Les magistrats roumains s’opposent à la réforme des régimes spéciaux de retraite
Ştefan Stoica, 21.06.2023, 13:10
Les magistrats de plusieurs instances et parquets de Roumanie ont suspendu,
mercredi, leur activité, estimant que la modification de la loi sur les régimes
spéciaux des retraites portera atteinte à l’indépendance de la Justice. Ainsi,
seules seront prises en charge les affaires les plus urgentes, comme par
exemple les kidnapping, adoptions ou demandes d’ordonnance de restriction. Le
Conseil supérieur de la magistrature a indiqué avoir pris acte de cette démarche
et soutenir les magistrats, estimant qu’il s’agissait aussi d’une atteinte
fondamentale au principe d’indépendance de la justice et du statut des
magistrats avec des conséquences directes sur le fonctionnement de la Justice. Ce
dernier a par ailleurs rappelé que les plus hauts représentants du système
judiciaire s’étaient entretenus avec les représentants des pouvoirs exécutif et
législatif qui leur ont présenté les conséquences qu’auront les amendements
apportés à la loi.
Rappelons que le système judiciaire
est déjà fragilisé par le manque de personnel, dans un contexte où
l’incertitude règne pour les professionnels du domaine. En outre, le CSM a
ajouté ne pas s’opposer à la réforme des régimes spéciaux de retraite et a
affirmé sa volonté de trouver les solutions les plus adéquates pour rendre ce
processus plus efficace. La nouvelle ministre de la Justice, Alina Gorghiu, a
réagit face aux mesures radicales prises par les magistrats en affirmant
respecter leur liberté d’expression mais estimant que le dialogue était
préférable à la contestation pour résoudre les problèmes du système judiciaire.
Le principe selon lequel aucune retraite ne peut dépasser le montant d’un
salaire est purement moral, et la société roumaine attend cette réforme des
régimes spéciaux, estime Alina Gorghiu. La réforme des retraites, qui ne
repose que faiblement sur la cotisation de la période active et qui bénéficie
principalement aux magistrats, mais aussi aux autres catégories
professionnelles, est un jalon du Plan national de relance et de résilience. Dans le cas contraire, la Roumanie perdrait 3 milliards
d’euros. La coalition gouvernementale PSD – PNL souhaite augmenter
progressivement l’âge de la retraite des juges et des procureurs jusqu’à 65
ans, et que la pension soit calculée sur la base des revenus de plusieurs
années, et pas seulement de la dernière année d’activité.
La réforme sur le terrain impliquerait
également de taxer les pensions dépassant un certain niveau et la suppression
des régimes spéciaux pour un certain nombre de catégories telles que les juges
et procureurs, le personnel diplomatique et certaines catégories de hauts fonctionnaires.
En mai 2023, le nombre de bénéficiaires des régimes spéciaux dépassait les 10
000, dont la moitié était des magistrats. Dans leur cas, la pension moyenne
dépasse 20 000 lei, soit 4 000 euros, dont l’essentiel est couvert par l’Etat. (Trad :
Charlotte Fromenteaud)