Le procès de l’incendie du club « Colectiv » se poursuit
Daniela Budu, 04.11.2021, 08:02
Plus de six ans après l’incendie dévastateur déclaré dans
le club Colectiv, soldé par 65 morts et plus de 150 blessés, les peines des mis
en examen pourraient diminuer après que trois juges de la Cour d’appel de Bucarest
ont changé partiellement la qualification juridique des infractions. Ainsi, ils
ont éliminé les « conséquences particulièrement graves » découlant de
l’abus de pouvoir dont une partie des mis en examen est accusée. Il s’agit, entre
autres, de l’ancien maire du 4e arrondissement où se trouvait la
discothèque Colectiv, Cristian Popescu-Piedone. Une fois les conséquences
particulièrement graves écartées de la qualification juridique, les juges
pourront réduire les peines de ces personnes. Une telle décision est d’autant
plus importante qu’elle tombe juste avant les conclusions définitives dans ce
dossier.
Rappelons-le, en décembre 2019, le Tribunal de grande instance de Bucarest
a prononcé les premières condamnations dans l’affaire Colectiv. A ce moment-là,
le maire Cristian Popescu-Piedone, accusé d’avoir autorisé le fonctionnement du
club malgré les défaillances constatées, a été condamné à huit ans et demi de
prison ferme. Les trois patrons de la discothèque, les deux pompiers ayant
fermé les yeux sur les manquements aux normes de sécurité, les pyrotechniciens qui
avaient installé les feux d’artifice et les patrons de la société pyrotechnique
ont été tous condamnés à des peines de prison ferme. En plus, les personnes
condamnées, la Mairie du 4e arrondissement et l’Inspection pour les
Situations d’urgence, ont été condamnées à payer solidairement plus de 50
millions d’euros au titre de dommages moraux et matériels aux victimes de
l’incendie et à leurs familles. Une décision attaquée à l’époque aussi bien par
les mis en examen que par les procureurs et qui a fait que le procès arrive à
la Cour d’appel.
Dans une lettre ouverte, les survivants de l’incendie et
les parents des victimes dénoncent à présent la décision de la juridiction de
changer la qualification juridique des faits. Cela, disent-ils, ne fera que déboucher
sur « de petites peines, insignifiantes et disproportionnées par rapport à
la gravité des faits commis et aux conséquences qui en ont découlé, mettant
dans un coin d’ombre l’ensemble du processus de justice en Roumanie ».
Le 30 octobre dernier, six ans après la tragédie pour
laquelle personne n’a encore payé, les survivants, leurs familles et d’autres
membres de la société civile se sont réunis silencieusement devant la Cour d’appel
pour laisser sur les marches de l’édifice des photos des victimes et des
bougies allumées. Certains se sont également allongés sur les marches et se
sont couverts de draps blancs pour attirer l’attention sur la gravité de la
situation. Ce qui plus est, les survivants de cette terrible tragédie ayant
nécessité une prise en charge médicale extrêmement laborieuse et dont les soins
se poursuivent de nos jours encore, ont tiré la sonnette d’alarme quant au
risque d’infections nosocomiales auxquelles se confrontent les hôpitaux de
Roumanie et dont on ne fait pas état. La Roumanie, rappellent-ils, n’a aucun
centre national destiné à la prise en charge des grands brûlés et à leur
récupération. Les familles et les proches de tous ceux qui ont perdu la vie
dans l’incendie du club Colectiv, appuyés par les représentants de la société
civile, se disent révoltés que six ans après ce drame, les changements opérés
dans le système médical roumain soient insignifiants et que la justice traîne à
régler cette affaire. Le 17 novembre, le tribunal se réunira à nouveau pour décider
des noms des magistrats qui connaîtront de l’affaire.