La cité de Brăila
Sise dans le sud-est de la Roumanie, sur la rive gauche du Danube, la ville de Brăila a été depuis les temps les plus reculés un important port dans cette zone de l’Europe. La localité est sur le territoire historique de la Valachie et a été disputée, au cours de l’histoire, par les Roumains, les Ottomans et les Russes. Une preuve de l’importance stratégique de Brăila, au moins pour les deux empires, c’est aussi le fait que les Ottomans ont commencé à construire là une citadelle en 1540.
Christine Leșcu, 27.12.2015, 15:37
Sise dans le sud-est de la Roumanie, sur la rive gauche du Danube, la ville de Brăila a été depuis les temps les plus reculés un important port dans cette zone de l’Europe. La localité est sur le territoire historique de la Valachie et a été disputée, au cours de l’histoire, par les Roumains, les Ottomans et les Russes. Une preuve de l’importance stratégique de Brăila, au moins pour les deux empires, c’est aussi le fait que les Ottomans ont commencé à construire là une citadelle en 1540.
L’historien Ionel Cândea, directeur du Musée « Carol Ier » de Brăila et auteur de l’album monographique intitulé « la Cité de Brăila. Historique. Reconstitution. Valorisation », connaît bien l’histoire de la citadelle: « Elle a été élevée après novembre ou décembre 1540. Un rapport polonais d’octobre 1540 fait état du commencement des travaux à la cité de Brăila, et dans un autre document, conçu six années plus tard — en fait une lettre – le sultan Soliman le Magnifique ordonne au prince de la Valachie, Mircea Ciobanul, de transporter à la cité les grumes et les hommes nécessaires pour parachever la construction de la cité. Elle est donc élevée par les Ottomans qui ont utilisé la main d’œuvre autochtone pour la bâtir. Elle a été démolie suite à un ordre impérial russe, l’ordre du tsar de Russie donné en 1829-1830. 3000 hommes à tout faire ont été amenés pour la démolir. Ils sont venus des comtés de Gorj, Dolj, Dâmboviţa et d’autres. »
Jusqu’à sa démolition, dans les années 1830-1831, la cité a subi de nombreux sièges et a changé plusieurs fois d’aspect. Au XVIe s, elle a subi trois attaques : celle du voïvode Jean le Cruel (de 1574) et celles de 1594 et 1595 lorsque Michel le Brave réussit à la libérer pour peu de temps. Mais les Turcs reviennent dans la cité et reconstruisent ses murailles détruites. Puis, en 1659, Mihnea III l’a attaquée de nouveau, au moment de sa révolte contre les Turcs. Au XVIIIe, la cité a été consolidée : elle s’est vu ajouter un fossé et une palissade qui entourait l’agglomération civile.
Les confrontations les plus dures pour s’emparer de la cité de Brăila ont été menées entre les empires russe et ottoman. Ionel Cândea : « Au XVIIIe s, Brăila a connu de nombreux sièges, l’un d’entre eux ayant lieu en 1711. C’est alors que les armées réunies d’un général russe envoyé par Pierre le Grand avec celle du traître Thomas Cantacuzène — boyard roumain, commandant de l’armée valaque qui est passé du côté des Russes dans le conflit de 1711 — ont marché sur Brăila, en passant par Măxineni. Il y avait là-bas un monastère similaire à une cité, construit par Matei Basarab. Ce monastère-là a abrité pour une nuit l’armée de 55.000 soldats qui se sont ensuite rués sur Brăila. Au moment où le commandant de la cité remettait les clefs au général russe vainqueur, ce dernier recevait la lettre de Pierre le Grand qui lui disait de quitter les lieux, car les Ottomans avaient vaincu les Russes à Stănileşti, et ces derniers devaient se retirer vite. »
Même si aujourd’hui la cité de Brăila n’existe plus, récemment, des vestiges importants ont été découverts — la nouvelle poudrière et les souterrains militaires — vestiges ayant à leur tour une histoire. Ionel Cândea explique : « En mars 1810, les Russes étaient déjà maîtres de la cité suite à une guerre de 1806, et un des officiers russes a enfreint le règlement et il est entré avec les éperons dans la poudrière. Bien entendu, la cité a été secouée par une explosion extraordinaire qui a fait plus de 300 morts et qui a pu être entendue jusqu’à proximité de Iaşi. Puis, lorsque les Turcs sont de nouveau entrés dans la cité, en 1812, une nouvelle poudrière s’est avérée nécessaire. La chance a fait que cette nouvelle poudrière soit conservée ; nous souhaitons proposer aux pouvoirs publics que ces vestiges ou restes de la cité soient mis en valeur. »
En décembre 2014, un chemin d’accès spectaculaire des barils de poudre vers l’intérieur et l’extérieur de la cité a été découvert, à proximité de l’un des derniers bastions. Ce chemin passait sous les tombes de l’archevêché de Brăila. Plusieurs couloirs souterrains attenants à la cité ont également été découverts, sous le jardin public. A l’occasion, constat a été fait que le réseau de galeries souterraines de la ville s’étendait sur plusieurs dizaines de km, qu’il était particulièrement ramifié, pourvu de bouches d’aération et réalisé en briques de bonne qualité. (trad.: Ligia Mihăiescu)