradio italradio
Institutul Confucius Institutul Confucius
BUCPRESS - știri din Cernăuți BUCPRESS - știri din Cernăuți

Affiliations

Euranet Plus Euranet Plus
AIB | the trade association for international broadcasters AIB | the trade association for international broadcasters
Digital Radio Mondiale Digital Radio Mondiale
News and current affairs from Germany and around the world News and current affairs from Germany and around the world
Comunità radiotelevisiva italofona Comunità radiotelevisiva italofona

Diffuseurs

RADIOCOM RADIOCOM
Zeno Media - The Everything Audio Company Zeno Media - The Everything Audio Company