Croissance économique – positif et négatif
L'économie roumaine semble être dans une période d'enthousiasme, avec 5,2% de croissance, selon la CE, mais les spécialistes appellent à la prudence face à la détérioration du déficit public et une montée de l'inflation...
Florin Orban, 06.12.2016, 14:27
La Commission européenne vient de réviser à la hausse ses estimations relatives à la croissance de l’économie roumaine qui devrait progresser de 5,2% cette année. L’économie nationale devrait croître de 3,9% en 2017 pour se stabiliser à 3,6% en 2018, selon les prévisions économiques de cet automne. Par conséquent, les estimations ont été revues à la hausse par rapport aux prévisions de ce printemps, lorsque l’exécutif estimait que l’économie roumaine allait enregistrer une avancée de 4,2% en 2016 et de 3,7% en 2017.
« La croissance réelle du PIB est actuellement une des plus importantes de l’UE et elle devrait rester robuste pendant les années à suivre, puisqu’elle s’appuie sur l’allègement fiscal et des majorations salariales. L’inflation devrait augmenter sur la toile de fond de la disparition des effets des précédentes réductions de taxes. Le déficit gouvernemental devrait augmenter considérablement en raison de la réduction des taxes et de la majoration des salaires dans le secteur public », lit-on dans le rapport de la Commission européenne.
Conformément aux nouvelles estimations, le déficit public devrait augmenter en 2016 à 2,8% du PIB, alors qu’en 2015 il a été de 0,8%. Cette détérioration du déficit public se poursuivra en 2017 aussi jusqu’à 3,2% du PIB pour rester au même niveau en 2018 aussi, si les politiques actuelles demeurent inchangées. « Cette prévision ne tient pas compte des nouvelles initiatives législatives, examinées à présent par le Parlement. Elles incluent une majoration significative des pensions de retraite, une réduction de 5% des charges sociales et l’élimination d’une centaine de taxes et d’impôts. Les initiatives en question constituent le principal risque qui pourrait réviser à la baisse les prévisions fiscales », avertit la Commission européenne.
L’analyste Constantin Rudnitchi : « Les prévisions sont correctes, évidemment nous ne pouvons pas les contredire, nous n’en avons pas les moyens. Nous pouvons uniquement nous adapter à la réalité et nous voyons déjà qu’en Roumanie par exemple, les chiffres de la croissance économique du troisième trimestre indiquent un ralentissement de cette dernière, une baisse en dessous de ce seuil des 5%, donc reste à voir si la croissance économique se chiffrera vraiment à 5,2% à la fin de cette année. Actuellement, les prévisions indiquent que cette croissance devrait être inférieure à 5%. Il n’y a pas d’autres nouveautés pour ce qui est de la Roumanie. Pourtant il faut répéter toutes ces choses pour qu’elles soient archi-connues non seulement par le grand public, mais aussi par les décideurs politiques ou par l’administration. Nous comptons parmi les quelques pays d’Europe à avoir enregistré une croissance du déficit budgétaire, pour des raisons bien connues : allègement fiscal, stimulants salariaux, soit autant de facteurs à avoir accru la consommation et la croissance économique dont nous parlons. »
La consommation n’est pas la seule à contribuer à la croissance économique de la Roumanie, les investissements s’y ajoutent depuis quelque temps. Constantin Rudniţchi explique : « Les statistiques nous apportent une bonne nouvelle : cette croissance économique repose davantage sur les investissements, ce qui est une bonne chose. Un autre équilibre va peut-être s’établir entre les investissements et la consommation. Pour le reste, le principal signal d’alarme est le fait qu’en 2017 et 2018, si l’on ne manifeste pas de prudence, c’est-à-dire si les responsables gouvernementaux ne font pas attention au budget de l’Etat, le déficit budgétaire risque de dépasser les 3% du PIB exigés par le Traité de Masstricht. Et ce n’est pas du tout un signal positif, à un moment où partout en Europe on parle de la consolidation budgétaire et de la réduction du déficit budgétaire. Or, en Roumanie, la tendance est contraire, ce qui n’est pas du tout ce qu’il faut — non seulement en raison de nos engagements européens, qui nous obligent à respecter ce seuil, mais aussi du signal transmis aux investisseurs, qui comprendront que l’économie roumaine peut dévier de sa trajectoire d’équilibre. A court terme la situation peut paraître positive, on a une croissance économique et la consommation augmente ; pourtant, sur le moyen et le long terme, on peut craindre un déraillement de l’économie roumaine, ce qui ne serait pas du tout réjouissant. On devrait plutôt privilégier une tendance conservatrice, maintenir les équilibres macro-économiques pour que les effets de cette croissance économique puissent se faire sentir au niveau des investissements et dans la vie quotidienne, que les salariés et même les retraités puissent en bénéficier. »
Quant à l’inflation, selon les estimations de la Commission européenne, elle atteindra moins 1% en 2016 contre 0,4% prévu au printemps dernier. En échange, pour 2017, la Commission européenne a revu à la hausse le taux d’inflation, le fixant à 1,8% contre moins 0,6% prévu au printemps. L’exécutif communautaire estime que les pressions inflationnistes s’accumulent suite à une demande intérieure importante, aux majorations salariales et à la disparition des effets des précédentes réductions de taxes. Par conséquent, en 2018, l’inflation moyenne annuelle pourrait progresser en Roumanie à 2,9%, contre 2,5% prévus au printemps.
Le FMI prévoit, lui, pour la Roumanie, une croissance économique de 5% cette année, qui devrait baisser à 3,8% en 2017. En revanche, la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement prévoit une croissance de 4,8% cette année et de 3,7% en 2017. (trad. : Alex Diaconescu, Dominique)