Le Palais municipal du premier arrondissement de la capitale roumaine
Puisque durant l’entre-deux-guerres, la ville de Bucarest s’était beaucoup développée et agrandie, elle devenait de plus en plus difficile à administrer. Ce pourquoi, en 1926, on décida de la diviser en plusieurs unités administratives, appelées « sectoare/secteurs » et identifiées par des couleurs. Cette division subsiste encore, Bucarest étant constitué de 6 secteurs (ou arrondissements), délimités presque de la même façon, mais désignés actuellement par des chiffres. A l’époque, le premier arrondissement était appelé le « secteur vert » et le bâtiment accueillant sa mairie est resté jusqu’à nos jours un des monuments d’architecture les plus imposants de la ville.
Christine Leșcu, 06.09.2020, 13:05
Puisque durant l’entre-deux-guerres, la ville de Bucarest s’était beaucoup développée et agrandie, elle devenait de plus en plus difficile à administrer. Ce pourquoi, en 1926, on décida de la diviser en plusieurs unités administratives, appelées « sectoare/secteurs » et identifiées par des couleurs. Cette division subsiste encore, Bucarest étant constitué de 6 secteurs (ou arrondissements), délimités presque de la même façon, mais désignés actuellement par des chiffres. A l’époque, le premier arrondissement était appelé le « secteur vert » et le bâtiment accueillant sa mairie est resté jusqu’à nos jours un des monuments d’architecture les plus imposants de la ville.
L’histoire du Palais municipal du « secteur vert » commence toujours en 1926. Pour le construire, les autorités locales ont acheté un terrain assez vaste, à la périphérie nord de la ville, à proximité de la Place Victoriei, où se trouve de nos jours le siège du gouvernement. L’administration locale avait de grandes ambitions liées à ce terrain, elle voulait y construire tout un ensemble de bâtiments publics : le siège de la mairie, un lycée, un bain public, un Athénée populaire, un terrain de sport, un théâtre communal etc. Parmi tous ces projets, deux seulement se sont concrétisés : le lycée « Ion Neculce » et le Palais municipal, dont la pierre angulaire a été posée en 1928. Au bout d’un an, l’aile principale du bâtiment était déjà terminée. Une partie des bureaux de la mairie y ont été installés en octobre 1929. Quels ont été les auteurs du projet initial ?
L’architecte Hanna Derer, membre de l’équipe de restauration du Palais, explique. « Les documents mentionnent les noms de Nicu Georgescu et de George Cristinel. Ce dernier était plus connu que Nicu Georgescu, qui a également eu une riche activité, sans bénéficier pourtant de la même popularité. George Cristinel est connu notamment pour avoir réalisé le projet du Mausolée de Mărășești. Le style adopté par les deux architectes est éclectique, réunissant des éléments propres à l’architecture néo-roumaine – chose tout à fait naturelle pour cette époque – mais aussi des influences d’une architecture plus ancienne, néo-romane. C’est d’ailleurs pourquoi la tour de l’horloge de ce palais est souvent comparée aux tours d’églises d’Italie, dont la basilique Saint-Marc de Venise. Après cette première étape, les travaux de construction ont ralenti, faute d’argent. C’est pourquoi, en 1933, pour achever quand même la construction, le maire de l’époque a signé un accord avec le ministère des Finances, par lequel la mairie se voyait octroyer des fonds supplémentaires qu’elle pouvait investir dans le chantier. En échange, le ministère avait le droit d’utiliser l’aile secondaire du bâtiment. C’est à peine en 1936 que le Palais a pu être inauguré. Le rapport publié par la mairie à cette occasion mentionnait le fait que la tour du Palais municipal était la plus haute construction de Bucarest. Elle s’élève, en effet, à 56 mètres, égalant la hauteur d’un immeuble de 17 à 18 étages, ce que l’on pouvait considérer à l’époque comme une véritable performance architecturale. »
Du haut de la tour de l’horloge veille un chevalier en armure, brave gardien du secteur – voire de toute la ville. « L’homme de cuivre » mesure 3,5 mètres de haut et tient dans sa main un marteau, symbole de la guilde des forgerons. Baptisé Pandele et couramment désigné par son diminutif Pandelică, ce gardien en armure médiévale a été créé par le maître ferblantier Alexandru Dimitriu et il a un « frère » sur le toit de la maison de son créateur. Alexandru Dimitriu a réalisé les décorations métalliques d’autres bâtiments célèbres de la capitale : l’Athénée roumain, le Palais patriarcal orthodoxe, le Palais de la Gare du Nord.
Quant à Pandelică, le personnage du Palais municipal, Hanna Derer nous le présente plus en détail.« Il est déjà entré dans les légendes urbaines, comme symbole soit d’un pompier de l’entre-deux-guerres, soit de Saint Démètre ou Démétrios, patron de la ville de Bucarest, qui était un saint militaire. On ne sait pas exactement qui il représente et ce n’est même pas important, puisqu’il est entré dans la conscience des gens, devenant un repère de la ville. Pour qu’il puisse être admiré de plus près, son restaurateur, Traian Postelnicu, a réalisé une réplique grandeur nature de Pandelică, qu’il a placée à l’entrée de la mairie. En fait, initialement, le nouveau bâtiment a accueilli la mairie du secteur vert seulement entre 1929 et 1938. Hanna Derer. « Les bureaux de la mairie ayant été installés dans l’aile principale du bâtiment en octobre 1929, on peut dire que, durant cette première période, la mairie y a eu son siège 8 ans durant. En 1938, le Palais est cédé au ministère de l’Intérieur, qui l’a utilisé jusqu’en 1951. Rendu à la municipalité, l’immeuble retrouve sa destination initiale : il redevient le siège de la mairie de ce secteur de Bucarest. »
En 2010, une équipe de restaurateurs, dont notre invitée faisait partie, a entamé les travaux de consolidation et de rénovation du Palais, qui rouvrait ses portes le 14 juin 2015. De nos jours, le Palais municipal et l’espace qui l’entoure ennoblissent le Boulevard Banu Manta et le premier secteur de la capitale. (Trad. : Dominique)