Les chars de combat de l’armée roumaine d’hier et d’aujourd’hui
Le monde sortait épuisé de la première guerre mondiale, après un conflit de 4 ans qui avait sérieusement bouleversé ses convictions et aspirations. L’expérience de la première ligne et les pertes subies ont marqué le destin de toute une génération. Ce fut dans les plaines de la mort de Flandres qu’est apparu un nouveau véhicule de combat qui allait devenir une composante obligatoire de toute armée de terre : le char de combat. Les armées française, anglaise et allemande ont été les premières à utiliser les chars sur le théâtre d’opérations. Elles furent suivies par l’armée américaine qui utilisa pour la première fois des chars de fabrication française en 1917. Les premiers chars de combat apparaissent dans l’inventaire de l’armée roumaine dans les années 1930. Jusque là, l’armement lourd était formé presque exclusivement de canons, dont la plupart étaient fabriqués en Tchécoslovaquie. C’est d’ailleurs de ce pays qu’ont été importés en Roumanie les premiers chars de combat.
Steliu Lambru, 11.06.2015, 16:46
Le monde sortait épuisé de la première guerre mondiale, après un conflit de 4 ans qui avait sérieusement bouleversé ses convictions et aspirations. L’expérience de la première ligne et les pertes subies ont marqué le destin de toute une génération. Ce fut dans les plaines de la mort de Flandres qu’est apparu un nouveau véhicule de combat qui allait devenir une composante obligatoire de toute armée de terre : le char de combat. Les armées française, anglaise et allemande ont été les premières à utiliser les chars sur le théâtre d’opérations. Elles furent suivies par l’armée américaine qui utilisa pour la première fois des chars de fabrication française en 1917. Les premiers chars de combat apparaissent dans l’inventaire de l’armée roumaine dans les années 1930. Jusque là, l’armement lourd était formé presque exclusivement de canons, dont la plupart étaient fabriqués en Tchécoslovaquie. C’est d’ailleurs de ce pays qu’ont été importés en Roumanie les premiers chars de combat.
En 1937 l’armée roumaine se dotait de 35 chars du type AH – IV, de 3 tonnes et demi chacun. En fait ce véhicule n’était qu’une chenillette dotée d’une mitrailleuse lourde du type ZB. Ce fut également en 1937 que la Roumanie a commandé 126 chars fabriqués par la société tchécoslovaque Skoda, des chars S 2a plus puissants de 10,5 tonnes. Ces véhicules étaient armés de canons de 37 mm et de mitrailleuses de calibre 7,62 mm.
L’Etat roumain a également tenté de négocier avec l’entreprise française Renault l’ouverture d’une ligne d’assemblage en Roumanie de ses célèbres chars de combat. Malgré l’échec des discussions, la Roumanie a acheté 200 chars Renault R 35 qui sont entrés en service de l’armée roumaine en 1939. Au début de la Seconde guerre mondiale la Roumanie possédait aussi des chars Renault FT-17 de l’année 1919, que l’armée utilisait encore pour des missions d’instruction, sécurité et patrouille. C’est avec ce genre de véhicules que la Roumanie est entrée dans la première guerre mondiale. Durant le conflit, des blindés de fabrication allemande allaient s’ajouter à l’arsenal de l’armée roumaine.
Le pays fut occupé par l’armée soviétique en 1945 et la Roumanie a intégré le système militaire du Pacte de Varsovie, l’alliance des Etats communistes sous la tutelle de l’Union Soviétique. Dans le cadre du Pacte, l’armement de fabrication soviétique était dominant. Le mythique char T 34, la vedette incontestable de la Seconde guerre mondiale, allait faire partie de toutes les armées communistes, y compris de l’armée roumaine. Les premiers chars de conception et de fabrication roumaine n’allaient intégrer l’armée roumaine qu’au milieu des années 1970.
Le premier projet d’un char de combat roumain a commencé en 1972 dans le cadre d’un projet stratégique de la doctrine de défense nationale. Une des raisons pour laquelle la direction politique de la Roumanie a accéléré l’industrialisation a été la production d’équipement militaire, y compris de véhicules blindés. Le premier char roumain était un véhicule de dimensions moyennes, propulsé par un moteur de 500 CV. Son nom de code était TR, une abréviation de « Tanc românesc »/« Char roumain ».
L’usine de chars fut ouverte en 1977, à Mârşa, dans le comté de Sibiu dans le centre de la Roumanie. Ensuite toute la production et les spécialistes furent déplacés à l’entreprise « 23 Août » de Bucarest. En 1976 voyait le jour le premier modèle expérimental TR 77, qui n’a pas été produit en série. Après plusieurs tests, en 1979, le char TR 77 – 580, la version autochtone du char soviétique T 55, sortait des portes des usines d’armement roumaines. Celles-ci pouvaient produire jusqu’à 210 unités par an. A compter de 1983, les autorités ont décidé d’accroître la production jusqu’à 500 chars par année. 406 chars TR-77-580 ont été produits avant le lancement d’un nouveau modèle, en 1983. Avec un poids de 42 tonnes et un moteur de 580 CV, le TR-77-580, premier char de conception et de fabrication roumaine, pouvait rouler à une vitesse de 50 km/h pour une autonomie de 380 kilomètres. Le véhicule était doté d’un système de contrôle de tir électrique et hydraulique et d’un blindage qui allait jusqu’à 200 mm. Le char était pourvu d’un canon du calibre 100 mm avec une cadence du tir de 6 coups par minute et de deux mitrailleuses. Son équipage était formé de 4 personnes.
Un autre modèle de char moyen roumain, avec des performances supérieures fut lancé en 1982, c’était le TR 85 – 800. Parmi les améliorations au modèle précédent mentionnons le moteur qui développait 800 CV. La production était d’une centaine de machines par an. Enfin, le char le plus performant de conception roumaine, le TR 125, sortait en 1987. Pesant une cinquantaine de tonnes, muni d’équipements électroniques et d’un moteur plus puissant, de 900 CV, le char était manié par un équipage de 3 personnes. C’était en fait une copie du célèbre char de combat soviétique T 72, dont une trentaine d’unités avaient intégré l’armée roumaine à la fin des années ’70 et le début des années ’80. Pourtant, sa production de série n’a jamais démarré. Les prototypes ont été conservés, après une rigoureuse série de tests.
Après la chute du communisme en décembre 1989, la Roumanie s’est orientée vers l’Occident et vers l’OTAN. Afin de rendre son arsenal compatible avec celui de l’Alliance Atlantique, l’armée roumaine a démarré un ample processus de modernisation et de réforme. La mise à jour des chars de combat a commencé en 1994. Rebaptisé Bizonul/Le Bison, le char TR – 85 a été doté d’équipements numériques produits par des compagnies occidentales, notamment françaises. Sur les environ 300 chars TR 85 dont dispose à l’heure actuelle l’armée roumaine, une cinquantaine sont des Bisons.
Grâce à ce programme, l’armée roumaine s’est vu doter d’un char de combat qui n’a rien à envier aux machines modernes de combat en service actuellement. En témoignent les résultats exceptionnels obtenus par les tankistes roumains lors d’un exercice roumano-américain déroulé l’année dernière en Allemagne. A l’heure actuelle, les responsables du domaine de la défense ont le choix entre la modernisation de chars ou l’achat de chars de combat de fabrication occidentale.