L’historien Constantin Kirițescu
La Première guerre mondiale a été un chapitre de
l’histoire marqué par le choix de l’humanité de se libérer de ses frustrations par
une violence extrême. Les historiens ont confirmé que les opérations militaires
étalées sur les quatre années de conflit avaient fait près de 10 millions de
morts. La Grande Guerre a aussi fait l’objet d’ouvrages littéraires en tous
genres : fiction, analyse historique politique et militaire, militantisme
au bénéfice des invalides de guerre, leçon de morale. Beaucoup de ces textes
sont devenus des best-sellers grâce au talent des auteurs, qui ont réussi à rendre
avec réalisme la situation sur le front et derrière les lignes de combat. En
Roumanie, sont bien connus des livres tels que le roman « Ultima noapte de
dragoste, întâia noapte de război/Dernière nuit d’amour, Première nuit de
guerre » de Camil Petrescu, « Opera de asistență și reeducație a
invalizilor de război din România/L’œuvre d’assistance et de rééducation des
invalides de guerre en Roumanie » du médecin orthopédiste Ion Ghiulamila,
des textes pacifistes et de mémoires blâmant la guerre, des ouvrages très bien
reçus par le public. Le livre d’histoire le plus apprécié a été « Istoria
războiului pentru întregirea României, 1916-1919/L’histoire de la guerre pour
la réunification de la Roumanie 1916-1919 », de Constantin Kiriţescu,
un ouvrage largement consulté par ceux qui se sont penchés sur la Grande Guerre.
Steliu Lambru, 17.04.2022, 11:30
La Première guerre mondiale a été un chapitre de
l’histoire marqué par le choix de l’humanité de se libérer de ses frustrations par
une violence extrême. Les historiens ont confirmé que les opérations militaires
étalées sur les quatre années de conflit avaient fait près de 10 millions de
morts. La Grande Guerre a aussi fait l’objet d’ouvrages littéraires en tous
genres : fiction, analyse historique politique et militaire, militantisme
au bénéfice des invalides de guerre, leçon de morale. Beaucoup de ces textes
sont devenus des best-sellers grâce au talent des auteurs, qui ont réussi à rendre
avec réalisme la situation sur le front et derrière les lignes de combat. En
Roumanie, sont bien connus des livres tels que le roman « Ultima noapte de
dragoste, întâia noapte de război/Dernière nuit d’amour, Première nuit de
guerre » de Camil Petrescu, « Opera de asistență și reeducație a
invalizilor de război din România/L’œuvre d’assistance et de rééducation des
invalides de guerre en Roumanie » du médecin orthopédiste Ion Ghiulamila,
des textes pacifistes et de mémoires blâmant la guerre, des ouvrages très bien
reçus par le public. Le livre d’histoire le plus apprécié a été « Istoria
războiului pentru întregirea României, 1916-1919/L’histoire de la guerre pour
la réunification de la Roumanie 1916-1919 », de Constantin Kiriţescu,
un ouvrage largement consulté par ceux qui se sont penchés sur la Grande Guerre.
Ce qui
est surprenant c’est que cet auteur n’était en fait pas historien. Constantin
Kiriţescu est le 3 septembre 1876 à Bucarest, où il s’est éteint le 12 août
1965, à l’âge de 88 ans. Une longue vie, au cours de laquelle il fut le témoin
de deux changements radicaux de visions du monde, en 1918 et en 1945.
Constantin Kiriţescu naquit et se forma dans la Roumanie construite par le
premier monarque, Carol I de Hohenzollern-Sigmaringen, pendant la seconde
moitié du XIXe siècle. Il fut présent lors du triomphe de la naissance de la
Grande Roumanie, sous le deuxième roi, Ferdinand I, en 1918. Et il assista à,
l’effondrement de la démocratie sous les coups de massue du régime communiste
appuyé par l’Union soviétique après 1945. Constantin Kiriţescu a été docteur en
zoologie et enseignant au très réputé lycée Sfântu Sava/Saint Sava de Bucarest.
La Roumanie lui doit la mise au premier plan des recherches sur ses reptiles et
ses amphibiens. Ainsi, il publia le volume intitulé « Cercetări asupra
faunei herpetologice a României/Recherches sur la faune herpétologique de
Roumanie » et il découvrit, en Dobroudja, au sud-est de la Roumanie, une
espèce de serpent rare, appelé « le boa des sables » Eryx jaculus,
vivant dans les alentours de la ville danubienne de Cernavodă, ainsi qu’une
espèce endémique de triton, le Triturus dobrogicus. Passionné d’histoire et
publiciste, il décrivit dans ses textes des gens qu’il avait croisés et des
lieux qu’il avait parcourus. Il s’intéressa à l’éducation et à l’enseignement
roumain, ayant représenté la Roumanie dans ce domaine à la Ligue des nations,
l’ancêtre de l’Organisation des Nations unies.
« Istoria
războiului pentru întregirea României, 1916-1919/ L’histoire de la guerre pour
la réunification de la Roumanie 1916-1919 », le volume auquel
Constantin Kirițescu doit sa célébrité, est un ouvrage solide, paru en deux et
trois volumes et en trois éditions. La première fut celle de 1922-1923,
pratiquement au lendemain de la Grande Guerre, suivie par la deuxième en
1925-1927. La troisième édition date de 1989. Interviewé par le Centre
d’histoire orale de la Radiodiffusion roumaine, le professeur et économiste
Costin Kirițescu se souvenait en 1994 du succès du livre écrit par son père. « Le livre a d’abord été publié en deux volumes ; après, il a
fallu en tirer une deuxième édition, revue et mise à jour, en trois volumes.
Cela montre aussi la persévérance de l’auteur, ce qui n’était pas simple pour
lui, car il n’avait pas combattu sur le front en raison d’un handicap physique.
Mais les gens qu’il connaissait et l’immense bibliographie parcourue l’ont aidé
à écrire ce livre qui est, parait-il, un ouvrage de référence. », a-t-il dit.
La
troisième édition a été imprimée en 1989, dernière année d’existence du régime
communiste et aussi une année de censure draconienne, raconte Costin Kirițescu. « Moi, j’étais fonctionnaire au ministère des finances lorsqu’un
émissaire du Comité central du Parti communiste a voulu savoir s’il était
possible de sortir une troisième édition du livre. Évidemment, moi j’ai dit oui
et ce fut le début d’une véritable tragi-comédie. Elena Ceauşescu a appris
l’existence de ce projet, alors elle a convoqué le secrétaire en charge des
sciences historiques pour en avoir la confirmation et quand elle a eu cette
confirmation, elle lui a lancé un encrier à la tête. Au bout de tout un tas de
tergiversations et de reports, pour un prétexte ou un autre, la troisième
édition du livre de mon père est parue à l’automne 1989. Cette édition a été
complétée et annotée par mon père. Mes propres interventions, de quelques mots
seulement, ont déplu au parti et j’ai dû les enlever. Et ce fut tout. », a-t-il raconté.
Constantin Kirițescu a été un professeur
de zoologie passionné d’histoire, auquel nous devons l’un des ouvrages les plus
appréciés de l’historiographie roumaine. (Trad. Ileana Ţăroi)