Le marché agroalimentaire roumain
La Roumanie a atteint en 2016 un record historique pour les importations de produits agroalimentaires,
România Internațional, 05.09.2017, 13:02
2016 compte pour une des meilleures années agricoles en Roumanie. Malgré cela, le pays a atteint un record historique pour les importations de produits agroalimentaires, soit 6 milliards d’euros. En plus, son déficit commercial a dépassé les 500 millions d’euros, un niveau six fois supérieur à celui enregistré en 2015, lorsqu’il se chiffrait à 89 millions d’euros, révèle l’Institut national de la statistique. Quant aux exportations de tels produits, elles ont totalisé 5,95 milliards d’euros, soit une progression de 3,8% par rapport à 2015. L’année dernière, l’UE a été le principal partenaire de la Roumanie en matière de commerce aux produits agroalimentaires. C’est le blé qui a occupé la première place sur la liste des produits exportés. 7 millions de tonnes ont été exportées, soit deux de plus qu’en 2015, contre 1,14 milliards d’euros. Ce blé, provenant en grande partie de Hongrie et de Bulgarie, avait été réexporté. Toujours en 2016, la Roumanie a importé 63.500 tonnes de fromages et 190.700 tonnes de lait et de crème aigre, une quantité supérieure de 26% par rapport à celle de 2015.
Stefan Pădure, président de l’Association pour la promotion des produits agroalimentaires roumains, explique pourquoi ces importations ont augmenté : « Après la diminution de la TVA sur les denrées alimentaires, cette taxe s’applique au consommateur final, et ce dans les conditions où la Roumanie ne crée pas trop de valeur ajoutée ou n’exporte pas en priorité des produits à valeur ajoutée. Par conséquent, le consommateur a eu la possibilité de choisir, il a bénéficié d’une réduction des prix pour toutes ces catégories de produits, quelle qu’en ait été l’origine: marché communautaire ou pays tiers. Pratiquement, celui qui promouvait le produit formait aussi l’habitude de consommation. Autrement dit, si les chaînes de supermarchés apportaient des produits importés de l’espace communautaire, le consommateur n’avait pas vraiment la chance d’opter pour des produits autochtones. C’est là une conséquence du marché libre, ce qui explique aussi le poids des importations de produits dérivés. Nous avons exporté surtout du blé et du maïs, au détriment des produits dérivés. Prenons l’exemple de l’élevage d’animaux, cette première étape, suivie par celle de la transformation de la viande. Là non plus, les choses ne sont pas très bien mises au point en Roumanie. Nous importons y compris les cochonnets, parce que nous manquons et de stratégie et d’objectifs clairs. D’où l’impossibilité de nous concentrer sur certains segments par le biais des instruments financiers, tels que les fonds structurels et de cohésion. Nous avons visé non pas à atteindre des objectifs, mais à absorber cet argent ».
La viande de porc arrive en tête des importations de produits agroalimentaires en 2016: 200 mille tonnes, d’un montant total de 350 millions d’euros. Depuis un certain temps, l’élevage porcin est confronté à de nombreuses difficultés et sous-financé.
Beaucoup d’éleveurs de cochons se sont réorientés vers les fermes d’engraissement, moins coûteuses par rapport aux fermes de reproduction, très peu nombreuses en Roumanie. Les effectifs porcins se chiffrent en Roumanie à environ 4,2 millions de têtes. De ce point de vue, le pays se classe 9e dans l’Union européenne, après l’Allemagne, l’Espagne, la France, le Danemark, les Pays-Bas, la Pologne, l’Italie et la Belgique.
Ioan Ladoşi, président de l’Association des producteurs de viande porcine de Roumanie, s’exprime au sujet de la situation dans ce domaine: « Le secteur de la viande porcine a connu une période difficile à l’exportation. Depuis plus de 10 ans, la Roumanie n’a pas pu exporter de viande de porc à cause des problèmes de peste porcine. Une pause longue, donc, pendant laquelle des marchés et des contacts ont été perdus, et il n’est pas facile de revenir sur un marché de plus en plus compétitif comme celui de la viande de porc – et mondialisé surtout. Les contacts perdus doivent être renoués. Entre temps, le marché a changé, il y a d’autres joueurs, d’autres acheteurs. Nous avons un début timide, mais il faut avoir aussi une structure et une puissance économique très sérieuse pour compter sur l’exportation de viande de porc, et pour compter comme exportateur d’une telle denrée. Cela fait au moins 8 ans que j’ai porté à la connaissance des autorités que nous aurions besoin du double de truies par rapport au nombre existant. Et ce pour couvrir le nécessaire en porcelets… Ce n’est pas facile de faire une ferme de reproduction, les coûts sont dix fois plus importants. Les statistiques européennes indiquent que les petites fermes meurent dans toute l’Europe. On assiste à un processus de consolidation particulièrement ample au niveau du continent. Il ne faut pas s’étonner que l’Espagne soit devenue un des moteurs principaux de la production de viande porcine en Roumanie, parce qu’ils ont eu une stratégie et n’ont pas accordé d’aides aux fermes de moins de 2500 truies. Plus on baisse, plus la vente est difficile et les coûts – plus grands. »
Récemment, les autorités roumaines ont approuvé le Programme « Viande de porc des fermes roumaines » pour dépasser les difficultés de cette branche. Le projet sera mis en place entre 2017 et 2020, et l’enveloppe des aides d’Etat est pour cette année de 86 millions d’euros. Fin mai, la Roumanie a été admise sur la liste officielle des Etats sans peste porcine, et des pays tels le Japon, les Etats Unis, le Canada ou le Mexique ont déjà manifesté leur intention d’entamer des négociations pour la vente de viande de porc.
A cause des intermédiaires, les éleveurs ovins de Roumanie ont aussi des problèmes pour vendre leurs animaux vers les pays arabes. Entre le fermier roumain et le consommateur final il peut y avoir même trois intermédiaires. Dans ce cas aussi, le ministère de l’Agriculture et du Développement rural a promis d’intervenir pour éliminer les intermédiaires dans l’exportation de moutons vers les pays du Golfe. Il se donne pour tâche de convaincre les importateurs à venir chercher directement les moutons en Roumanie, soit en investissant ici dans des fermes de quarantaine et dans des abattoirs, soit dans leur pays d’origine. Les pouvoirs publics promettent aussi du soutien financier pour la vente de la laine. Après la disparition des fabriques d’étoffes en laine et des fabriques de tapis, la laine n’est plus recherchée en Roumanie. Les éleveurs ovins et caprins se sont plaints à maintes reprises d’être contraints, ces dernières années, à brûler ou à enterrer la laine de leurs animaux parce qu’il n’y a pas d’acquéreurs. Le ministère de l’Agriculture promet aux éleveurs 1 leu pour chaque kilo de laine vendu, mais pas plus de 15000 euros en 3 ans. (Trad. Ligia Mihaiescu, Mariana Tudose)