Le Conseil de la concurrence et l’économie de la Roumanie
Il y a quelques jours, le Conseil de la concurrence de Roumanie a appliqué près de 35 millions d'euros de sanctions financières à quatre chaînes de la grande distribution et à une vingtaine de leurs fournisseurs.
Florin Orban, 27.01.2015, 14:30
Entre 2005 et 2009, les enseignes Metro, Real et Selgros, du groupe allemand REWE, ainsi que Mega Image, du Belge Delhaize, sétaient entendus sur les prix de vente et sur leur comportement lié aux promotions, ce qui a eu pour résultat des prix plus élevés à payer par les consommateurs.
Pour la première fois en Roumanie, le Conseil de la concurrence a obtenu la modification de la législation nationale en la matière, précise le président de linstitution, Bogdan Chiriţoiu, au micro de Radio Roumanie: « Lenquête a été laborieuse. Il y a eu plusieurs premières procédurales, ce qui a ralenti un peu le rythme, en plus des efforts de certains avocats de tergiverser. Nous avons eu besoin y compris dune modification de la législation pour pouvoir bloquer les efforts des avocats de freiner lenquête. Cest une amende substantielle dans un secteur aux chiffres daffaires très élevés, mais aux marges commerciales plutôt faibles. En cas de récidive, ils risquent de nouvelles sanctions, mais, daprès nos informations, ils avaient mis fin à ces actions dès louverture de notre enquête. »
« Le Conseil de la concurrence a constaté que les prix en rayon nétaient pas le résultat de lapplication des règles du marché et du rapport entre loffre et la demande; le fournisseur et le détaillant établissaient ensemble un prix fixe ou minimum. Cette pratique a pour résultat des prix plus élevés pour le consommateur final, puisque le détaillant ne peut pas ramener le prix en dessous du seuil établi avec le fournisseur», explique un communiqué de lAutorité pour la concurrence. Quant au comportement des compagnies en matière de promotions, les contrats signés par certains détaillants et fournisseurs contenaient une clause qui interdisait aux fournisseurs davoir simultanément des promotions dans des enseignes différentes de la grande distribution. De ce fait, le consommateur navait pas accès à des promotions simultanées et implicitement au prix le plus bas dans des magasins concurrents. « La décision de réaliser ou non des promotions dans des chaînes concurrentes doit appartenir au fournisseur », précise encore le communiqué du Conseil de la concurrence.
L’enseigne Selgros Cash&Carry rejette les accusations du Conseil de la concurrence, qui lui a collé une amende de 6,6 millions d’euros, et attend de recevoir la motivation de cette sanction avant de porter plainte en justice, une position partagée par le producteur de boissons rafraîchissantes Tymbark.
D’ailleurs, à la fin de l’année dernière, le Conseil de la concurrence a commencé à enquêter une éventuelle violation des normes nationales et communautaires par d’autres chaînes de la grande distribution : Auchan România SA, Carrefour România SA, România Hypermarché SA, gérant des grandes surfaces Cora, Kaufland România et leurs fournisseurs. Egalement fin 2014, le gouvernement a approuvé un Mémorandum sur la création d’un système de suivi des prix des biens de consommation appelé « Monitorul preţurilor bunurilor de consum ». Ce projet, mis en œuvre par l’Association pour la protection des consommateurs de Roumanie, appuyée par l’Autorité nationale pour la protection des consommateurs et le Conseil de la concurrence, implique la création d’une plate-forme en ligne où l’on retrouve les prix des produits contenus par le panier quotidien de la population.
Les objectifs en sont : une meilleure information des consommateurs qui pourront ainsi comparer les prix et identifier les magasins les moins chers ; et aussi une diminution des prix comme effet de la concurrence croissante entre les enseignes. Ces actions suivent la tendance européenne d’accorder plus d’attention au secteur de vente des produits alimentaires par l’intermédiaire des chaînes de détail, fait savoir le Conseil de la concurrence de Roumanie. Dans le même temps, la loi de la concurrence sera modifiée de manière à encourager les particuliers à collaborer avec les autorités, dans le cadre des enquêtes sur le respect du principe de la concurrence par les différentes compagnies.
Dans le même sens, les autorités seront plus clémentes avec une compagnie soupçonnée d’infraction à la législation en vigueur mais qui coopère avec les enquêteurs. Bogdan Chiriţoiu, président du Conseil de la concurrence: « En Roumanie, comme dans tout autre Etat membre de l’UE, il existe une règle qui fait qu’une compagnie reçoive l’immunité si elle fournit à l’autorité de la concurrence des preuves de l’infraction à la loi commise par ladite compagnie de concert avec d’autres firmes. Il n’y aura pas d’amende, pas de sanction pour cette compagnie ; en revanche, les autres seront sanctionnées conformément à la loi. Nous essayons d’élargir cette approche aussi aux particuliers, en trouvant une modalité par laquelle ils puissent fournir aux autorités des preuves concernant la violation de la loi. »
En plus du commerce aux produits alimentaires, le Conseil de la concurrence a examiné de près en 2014 aussi les appels d’offres truqués, le marché des médias, ainsi que le secteur de l’énergie.