Condamnation pour le leader de la majorité parlementaire
Séisme politique à Bucarest: Liviu Dragnea, l’homme fort du Parti Social-Démocrate (PSD) et de la coalition de droite au pouvoir, a reçu une peine de prison ferme pour instigation à abus de fonction. Jeudi, la Haute Cour de Cassation et de Justice a validé, en première instance, les accusations formulées par la Direction nationale anticorruption (DNA), notamment d’avoir arrangé l’embauche fictive de deux membres du PSD à la Direction d’Assistance sociale et de protection de l’enfance. Alors qu’elles étaient payées de fonds publics, les deux fonctionnaires travaillaient en fait exclusivement pour le PSD. Ces faits remontent à l’époque où Liviu Dragnea était président du Conseil Départemental de Teleorman (sud).
Valentina Beleavski, 22.06.2018, 13:42
Séisme politique à Bucarest: Liviu Dragnea, l’homme fort du Parti Social-Démocrate (PSD) et de la coalition de droite au pouvoir, a reçu une peine de prison ferme pour instigation à abus de fonction. Jeudi, la Haute Cour de Cassation et de Justice a validé, en première instance, les accusations formulées par la Direction nationale anticorruption (DNA), notamment d’avoir arrangé l’embauche fictive de deux membres du PSD à la Direction d’Assistance sociale et de protection de l’enfance. Alors qu’elles étaient payées de fonds publics, les deux fonctionnaires travaillaient en fait exclusivement pour le PSD. Ces faits remontent à l’époque où Liviu Dragnea était président du Conseil Départemental de Teleorman (sud).
Cette sentence n’est pourtant pas définitive, mais si elle est confirmée, ce sera sa 2e condamnation, après celle de 2 ans avec sursis pour tentative de fraude électorale, reçue en 2016. Il s’agit là de l’implication de Liviu Dragnea dans l’organisation du référendum pour la destitution du président Traian Basescu, en 2012. Toutefois les deux sentences ne sont pas cumulées, la Haute Cour décidant par la même sentence rendue jeudi d’annuler la condamnation de 2016. Malgré cette première condamnation, Liviu Dragnea avait été désigné pour diriger le PSD lors des élections parlementaires de 2016 et il a réussi à obtenir le succès électoral le plus retentissant des sociaux-démocrates des deux dernières décennies.
Après cette seconde condamnation, il est toujours soutenu par les membres de son parti, dont notamment Mme Viorica Dancila, premier ministre. Les sociaux démocrate invoquent soit la présomption d’innocence, dont leur leader doit bénéficier jusqu’à la sentence définitive, soit un supposé acte de vengeance politique dont il serait victime. C’est d’ailleurs une hypothèse véhiculée depuis un certain temps déjà, selon laquelle des forces occultes des renseignements et de la DNA persécuteraient systématiquement Liviu Dragnea. Son partenaire au pouvoir, le leader de l’Alliance des Libéraux et des Démocrates, Calin Popescu – Tariceanu, insiste à son tour sur la présomption d’innoncence. De l’autre côté de la barricade, l’opposition de droite exige que Liviu Dragnea quitte toutes ses fonctions publiques.
Le chef de file des Libéraux, Ludovic Orban, invite les parlementaires de la majorité PSD – ALDE à se délimiter du président social – démocrate pour rejoindre la motion de censure contre le gouvernement initiée par le Parti National Libéral (PNL). A son tour, l’Union Sauvez la Roumanie (USR), aussi d’opposition, estime qu’il est inacceptable que Liviu Dragnea, « un infracteur ayant deux condamnations pénales », occupe toujours une des fonctions publiques les plus importantes.
Entre temps, les rues de la capitale et des grandes villes sont à nouveau animées de protestations antigouvernementales, notamment contre les récentes modifications opérées dans les lois de la justice et dans les codes pénaux. Un vague de joie s’est propagée parmi les protestataires en apprenant la sentence contre Liviu Dragnea. Jeudi d’amples manifestations ont eu lieu un peu partout dans le pays, les Roumains demandant la démission du leader social-démocrate, la dissolution du Parlement et l’organisation d’élections anticipées. La personnalité de Liviu Dragnea est secouée et avec, elle, son parti et la coalition au pouvoir. Le premier test majeur de résistance aura lieu mercredi prochain, au moment du vote de la motion de censure déposée par les libéraux.
A noter aussi que le leadership autoritaire de Dragnea, a déterminé plusieurs membres à quitter le parti. Pour les analystes, ce personnage qui avait promis un changement radical de l’ensemble de l’architecture institutionnelle et législative reposant à la base de la justice, ne cherchait en fait que de s’emparer du contrôle de celle-ci. Une démarche échouée, à en croire la sentence donnée ce jeudi par la Haute Cour de Cassation et de Justice. Un verdict longuement attendu et qui confirme enfin l’indépendance de la Justice roumaine. (Trad. Valentina Beleavski).