Les effets du réchauffement climatique une fois dépassé le seuil de 1,5°C
Pour 2040, prochaine étape de référence, la Commission européenne s'est donnée pour objectif la diminution de 90% des mêmes émissions des gaz à effet de serrepar rapport à leurs niveaux de 1990.
Corina Cristea, 01.03.2024, 15:12
Des visées ambitieuses côté climat
L’Union européenne s’était engagée d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 et s’est donné un premier objectif intermédiaire pour 2030 : réduire les émissions de gaz à effet de serre de 55 % par rapport aux niveaux de 1990.
Pour 2040, prochaine étape de référence, la Commission européenne s’est donnée pour objectif la diminution de 90% des mêmes émissions des gaz à effet de serre par rapport à leurs niveaux de 1990.
Tout cela, dans des conditions où les phénomènes extrêmes, telles les inondations, la sécheresse, les glissements de terrain ou les périodes caniculaires, ne revêtent plus le caractère d’exception d’autrefois. Nous les ressentons de plus en plus fréquemment et intensément, alors que ces phénomènes semblent s’installer sur de longues périodes. En effet, les données montrent que les neuf dernières années ont été les plus chaudes jamais enregistrées depuis le début des relevés officiels.
L’urgence climatique a été officiellement décrétée
L’urgence climatique a été officiellement décrétée, elle est confirmée par les scientifiques et de plus en plus intégrée par la société dans son ensemble, confirme le professeur des universités Mircea Duţu, président de l’Université écologique de Bucarest. Avant d’ajouter : c’est bien maintenant le moment où, si nous agissions efficacement, nous serions encore en mesure de limiter les dégâts en faisant jouer notre capacité d’adaptation, mais sans entraîner des conséquences majeures pour les générations actuelles et sans nuire à l’avenir de l’humanité et au mode de vie qui existe actuellement sur notre planète.
Mircea Duțu : « Récemment, sur la base des conclusions des principaux instituts météorologiques et climatiques du monde, l’Organisation météorologique mondiale a officiellement confirmé que 2023 était de loin l’année la plus chaude jamais enregistrée, avec une température moyenne mondiale dépassant de 1,45° celle de la période préindustrielle. En outre, l’année dernière peut être considérée comme un concentré des catastrophes qui nous attendent si nous n’agissons pas avec célérité, cohérence et détermination. Les records ont été battus à tous les niveaux en 2023 : la moyenne des températures a été largement supérieure à celles des années records précédentes, 2016 et 2020, qui étaient déjà de 1,29°, respectivement de 1,27° plus élevées que la moyenne des températures à l’époque préindustrielle. La température enregistrée chaque mois, entre le mois de juin et le mois de décembre, a fait exploser la barre de 1,5°, avec un record absolu, enregistré au mois de décembre de plus de 1,78° par rapport à l’ère préindustrielle. »
Maintenir en-dessous de la barre de 1,5°, seuil considéré comme crucial pour éviter une catastrophe climatique
Les dirigeants mondiaux s’étaient pourtant engagés en 2015, par l’Accord de Paris, de tenter de limiter la hausse des températures de sorte à la maintenir en-dessous de la barre de 1,5°, seuil considéré comme crucial pour éviter une catastrophe climatique. Malgré tout, après les températures record de 2023, l’année 2024 a débuté sur la même lancée. Jamais l’on n’a eu un mois de janvier aussi chaud et, pour la première fois, nous avons dépassé le seuil de 1,5° par rapport à l’ère préindustrielle pendant une période de 12 mois consécutifs.
Plus précisément, selon les données de l’Observatoire européen Copernicus, entre février 2023 et janvier 2024, la température mondiale de l’air à la surface était de 1,52°C plus élevée que pendant la période 1850-1900. Les spécialistes, tel Richard Betts, directeur d’études sur l’impact du changement climatique au Bureau météorologique national britannique, tentent pourtant de relativiser ces chiffres. Aussi, M. Betts affirme que « cela ne veut pas dire que nous avons dépassé le seuil de 1,5°, fixé à Paris en 2015 pour tenter d’enrayer le réchauffement climatique et ses conséquences. En effet, pour que cela se produise, il faudrait à ce que cette limite soit dépassée de manière stable pendant plusieurs décennies ». Néanmoins, c’est bien d’un signal d’alarme qu’il s’agisse.
Mais, au fond, que signifierait concrètement le dépassement de ce seuil de 1,5°, et quels seraient les effets attendus en ce cas ?
Le professeur Mircea Duţu explique : « Le dépassement du seuil de 1,5° par rapport aux niveaux préindustriels pourrait déclencher l’atteinte et le franchissement de plusieurs points de bascule, c’est-à-dire des changements irréversibles dans l’équilibre du système climatique, provoquant des effets en cascade. De tels repères ont déjà été dépassés dans certaines régions du globe et se produiront au niveau planétaire si nous n’arrêtons pas la hausse des températures jusqu’aux niveaux attendus dans les évaluations du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) et officiellement assumés par l’Accord de Paris. Au niveau des conséquences concrètes, l’on parle d’extinctions en chaîne en termes de biodiversité, d’épuisement des nappes phréatiques, de fonte accélérée des glaciers, de canicules insupportables, enfin la diminution des terres habitables, ces lieux où l’on peut y vivre normalement, et où l’on ne pourra plus assurer la sécurité alimentaire et où les manifestations de phénomènes météorologiques extrêmes deviendront permanentes. Aussi, selon la NASA, des régions d’Iran, d’Égypte, du Yémen ou d’Arabie Saoudite pourraient devenir inhabitables pour les êtres humains d’ici 2050. »
Pour parvenir à une telle conclusion, poursuit le professeur Mircea Duţu, on a pris en compte à la fois l’indice de température de l’air et celui du thermomètre dit humide. L’humidité élevée de l’air empêche le corps humain de transpirer pour régler sa température, situation qui fait qu’à des températures qui dépassent les 35° la situation devient fatale. (Trad. Ionut Jugureanu)