Le baromètre de l’industrie roumaine
L'année dernière, l'industrie roumaine a eu une contribution majeure quant à soutenir la croissance record que la Roumanie a enregistrée.
Florin Orban, 06.02.2018, 12:55
En Roumanie, le poids de l’industrie dans le PIB est bien supérieur à la moyenne de l’Union européenne. Plus encore, l’année dernière, l’industrie roumaine a eu une contribution majeure quant à soutenir la croissance record que la Roumanie a enregistrée. C’est bien la raison pour laquelle les économistes étudient attentivement les tendances des principaux indicateurs industriels. Ainsi, tous les mois, l’Institut roumain de sondage de l’opinion publique (l’IRSOP) lance en collaboration avec la Faculté de gestion de l’Ecole nationale d’études politiques et administratives (la SNSPA) un sondage d’opinion pour vérifier les tendances de l’industrie auprès d’un échantillon représentatif de managers. La production, les carnets de commandes, l’état des stocks, les nouvelles embauches, tout est passé au crible fin pour prendre le pouls de cette industrie qui fait la pluie et le beau temps dans l’économie roumaine. Le Baromètre de l’industrie du mois de décembre 2017 a été publié très récemment.
Le directeur général de l’IRSOP, Petre Datculescu, nous présente les résultats: « On peut en tirer trois conclusions principales. D’abord : la baisse presque brutale de l’activité industrielle au mois de décembre. Si les mois antérieurs, de septembre à novembre, la croissance de l’activité industrielle a été tant remarquable que constante, au mois de décembre nous avons assisté à un renversement de cette tendance. Pratiquement, l’activité industrielle s’est contractée, la tendance à la hausse s’est arrêtée net. On le voit à travers les indicateurs clés que l’on mesure, c’est-à-dire le volume de la production industrielle, les nouvelles commandes, les stocks, les commandes à l’exportation et celles passées par le marché intérieur, entre autres. La deuxième conclusion du Baromètre du mois de décembre dernier, c’est que l’on peut remarquer néanmoins de bons signes, pour ainsi dire. On constate d’abord une tendance à la baisse des coûts de production, qui avaient beaucoup augmenté dernièrement, mais il est possible que ces coûts aient baissé suite à la baisse d’ensemble de l’activité. Quoi qu’il en soit, les coûts de production ont baissé à un rythme moins important que le volume de la production et les nouvelles commandes. En général, les coûts de production se caractérisent par une élasticité moindre. Ensuite, le nombre d’emplois est resté stable. Les prix des produits ont quelque peu augmenté, ce qui est un très bon signe pour les compagnies. Enfin, dernière conclusion à tirer de ce baromètre, c’est l’optimisme des managers, et cela en dépit des performances moindres enregistrées par leurs entreprises au mois de décembre. »
Nous avons voulu savoir comment on pouvait expliquer les performances médiocres enregistrées au dernier mois de l’année passée.
Petre Datculescu, le directeur général de l’IRSOP, s’est prêté à l’exercice : «On enregistre tous les ans aux mois de novembre et de décembre un léger déclin de la production industrielle, qui se poursuit en janvier et février, alors que, d’habitude, le redressement ne revient qu’au mois de mars. C’est probablement un effet des fluctuations saisonnières. Cela est peut-être dû à la météo, aux vacances de fin d’année, mais cela peut tout aussi bien être mis en relation avec les contrats des entreprises. La fin d’année est une période où on signe des contrats, où on met la dernière touche aux plans d’affaires, où on négocie les prix de l’énergie, et où on touche à bien d’autres aspects en lien avec les activités à venir… Il y a donc ce genre de choses qui influent sur l’activité productive. Malgré tout, une telle chute, saisonnière ou pas, qu’elle soit ou non en lien avec la période des vacances, elle aura de toute manière, et quelles qu’en soient les raisons, des implications profondes à moyen terme, car c’est un fait : les carnets de commandes sont en chute libre au mois de décembre et, par voie de conséquence, la reprise va tarder. »
L’élément le plus interpellant du baromètre réside toutefois dans l’optimisme affiché des managers pour la période à venir, et ceci en dépit des mauvais chiffres enregistrés au dernier mois de l’année passée.
Petre Datculescu, le directeur général de l’IRSOP, s’essaye à une explication: « Si on comparait l’évolution du niveau de la production industrielle le long des trois dernières années depuis que nous mesurons le volume de l’activité en corrélation avec les attentes des managers, on remarque que, à chaque fois que le volume avait reculé, leurs prévisions pour les six mois suivants étaient à la hausse. A chaque fois que la réalité dégringole, les espoirs décollent. Ce constat nous a surpris forcément. Nous avons tenté d’expliquer un peu le phénomène. Puis, en éliminant successivement plusieurs facteurs, nous sommes arrivés à deux explications possibles. La première, c’est qu’à la fin de l’année, les managers disposent probablement d’une certaine visibilité sur la période à venir. Ils savent donc sur quoi ils peuvent compter. Ils ont peut-être même déjà conclu des contrats, ils disposent donc de promesses fermes, enfin ils disposent d’éléments qui justifient cette confiance. La seconde explication fait en revanche plutôt appel à la psychologie humaine. C’est qu’ils ont besoin de restaurer leur confort psychologique subjectif, et c’est pourquoi ils vont essayer de faire fi de certains signes alarmants, des difficultés objectives, pour se redonner du courage, se remettre à espérer, et se réinstaller de cette manière dans leur zone de confort. »
Notons encore que le sondage a été réalisé auprès d’un échantillon représentatif, formé par 344 entreprises inclues dans le panel formé par les 15.200 sociétés qui comptent plus de 9 employés, et qui génèrent près de 95% du chiffre d’affaires réalisé par l’ensemble de l’industrie roumaine. (Trad. Ionut Jugureanu)