Une Roumaine, favorite de Bruxelles pour le poste de Procureur européen
L’été dernier, Laura Codruţa Kovesi quittait son poste de procureur en chef du Parquet anticorruption de Roumanie. Le président Klaus Iohannis avait été obligé de la révoquer de ses fonctions, après une décision de la Cour constitutionnelle, selon laquelle le chef de l’Etat ne peut plus refuser une proposition de révocation avancée par le ministre de la Justice. Et c’est justement le ministre de la Justice, Tudorel Toader, qui avait demandé que Mme Kovesi quitte ses fonctions, une demande que le président avait rejetée initialement, la considérant comme non fondée. Le Conseil Supérieur de la Magistrature partageait l’opinion du président, toutefois, son avis était purement consultatif. Par conséquent, Laura Codruţa Kovesi a dû libérer son fauteuil, alors que la DNA reste à ce jour sans chef.
Ştefan Stoica, 28.02.2019, 13:12
L’été dernier, Laura Codruţa Kovesi quittait son poste de procureur en chef du Parquet anticorruption de Roumanie. Le président Klaus Iohannis avait été obligé de la révoquer de ses fonctions, après une décision de la Cour constitutionnelle, selon laquelle le chef de l’Etat ne peut plus refuser une proposition de révocation avancée par le ministre de la Justice. Et c’est justement le ministre de la Justice, Tudorel Toader, qui avait demandé que Mme Kovesi quitte ses fonctions, une demande que le président avait rejetée initialement, la considérant comme non fondée. Le Conseil Supérieur de la Magistrature partageait l’opinion du président, toutefois, son avis était purement consultatif. Par conséquent, Laura Codruţa Kovesi a dû libérer son fauteuil, alors que la DNA reste à ce jour sans chef.
A l’heure où l’on parle, Laura Codruţa Kovesi est candidate aux fonctions de chef du Parquet européen. Son travail a été constamment apprécié dans les rapports de la Commission européenne et actuellement elle est la favorite de Bruxelles pour la direction de cette nouvelle institution. Auditionnée ces jours-ci par les commissions CONT (la commission de contrôle budgétaire) et LIBE (Libertés civiles, justice et affaires intérieures) du Parlement européen, Laura Codruţa Kovesi a reçu la majorité des voix.
Ce résultat n’est pas uniquement une victoire personnelle, affirme-t-elle: « Ce vote n’est pas seulement pour moi, c’est un vote pour l’ensemble du système roumain de justice. C’est un vote pour tous les citoyens de la Roumanie qui, ces dernières années, ont soutenu l’Etat de droit et la lutte contre la corruption. C’est un vote pour tous les procureurs et les juges d’Europe qui travaillent sous pression. Je n’ai pas eu le soutien du gouvernement de Bucarest, je ne l’ai pas demandé non plus, je ne l’attendais pas et je ne l’attends pas.»
Les analystes politiques ne s’attendaient pas non plus à ce que Mme Kovesi espère avoir le soutien d’un gouvernement qui a nié ses mérites, allant même plus loin, jusqu’à la considérer coupable pour les supposés abus commis par les procureurs de la DNA. Le fait que le Parti Social-Démocrate (PSD) et l’Alliance des Libéraux et des Démocrates (ALDE) aient voté contre la candidate roumaine et les réactions du pouvoir de gauche de Bucarest en disent long sur cette situation plus qu’inhabituelle. Par exemple, le sénateur social-démocrate Claudiu Manda a déclaré que des députés européens sociaux-démocrates de Roumanie avaient voté contre Mme Kovesi parce qu’ils savaient très bien quels abus la DNA avait commis. « C’est un exemple parfait, de la part du PE, qui est très généreux dans sa tentative de nous apprendre que le politique ne doit pas intervenir dans la Justice. Alors qu’il nous a fait aujourd’hui une démonstration parfaite de la manière dont le politique influe sur ce choix», a affirmé Călin Popescu Tăriceanu, chef de l’ALDE, qui partage le pouvoir, à Bucarest, avec le PSD.
En revanche, pour le Parti national libéral (PNL), d’opposition, le vote de Bruxelles en faveur de Laura Codruţa Kovesi est une victoire pour la Roumanie au sein du PE. En même temps, pour l’Union Sauvez la Roumanie (USR), toujours d’opposition, c’est un coup que la majorité PSD-ALDE reçoit de la part de ses partenaires européens.
C’est maintenant au Conseil de l’UE et au PE de prendre une décision en ce qui concerne le futur chef du Parquet européen. Précisions que le Parquet européen sera un bureau indépendant chargé d’investiguer les infractions contre le budget de l’UE, de poursuivre et de renvoyer en justice les auteurs ; il traitera des affaires de fraude, de corruption ou de fraude transfrontalière de TVA. Le Bureau du Parquet public européen sera opérationnel avant la fin 2020 et son siège sera établi à Luxembourg. Son procureur en chef aura un mandat de 7 ans. (Trad. Valentina Beleavski)