Les espaces verts de Bucarest
Victoria Carasava parle du projet chez Art Fusion, une ONG qui a lancé une pétition pour l'adoption urgente d'un Registre des espaces verts.
Christine Leșcu, 17.01.2024, 18:38
Bucarest, qui
connait de gros problème de pollution est également une ville qui ne dispose
pas de suffisamment d’espaces verts. Cette situation reflète l’état actuel de
la législation dans ce domaine. En effet, il n’existe toujours pas à ce jour de
registre fonctionnel des espaces verts. Un document de ce type a bien été
élaboré en 2011 mais le conseil général ne l’a pas voté en raison des multiples
problèmes de méthodologies qu’il présentait mais surtout par ce qu’il n’engendrait
aucune protection des espaces verts. Il s’agissait d’un document consultatif,
sans valeur juridique, comme l’explique Victoria Carasava, coordinatrice de
projet chez Art Fusion, une ONG qui a lancé une pétition pour l’adoption
urgente d’un Registre des espaces verts.
En octobre, nous avons
démarré une campagne pour que ce registre soit mis en place de toute urgence, comme
prévu par la loi, afin qu’il puisse être voté par le Conseil général de
Bucarest et avoir une valeur administrative. Depuis le mois d’octobre, plus de
5000 habitants de Bucarest ont signé la pétition. Nous espérons que toujours
plus de personnes vont la signer afin que la mairie comprenne qu’il s’agit d’un
problème réel. En parallèle, nous avons aussi rédigé une lettre ouverte à l’adresse
de la mairie de Bucarest, 29 organisations issues de la société civile et groupes
d’initiative civique l’ont déjà signée. Par ces deux démarches, la lettre
ouverte et la pétition, toutes deux déposées sur le bureau du maire en
décembre, nous espérons obtenir enfin une réponse de la part de la mairie quant
à l’état d’avancement de ce projet, afin d’avoir de la visibilité sur la
manière dont les services municipaux travaillent pour établir ce registre.
Quels sont les
problèmes du registre actuel et qu’espère la société civile du nouveau registre
? Victoria Carasava.
Le registre actuel ne rend
compte ni de la quantité ni de la qualité réelle des espaces verts de Bucarest.
Il y a dans ce registre des arbres recensés à des endroits où ils n’ont jamais existé.
Certains espaces y ont été comptabilisés qui n’auraient jamais dû l’être. Il
présente un autre problème grave. Au moment de sa création, ce registre n’a pas
été prévu pour être actualisé. Or la loi sur les espaces verts nous dit que ce
registre doit être un instrument dynamique, qui inventorie l’ensemble du
patrimoine vert d’une ville et qui doit refléter absolument tous les
changements qualitatifs ou quantitatifs dont il fait l’objet.
Malheureusement,
l’élaboration d’un nouveau registre devrait prendre du temps. En effet, il dépend
de la loi sur les espaces verts et du code de l’urbanisme, qui sont tous deux actuellement
en débat au parlement afin d’être amendés. Certains des amendements débattus
concernent le statut juridique de certains espaces verts privés qui pourrait
être modifié afin de rendre les terrains en question constructibles. Une
réduction des espaces verts dans un contexte où ils sont déjà en nombre
insuffisant, déplorent de nombreuses organisations écologiques ainsi que le
maire de Bucarest. Ainsi la mairie de la capitale est-elle elle aussi dans l’expectative.
Victoria Carasava.
Prochainement, parce qu’au
Parlement sont discutés depuis quelques mois les changements à apporter à la Loi
sur les espaces verts mais aussi au Code de l’urbanisme, il est fort possible
que la réglementation change et que ce soit plus compliqué de discuter sur ce
que doit contenir ce registre. Et d’après ce que j’ai compris, ceci pourrait
constituer une des raisons pour laquelle la mairie ne démarre pas le processus
d’acquisition des services nécessaires à la réalisation du registre. En effet,
la mairie n’a pas la capacité d’agir seule. Cet instrument demande beaucoup de travail, la collecte de très
nombreuses informations de terrain, l’ensemble du processus devrait prendre au
moins un an, parce que par exemple absolument tous les arbres doivent être
comptabilisés. Les données doivent être recolletées en deux fois, quand les
arbres ont leurs feuilles et quand ils sont nus. Il s’agit donc d’un travail de
longue haleine, raison pour laquelle la mairie veut faire appel à des sous-traitants.
Et nous nous espérons réussir à créer une relation un peu plus transparente et
basée sur la collaboration afin d’explorer ensemble, de procéder par étapes
pour réaliser ce registre des espaces verts.
Ce processus
devrait commencer de toute urgence si on considère l’impact vital des espaces
verts sur la santé de la population. Les habitants de Bucarest ne bénéficient
en moyenne que de 7 mètres carrés de végétation par habitant, même si ce
chiffre reste discutable, selon Victoria Carasava.
Ces 7 m2 correspondent à l’estimation
de la Commission européenne. Elle a été établie il y a quelques années
maintenant. Elle ne représente probablement plus la réalité. Il est même
possible que ce chiffre ait baissé alors que la recommandation de l’OMS est de
50 m2 d’espace vert par habitant. Donc on ne peut pas connaître la situation
précise et c’est grave. Mais nous ne demandons pas uniquement la mise en
place de ce registre, nous voulons aussi que soit défini un plan d’action clair
visant à étendre le réseau d’espaces verts de la ville, un aspect contenu dans
la Loi sur les espaces verts qui prévoit que le registre ou l’audit des espaces
verts soit accompagné d’un plan d’extension des réseaux d’espaces verts dans
les villes roumaines. Un registre des espaces verts nous aiderait en fait à
identifier des terrains en friche qui appartiennent soit à l’Etat, soit à des institutions
étatiques soit à des privés, et qui devraient à l’avenir être transformés en
parcs.