Jacques Augustin (France) – Une femme peut-elle choisir librement son mari?
Comment se célèbre le mariage en Roumanie ?
România Internațional, 04.06.2021, 17:24
Oui, Jacques, une femme est tout à fait libre de choisir son mari. Le mariage est le deuxième grand événement dans la vie d’une personne, après la naissance. Dans la vision traditionnelle roumaine, le mariage ou les noces s’entendent comme un passage à une autre étape de la vie, qui marque l’accès des époux dans la vie sociale, leur intégration à la communauté. Le mariage est précédé ou non par des fiançailles. La tradition veut que le futur marié aille avec ses parents chez la future mariée pour demander sa main aux futurs beaux-parents. Une fête peut être organisée pour les fiançailles ou pas. Aujourd’hui, chacun fait comme il l’entend.
Une obligation particulièrement importante, c’est de choisir les témoins de mariage, qui sont considérés les guides spirituels des futurs époux dans le mariage. Selon la tradition, les témoins ont un rôle essentiel d’abord dans le mariage civil, qui ne peut pas avoir lieu à défaut, ensuite dans le mariage religieux, s’il est organisé, à la noce, et dans toute la vie des futurs époux. Il convient de tenir compte d’une série de critères dans le choix des témoins, mais aussi des devoirs financiers qui leur incombent, et qui ne sont pas des moindres.
Pour pouvoir célébrer le mariage civil, les futurs époux doivent satisfaire à certaines conditions, par exemple que l’homme ait au moins 18 ans, et la femme au moins 16, qu’ils ne soient pas déjà mariés — eh oui ! La femme peut seulement se marier à 16 ans « pour des motifs justifiés ». La bigamie et la polygamie sont des infractions conformément au Code pénal roumain. A noter également qu’en Roumanie, les mariages entre des personnes du même sexe sont interdits. En vue de passer devant l’officier d’état civil, les futurs mariés sont tenus de soumettre des certificats médicaux sur leur état de santé et de faire personnellement une déclaration de mariage à la mairie, qui est affichée et devient publique. Ils obtiennent alors une date et une heure pour la célébration du mariage civil. Deux témoins doivent nécessairement être présents. A Bucarest, la cérémonie dure très peu, peut-être 2-3 minutes, et vu la pandémie, seules 8 personnes ont le droit d’accéder à la salle où le mariage est célébré : les mariés, leurs parents et les témoins. L’officier d’état civil demande à chaque futur marié s’il souhaite prendre pour époux/épouse l’autre ; une fois qu’ils ont dit oui, ils sont déclarés mariés, signent dans le registre et obtiennent l’acte de mariage. Ce document crée des obligations légales entre les mariés. Le capitaine d’un bateau ou d’un avion a aussi le droit d’unir deux personnes. Le texte de la célébration du mariage est fixé par le Code de la famille. Toutefois, si l’officier d’état civil connaît le couple, il peut aussi tenir un discours, par exemple.
En sortant de la salle où le mariage civil est célébré, la coutume veut que les invités apportent des fleurs et qu’ils fassent une voûte avec ces fleurs, sous laquelle passent les mariés. Les invités chantent « La mulţi ani » – c’est un souhait que l’on fait à beaucoup d’occasions en Roumanie — aux anniversaires, à la Nouvelle Année et après, quand on se voit, aux mariages… Au moment où les mariés passent sous la voûte de fleurs, il est coutume que les invités jettent des poignées de riz ou de blé pour la fertilité du couple. Cela vaut aussi pour le moment où les mariés sortent de l’église après la célébration du mariage religieux. Selon les régions, les familles des mariés offrent aux invités de petits gâteaux secs sucrés et salés et du champagne/vin mousseux. Toutefois, avec la pandémie, l’alcool n’est plus autorisé dans ces enceintes. Au regard de la loi, c’est le mariage civil qui est reconnu par l’Etat.
La nouvelle famille peut choisir de célébrer un mariage religieux aussi ou pas. Il faut avoir l’acte de mariage civil en vue du mariage religieux. Ce dernier s’accompagne de différents rituels et d’éléments festifs, selon les régions, selon la culture et la position des époux dans la société. Dans les villages, il y a toute sorte d’us, coutumes et superstitions à observer à cet effet, notamment pour la chance, la bonne entente, la prospérité, la réussite et le bien-être des époux dans leur mariage. En Roumanie, les noces sont célébrées avec beaucoup de faste et de joie. Certaines des traditions à respecter sont très anciennes, certaines visent à amuser les mariés, mais aussi les convives. Je vous parlais des témoins ; ils devront payer le voile de la mariée, les cierges et le prêtre qui va célébrer le mariage. Et ce sont encore les témoins qui offriront le plus grand cadeau de noces.
Si les futurs époux choisissent de respecter les traditions, il y en a dès l’habillement des mariés dans les vêtements de cérémonie jusqu’à la fin de la noce, et d’autres à observer toute la vie. La témoin de mariage fixe le voile à la mariée. La mariée porte une robe blanche si c’est le premier mariage et un bouquet qui normalement est offert par le marié. La témoin de mariage est censée offrir un gâteau de la mariée (turta miresei) à ceux qui sont présents. A l’église, la célébration du mariage dure 3 heures en Transylvanie, alors qu’à Bucarest, j’ai même assisté à un mariage en 20 minutes ! C’est dire que ça m’a marquée, j’ai même été choquée ! Le prêtre unit les jeunes et leur accorde la bénédiction du Seigneur. Le service religieux commence par la messe de fiançailles. Les époux vont porter des couronnes à un moment donné — symboles de la dignité et de l’honneur. Les témoins allument des cierges spéciaux et ornés pour l’occasion. Chaque moment a une signification. Bien sûr, à un moment donné, les alliances sont passées aux doigts des époux. Le prêtre fait déguster du vin aux mariés de la même coupe, ce qui symbolise la douceur de l’amour et de la joie qu’ils vont partager.
Après le mariage à l’église, on va au restaurant. Les noces durent d’habitude jusqu’au matin, avec des moments et des superstitions à observer — ou pas. A l’entrée, on offre le champagne. Le menu, très riche, est choisi d’avance par les mariés. Ces derniers doivent danser une danse, ils doivent l’avoir exercée à l’avance aussi. Au moment de servir le gâteau des mariés, la mariée lance son bouquet en direction des jeunes filles célibataires, en se tenant le dos vers ces dernières, et on dit que celle qui l’attrape sera la prochaine mariée. A minuit, la mariée change de tenue. Aussi, la témoin enlève le voile et lui met un fichu — elle est désormais mariée. A certains endroits, des noceurs volent la mariée et alors le témoin et le marié doivent faire ce qu’on leur demande — parfois des choses drôles – ou leur donner de l’argent pour qu’ils la rendent.
En fonction du degré de parenté et d’amitié avec les mariés, de l’endroit choisi pour la célébration (soit le coût du menu et de la musique), mais aussi des revenus de l’invité en question, les invités offrent aux mariés, au moment de se retirer de la fête, une enveloppe contenant une somme d’argent conséquente. Il y a même un site pour ne pas se tromper ! Par exemple, pour un mariage célébré à la campagne, nettement moins cher qu’en ville, si c’est votre meilleur ami, un couple offrira 300 euros. Les témoins de mariage – au moins 600 euros à Bucarest, et du reste, on a entendu tous les chiffres, pas de limite supérieure.
Voilà, je vous ai parlé, en grand, du mariage civil et aussi du mariage orthodoxe en Roumanie. Je vous disais qu’une femme choisit librement son mari, sauf peut-être dans le cas des mariages forcés qui sont pratiqués par certains Roms, qui ont l’habitude de marier leurs enfants en bas âge, sous couvert de faire une fête. C’est interdit, bien sûr. Je ne m’attarderai pas plus, car les pratiques sont très différentes d’une région à l’autre, et chaque couple choisit celles qu’il entend respecter, mais je pense vous avoir quand même donné une bonne idée de la manière dont le mariage se célèbre en Roumanie.