Les relations de la Roumanie avec le FMI
La mission des bailleurs de fonds internationaux a quitté Bucarest sans lhabituelle lettre dintention...
Florin Orban, 24.02.2015, 13:50
La mission en Roumanie du FMI, de la Commission européenne et de la Banque Mondiale s’est achevée il y a deux semaines ; pourtant, les commentaires à ce propos n’ont pas tari. Tout d’abord, la mission a quitté Bucarest sans l’habituelle lettre d’intention et les pourparlers avec les autorités roumaines reprendront en avril prochain. Deux ont été les points restés en suspens: la restructuration massive des compagnies de production d’électricité à base de charbon Hunedoara et Oltenia et la majoration du tarif du gaz destiné à la consommation domestique demandée par les experts internationaux.
Le premier ministre Victor Ponta explique: « La délégation de la Commission européenne et du FMI exigeait une majoration plutôt brutale du prix, qui aurait dû progresser, à partir du 1er avril, de 53,3 lei à 62 lei le Mégawatt. Or, cette augmentation, nous la jugeons non soutenable. Le deuxième point sur lequel nous n’avons pas abouti à un accord concerne la Compagnie Nationale Hunedoara et la Compagnie Oltenia. La délégation de la Commission européenne et du FMI avaient demandé des restructurations massives et radicales, qui, de notre point de vue, ne sauvent ni l’industrie productrice d’électricité à base de charbon, ni les emplois, les plongeant dans un cercle qui fera régresser ce secteur dans quelques années. »
Après le départ de la délégation des institutions financières internationales, le président de la Commission budget-finances de la Chambre des Députés, le social-démocrate Viorel Ştefan, a déclaré que des négociations étaient prévues prochainement entre les experts roumains et internationaux pour harmoniser les positions divergentes entre les deux parties : « L’accord en soi reste en vigueur. Le fait qu’une lettre d’intention n’a pas été signée entraîne sa suspension temporaire, jusqu’à ce que les experts du gouvernement de Bucarest et les experts internationaux se mettent d’accord sur les points en divergence. »
Dans le camp de l’opposition, le député libéral Gheorghe Ialomiţianu, ancien ministre des Finances, estime que les négociations avec le FMI sont un échec du cabinet Ponta: « Le FMI affirme que le gouvernement en place n’a rien fait pour respecter ses engagements, alors que le gouvernement présente la situation en teintes de rose. Nous nous trouvons dans une situation délicate, dans une impasse, et pour la Roumanie c’est une mauvaise chose, car le message transmis aux créanciers des marchés financiers extérieurs n’est pas favorable. Cette incertitude nuit au milieu des affaires — et non seulement. »
L’accord de 2 milliards d’euros signé entre la Roumanie et le FMI est de type préventif et il arrive à terme cet automne. Mentionnons que notre pays n’a rien utilisé des fonds mis à sa disposition par cet accord. Bien qu’aucune lettre d’intention n’ait été signée, la délégation du FMI, de la Commission européenne et de la Banque Mondiale a publié un communiqué où elle estime que la Roumanie a résolu une grande partie des problèmes engendrés par la crise économique. Pourtant, l’état précaire de l’infrastructure publique est une entrave sérieuse au développement de la Roumanie — indique le document. En outre, malgré les bonnes évolutions macro-économiques, ces derniers temps la Roumanie n’a pas réussi à récupérer les décalages qui la séparent des Etats industrialisés et demeure vulnérable aux chocs extérieurs.
Selon le président du Conseil fiscal, Ionuţ Dumitru, l’avis exprimé par les experts internationaux met en évidence ce que la Roumanie devrait faire pour s’assurer une croissance économique encore plus solide: « En ce qui concerne la croissance économique, les experts internationaux soulignent le fait que l’économie est sortie de la récession, elle a récupéré le recul entraîné par la crise et connaît une accélération. Pourtant, celle-ci n’est pas assez importante pour nous permettre une convergence plus rapide. Le document émis par la délégation financière mentionne également les moyens par lesquels il est possible d’accélérer cette croissance économique. Il s’agit de donner la priorité aux investissements dans l’infrastructure et d’accroître le taux d’absorption des fonds européens. Dans le domaine de la politique fiscale, si nous souhaitons réduire les taxes sans en majorer d’autres, nous sommes obligés de faire des progrès significatifs dans la collecte des taxes et de mieux dépenser l’argent.»
L’analyste économique Aurelian Dochia s’interroge, lui, sur la nécessité de la signature, cet automne, d’un nouvel accord avec le FMI: « Une fois l’accord actuel arrivé à échéance, la Roumanie pourra peser le pour et le contre, évidemment, si les choses vont tout aussi bien sur les plans intérieur et extérieur. En l’absence d’un accord avec le FMI, reste à voir quelles politiques économiques adopteront les prochains gouvernements, soit sans les contraintes habituellement imposées par l’institution financière internationale. A jeter un coup d’œil sur les 20 dernières années, je dirais que certains risques existent, de ce point de vue, mais je crois que nous devons passer outre et arriver à nous débrouiller par nos propres moyens. »
Le FMI prévoit pour la Roumanie une croissance du PIB de 2,7% en 2015 et de 2,9%, en 2016 . Cette croissance reposera sur la consolidation de la consommation des ménages, sur la toile de fond d’une augmentation du salaire réel, de la baisse du prix du pétrole et de certains taux d’intérêt qui ont atteint des niveaux minimum record. (trad. : Dominique)