Médecins étrangers à la cour du prince régnant de Valachie, Constantin Brancovan
En 2014, les Roumains célèbrent le tricentenaire de la mort du prince régnant Constantin Brancovan. Lavènement au trône de Constantin Brancovan sest produit en 1688 ; il y a régné 25 ans, soit une période de paix et de prospérité relative pour sa principauté. Décapité aux côtés de ses quatre fils par ordre de la Sublime Porte en 1714, il a été canonisé dernièrement. La culture et lenseignement ont eux aussi connu un grand essor, le plus significatif jamais enregistré jusque là. Le prince avait emmené à sa cour des scientifiques étrangers, dont des médecins célèbres dEurope Occidentale.
Christine Leșcu, 05.12.2014, 14:18
En 2014, les Roumains célèbrent le tricentenaire de la mort du prince régnant Constantin Brancovan. Lavènement au trône de Constantin Brancovan sest produit en 1688 ; il y a régné 25 ans, soit une période de paix et de prospérité relative pour sa principauté. Décapité aux côtés de ses quatre fils par ordre de la Sublime Porte en 1714, il a été canonisé dernièrement. La culture et lenseignement ont eux aussi connu un grand essor, le plus significatif jamais enregistré jusque là. Le prince avait emmené à sa cour des scientifiques étrangers, dont des médecins célèbres dEurope Occidentale.
Octavian Buda, historien de la médecine, nous parlera deux dans les minutes suivantes: « Hormis son fameux secrétaire venu de Florence, Anton Maria del Chiaro, on pouvait voir à la cour de Brancovan dautres personnages fort intéressants, dont des médecins: Jean Comnène Milibdos, Pantaleon Caliarchi, lItalien flamboyant Bartolomeo Ferrati, un Alsacien, Clemens von Brechtenberg, des Grecs tels Giorgios Hypomenas, Giorgios Chrysogonos, Stavros et Ioannis Mulaimis, Eustatius Placicus. Le plus marquant entre tous était sans doute le médecin Iacob Pylarino. Leur présence à la cour princière a été consignée par les chroniqueurs du règne de Brancovan, ainsi que par les documents internationaux, car cétaient des médecins itinérants, qui passaient leur temps entre la Sublime Porte et la Sérénissime République de Venise. »
Un de ces médecins itinérants qui circulaient en mission officielle entre Constantinople et Venise a été le Grec Jean Comnène. Octavian Buda explique : « Après des études à Constantinople, il arrive en Moldavie, à Iasi, en tant que précepteur des enfants du prince Duca. Ensuite, il part pour Padoue, où il étudie la médecine, de 1686 à 1690. Il passe un certain temps à Moscou, après quoi, en 1694, on signale sa présence à la cour de Constantin Brancovan, comme médecin payé de deniers publics. Il donne aussi des cours de sciences de la nature à lAcadémie princière St. Sava de Bucarest et aide le dignitaire Constantin Cantacuzène à dresser la fameuse carte de la Valachie, imprimée à Padoue, en 1700».
Dautres médecins de la cour de Constantin Brancovan – tels que lItalien Bartolomeo Ferrati et lAlsacien von Brechtenberg – ont mis en exergue les liens que le voïvode roumain avait établis avec la Transylvanie voisine aussi. Octavian Buda: « LAlsacien von Brechtenberg, fils dun pasteur de Strasbourg, étudie la médecine en Allemagne et arrive en Transylvanie comme médecin militaire. Il sétablit à Braşov, où il fonde une famille. Personnalité très connue de lépoque, il se fait remarquer par la riche activité culturelle quil déploie dans les villes de Braşov et de Sibiu. Il apprend le roumain, quil finit par très bien maîtriser, car il souhaitait traduire en roumain plusieurs oeuvres de lAntiquité, dont celles de Thucydide et de Pline. Un autre personnage remarquable est Giorgios Hypomenas, Grec originaire de Trébizonde et bénéficiaire dune bourse détudes à lUniversité de Padoue, accordée par le prince Brancovan. Esprit débrouillard, Hypomenas se lance dans les affaires aussi et finit par être considéré comme lhomme de confiance du prince. Même après lexécution de Constantin Brancovan, il garde ce statut auprès de la famille princière ».
Selon lhistorien Octavian Buda, le plus important entre tous ces médecins étrangers a été Iacob Pylarino, originaire de l’île grecque de Céphalonie: « Nos historiens sont unanimes à affirmer que, 12 années durant, à compter de 1694, Pylarino sera lombre de Constantin Brancovan, dont il est le proto-médecin, cest-à-dire le premier médecin. Pylarino restera un proche de la famille même après la tragédie de 1714. Il aidera la veuve du prince à amasser les quelques bribes de fortune qui lui restaient encore, éparpillées dans les banques européennes. Les archives roumaines conservent les traces de son séjour à la cour princière. Bien des informations sur Pylarino se retrouvent aussi dans les archives vénitiennes. Ce qui lui a valu la célébrité dans lhistoire de la médecine, cest la variole épidémique, connue aussi sous le nom de peste blanche, qui a tué et mutilé des millions de personnes au fil du temps. Par sa méthode, Pylarino anticipe la vaccination, sur laquelle repose la médecine moderne et qui sera introduite vers la fin du XVIIIe siècle par lEcossais Edward Jenner. Son précurseur direct a donc été Iacob Pylarino. »
Le prince roumain Constantin Brancovan a donc soutenu la science, la culture et lenseignement. Il convient de mentionner aussi le style architectonique portant son nom, mélange dinfluences vénitiennes et déléments de larchitecture traditionnelle roumaine, ainsi que lAcadémie princière « St. Sava », premier établissement roumain denseignement supérieur. (trad.: Mariana Tudose)