L’arrêt définitif dans l’affaire « Colectiv » – renvoyé au mois de mars
Roxana Vasile, 04.01.2022, 12:13
La Cour d’appel de Bucarest a reporté lundi, de deux nouveaux mois, le prononcé de l’arrêt définitif dans le dossier de l’incendie ayant éclaté dans la boîte de nuit Colectiv, provoquant l’une des plus grandes tragédies de Roumanie en temps de paix, soldée par 65 morts et plus de 200 blessés. Le 30 octobre 2015, en soirée, le groupe rock « Goodbye to Gravity » est monté sur la scène du club Colectiv devant des centaines de jeunes, pour un concert de promotion de leur dernier album.
Peu de temps après le début du concert, les feux dartifice qui accompagnaient la prestation du groupe ont enflammé la mousse acoustique en polyuréthane et le feu sest rapidement propagé dans la salle prévue d’une seule sortie de secours. 153 secondes dincendie ont suffi pour que des spectateurs soient tués sur place et dautres – blessés, soit par le feu et la fumée, soit écrasés par la foule qui sest précipitée vers la sortie. Sur l’ensemble des blessés, certains ont été soignés dans des cliniques de l’étranger, d’autres, restés dans les hôpitaux roumains, sont morts suite aux blessures ou aux infections nosocomiales. Le premier ministre de l’époque, Victor Ponta, a démissionné, tout comme le maire du 4e arrondissement de la capitale.
La tragédie a provoqué la colère des Roumains qui sont sortis dans les rues pour crier « la corruption tue », un slogan qui allait être scandé au cours de plusieurs autres manifestations à Bucarest et dans les autres villes roumaines. Une enquête pénale a été lancée et des arrestations ont été faites. Au bout d’un long procès qui a beaucoup trainé, le Tribunal de grande instance de Bucarest a rendu sa décision en décembre 2019. Lors de ce jugement en première instance, il a condamné les coupables à des peines allant jusqu’à 13 ans de prison ferme et au versement de plus de 10 millions d’euros de dédommagements.
Les avocats des mis en examen ont fait appel pour réclamer des peines allégées et même l’acquittement de leurs clients, accusant les magistrats d’avoir pris des décisions erronées et affirmant que la responsabilité de la mort des 65 victimes revenait plutôt à des entités qu’à des personnes. De leur côté, les procureurs ont réclamé des peines maximales de prison ferme pour l’ancien maire du 4e arrondissement de la capitale roumaine, Cristian Popescu Piedone, pour des fonctionnaires de la mairie, les patrons du club Colectiv, les pompiers, les pyrotechniciens et les représentants de la société pyrotechnique responsable du spectacle qui a provoqué la tragédie.
Un des pyrotechniciens accusés a affirmé que pour sa part, il ne saura pas comprendre sa faute même s’il passe les 20 prochaines années en prison. Les patrons de la boîte de nuit Colectiv ont déclaré que c’est par amour pour la musique qu’ils ont décidé d’ouvrir un tel club et non pas pour faire du bénéfice. Une mère qui a perdu sa fille unique dans l’incendie a réclamé que les années de prison soient multipliées par le nombre de victimes. Une autre dont le fils est mort dans l’incendie s’est dite touchée aussi par le drame que les familles des mis en examen vivent actuellement. De l’avis de Liviu Popescu, survivant de la tragédie, depuis 2015, année de l’incendie, aucune amélioration ne s’est produite dans la société roumaine :
« Qu’est-ce qui s’est passé depuis Colectiv ? Les établissements dépourvus d’un certificat de sécurité incendie fonctionnent, maintenant, en vertu d’une responsabilité civile assumée par les patrons. Du coup, une tragédie similaire à celle de Colectiv peut se répéter à tout moment. »
Les débats dans le dossier Colectiv se sont terminés à la fin de l’année dernière, mais les juges ont décidé de reporter le verdict final au 3 janvier 2022. Sauf que voilà, réunis lundi, les magistrats ont renvoyé, encore une fois, le prononcé, cette fois-ci, au 3 mars prochain. (Trad. Ioana Stancescu)