Le marché automobile roumain à l’ère de l’électrique
Le Salon international de l'automobile de Bucarest a rouvert ses portes après une longue période qui a duré pas moins de 11 ans.
Iulia Opran, 12.06.2018, 14:15
A cette occasion, les visiteurs ont pu admirer 20 marques et plus de 150 modèles d’automobiles, mais aussi de 2 et de 3 roues. Pour autant que l’avenir appartienne à l’éco mobilité, les modèles hybrides, alimentés à l’hydrogène ou encore les modèles 100% électriques ne pouvaient pas louper cette fête. Il s’agit bien du dernier cri en matière de technologies de pointe visant la réduction de la pollution dans les grandes villes que l’industrie auto a dévoilé pour l’occasion.Ce que représente plus exactement le Salon automobile bucarestois en termes économiques pour l’industrie de ressort nous détaille George Grigorescu, le président de l’Association des producteurs et des importateurs d’automobiles de Roumanie, également organisateur de l’événement : «Il s’agit d’un événement censé relancer l’intérêt du public et le contact direct entre les constructeurs automobiles et les passionnés. C’est l’élément qui fait la différence entre notre Salon et les autres foires organisées les dernières années, mais dont aucune n’a l’ampleur du Salon international auto Bucarest, le SIAB. Et puis, le degré de participation des constructeurs est la preuve de leur confiance dans le marché roumain, alors que la dynamique du marché justifie pleinement cet intérêt ».
Le président américain Donald Trump a récemment annoncé son intention de taxer les importations d’aluminium et d’acier. Dans quelle mesure cette décision pourrait-elle affecter la production roumaine de composantes automobiles ? George Grigorescu, le président de l’APIA, nous répond : « Les composantes automobiles roumaines sont généralement destinées au marché européen, il est rares qu’elles s’adressent au marché américain. Les principaux producteurs de voitures et les fabricants de composantes, tel Continental, qui est aussi l’employeur le plus important en Roumanie, le groupe allemand Inna Schaeffler, Hutchinson, qui produit des ceintures de sécurité dans la région de Brasov, cette industrie horizontale, donc, basée notamment dans les régions de Braşov, de Sibiu, de Timişoara, est une industrie qui a pour client l’industrie automobile européenne. J’ignore quelle est la proportion exacte de cette production qui arrive sur le marché américain. Donc le changement de la politique américaine dans le domaine pourrait avoir des répercussions, mais ce serait plutôt sur le volume des échanges entre l’Europe et les Etats-Unis. Je ne pense pas qu’il ait un impact direct sur l’industrie automobile roumaine. »
Au niveau mondial, on parle de plus en plus de véhicules verts, écologiques. En Europe, c’est bien la Norvège qui détient la palme dans ce domaine. Les ventes mondiales de véhicules hybrides et électriques ont totalisé 3,8 millions d’unités. Sur le podium, on retrouve les voitures à essence avec 62 de millions d’unités vendues, ensuite, loin derrière, les véhicules diesel, avec près de 14 millions d’unités. En 2017, le constructeur automobile national, Dacia, a écoulé plus de 655.000 véhicules, en hausse de 12,2% par rapport à l’année précédente. Pour ce qui est de l’évolution du marché automobile vert, voici ce que George Grigorescu constate : « Je regarde l’évolution de ce marché avec un certain intérêt. Il y a cette prime à l’achat d’un véhicule 100% électrique ou hybride, par l’entremise du programme Rabla (le Taquot) Plus. En Europe, nous sommes un des pays munis de programmes extrêmement ambitieux dans ce domaine. Le problème ne vient pas d’ici ni même de la réticence des acheteurs potentiels. Ces derniers sont de plus en plus nombreux et, en 2018, on va certainement enregistrer une hausse des ventes dans le segment des voitures électriques et hybrides. Là où le bât blesse c’est au niveau de l’infrastructure, et cela concerne l’absence des stations d’alimentation. Je discutais d’ailleurs dernièrement avec monsieur Brezuică, de l’administration du Fonds pour l’environnement, qui mène un programme ambitieux d’investissements pour installer des stations de chargement rapide sur les principaux axes routiers de Roumanie. Ce sera un élément encourageant mais, d’un autre côté, je suis mi- inquiet mi- découragé par l’actuelle capacité de chargement des batteries à domicile. Si on regarde les difficultés, les coûts, la bureaucratie attachés à l’installation d’une ligne de tension d’une cinquantaine de mètres, et puis, aussi, les capacités tellement limitées du réseau, on se rend compte que l’on n’a pas vraiment beaucoup de chance.»
« Le comportement au volant, entre responsabilité et systèmes d’assistance ». Quel est le type du chauffeur roumain ? Est-il capable de s’autoévaluer ? C’est de cela que nous parle le président de l’APIA, George Grigorescu, pilote de courses et moniteur de conduite défensive. « Tous mes collègues moniteurs qui travaillent dans le domaine de la conduite défensive, en fait de la conduite correcte, parce que nous apprenons nos élèves à conduire correctement d’abord, tous mes collègues, donc, se heurtent aux questions de la performance des chauffeurs. Mon constat, et je le dis avec regret, c’est qu’une partie non négligeable des conducteurs auto sont bêtes et méchants. Il s’agit d’un mélange explosif, d’un cocktail à la roumaine qui génère 2.000 morts chaque année sur nos routes. Et je ne parle là que de morts. On compte aussi des blessés, surtout des piétons. Parce que l’on pense que dans nos véhicules super-performants rien ne peut nous arriver. Les chauffeurs bêtes et méchants font toujours confiance à leurs ABS, ESP, AFU, TSC, toutes ces merveilles technologiques, à leurs pneus surdimensionnés, et ils pensent que rien ne peut leur arriver. Pourtant, les lois de la physique restent les mêmes, et cette confiance aveugle les fait surévaluer leurs capacités à pouvoir maîtriser le véhicule quand ils sont confrontés à une situation critique. Et de là jusqu’aux accidents graves il n’y a plus qu’un pas. De toute manière, on est les premiers en Europe en nombre d’accidents routiers mortels rapportés à mille habitants, au nombre de voitures immatriculées et ainsi de suite. Et puis, je ne pense pas que la situation s’améliore. », a conclu sur une note pessimiste le président de l’APIA, George Grigorescu.
(Trad Ionut Jugureanu)