Préparatifs politiques pour une année électorale
Neuf gouvernements en 8 ans, dont 4 depuis 2016 : sans doute, il y a quelque chose qui cloche dans le système politique roumain. Rassuré par sa réélection avec 66% des voix, en novembre dernier, pour un nouveau mandat de 5 ans, le président Klaus Iohannis ne cesse d’affirmer que sa première option reste le scrutin législatif anticipé, histoire de donner à la population l’occasion d’exprimer une nouvelle fois son option. Une idée partagée par le Parti National Libéral (PNL), qui soutient fermement le président, mais aussi par plusieurs partis de l’opposition, dont l’Union Sauvez la Roumanie (USR) et l’Union Démocrate-Magyare de Roumanie (UDMR). Les autres formations politiques du Législatif de Bucarest rejettent l’idée d’un scrutin parlementaire anticipé. Et pour cause.
Bogdan Matei, 10.02.2020, 13:03
Selon les plus récents sondages sur les options de vote des Roumains, le PNL, de loin le parti le plus populaire à l’heure où l’on parle, réunirait 47% des voix. Son rival, le Parti Social-Démocrate, au pouvoir jusqu’à l’automne dernier, a chuté dans les sondages et ne représente que 20% des options de l’électorat. Le troisième acteur politique important, l’USR, approcherait, elle, les 15% des options de vote, en se ralliant avec un parti tout jeune, PLUS. Comme d’habitude, les représentants de la minorité hongroise dépassent à peine le seuil de 5% des voix, alors que l’Parti du Mouvement Populaire (de l’ancien président Traian Basesescu), l’Alliance des Libéraux et des Démocrates (ancienne partenaire au pouvoir du PSD) et le nouveau parti Pro Romania (fondé par l’ancien premier ministre Victor Ponta) ne dépasseraient pas le seul minimum des 5%. Du coup, un scrutin législatif anticipé ne leur servirait point.
Rappelons aussi le contexte des derniers mois dans lequel on a commencé à véhiculer des arguments pour et contre les élections anticipées. En automne les libéraux ont assumé la gouvernance après avoir réussi à renverser par motion de censure le gouvernement social-démocrate. La semaine dernière, toujours par le biais d’une motion de censure, les sociaux-démocrates ont réussi à leur tour de faire chuter le cabinet libéral de Ludovic Orban, ouvrant ainsi un peu plus la voie vers de nouvelles élections. Toutefois, aux dires des experts, la Constitution de la Roumanie a été conçue de sorte à rendre difficile, sinon impossible, l’organisation d’un scrutin anticipé. Par conséquent, dans une tentative de contourner les entraves de la Constitution, le chef de l’Etat a chargé le même Ludovic Orban, chef de file des Libéraux, de former un nouveau cabinet. Si les sénateurs et députés rejettent le 2e cabinet Orban, le chef de l’Etat peut faire une seule autre nomination. Un éventuel rejet de cette dernière proposition déclenchera la procédure en vue d’un scrutin anticipé.
D’ici là, les partis politiques de Roumanie ont démarré les préparatifs pour le scrutin local prévu dans quelques mois. A l’heure actuelle, le PSD reste la principale force politique du Parlement de Bucarest. Bien qu’ayant chuté dans les sondages d’opinion, et dirigé par un chef par intérim, en la personne de Marcel Ciolacu, le PSD espère faire guérir ses blessures au congrès extraordinaire prévu en ce mois de février. 2019 a été une année bouleversante pour les sociaux-démocrates, vu que leur ancien chef, Liviu Dragnea a été emprisonné pour des faits de corruption, alors que leur première ministre, Viorica Dancila, a quitté son poste de chef de parti, après avoir perdu les élections présidentielles, avec le pire score jamais enregistré par la gauche ces 30 dernières années.
Parallèlement, l’USR et le jeune parti PLUS de l’ancien commissaire européen Dacian Ciolos se préparent pour fusionner. Des négociations dures sont à envisager, estiment les commentateurs, vu que la majorité de l’USR, soit 91% de ses membres, ont voté pour une position de centre-droite de leur parti. Or, au sein du Parlement Européen, les députés européens de l’USR et ceux de PLUS, ont été élus sur des listes communes et sont dirigés par Dacian Ciolos lui-même, étant affiliés au groupe centriste Renew Europe, patronné politiquement par le président français Emmanuel Macron, ancien ministre dans des gouvernements socialistes. (Trad. Valentina Beleavski)