L’Architecte Nicolae Ghika-Budeşti
Nicolae Ghika-Budeşti a également été un remarquable restaurateur de monuments historiques. Né il y a 150 ans, le 22 décembre 1869, à Iaşi, il était le descendant de deux illustres familles de boyards — Ghica et Cantacuzène — qui ont donné au fil des siècles aux Principautés roumaines plusieurs princes régnants. Nicolae Ghika a grandi dans un milieu artistique. L’historienne de l’art Oana Marinache explique :
Christine Leșcu, 29.12.2019, 17:05
Nicolae Ghika-Budeşti a également été un remarquable restaurateur de monuments historiques. Né il y a 150 ans, le 22 décembre 1869, à Iaşi, il était le descendant de deux illustres familles de boyards — Ghica et Cantacuzène — qui ont donné au fil des siècles aux Principautés roumaines plusieurs princes régnants. Nicolae Ghika a grandi dans un milieu artistique. L’historienne de l’art Oana Marinache explique :
« L’architecte Nicolae Ghika-Budeşti est né dans l’une des familles de boyards les plus célèbres de Moldavie. Il faut savoir qu’en général, pour se distinguer entre elles, les différentes branches des vieilles familles comptant beaucoup de membres adoptaient un deuxième nom, indiquant le domaine dont elle provenait. Il y avait ainsi les Ghika-Comăneşti, les Ghika-Deleni et, en l’occurrence, les Ghika-Budeşti. Le futur architecte a eu la chance de naître d’un père talentueux. Eugen Ghika-Budeşti a été un peintre moins renommé, mais qui s’est quand même fait connaître à l’étranger. Sa mère provenait des Cantacuzène et elle était proche parente du peintre George Pallady et de l’architecte George Matei Cantacuzène. Elle était donc la descendante d’une famille qui a donné au monde de l’art et de l’architecture de grandes personnalités. L’appartenance de Nicolae Ghika-Budeşti à une famille de boyards de Moldavie allait influencer son architecture, la plupart des bâtiments de Bucarest qui lui sont dus étant de style néo-roumain, avec une touche architecturale moldave. »
Cette particularité, cette originalité de son style s’explique par l’influence de l’architecture des églises et des monastères de Moldavie, érigés sous les règnes d’Etienne le Grand et de Petru Rareş, aux 15-16e siècles. Oana Marinache :
« Il s’agit d’une réinterprétation de cette architecture, de certains éléments néogothiques ornant l’encadrement des fenêtres et des portails de ces édifices religieux, ainsi que de motifs décoratifs provenant notamment de la céramique traditionnelle émaillée et colorée. Pourtant, Nicolae Ghika-Budeşti n’a pas été à 100% tributaire à ces influences. Il a également réinterprété certains éléments de l’architecture spécifique à la Valachie. Les constructions publiques ou privées qu’il a conçues ont presque toutes un élément de verticalité impressionnant — et je pense notamment à la tour belvédère dont il embellit les institutions publiques ou les villas dont il a conçu les projets. Il utilise également beaucoup l’arc en fer à cheval, élément définitoire de l’architecture moldave appliquée au style néo-roumain. »
L’ouvrage d’architecture le plus connu de Nicolae Ghika-Budeşti reste l’agrandissement du bâtiment de l’Université bucarestoise, un des symboles de la capitale roumaine. La partie centrale du palais a été projetée par l’architecte Nicolae Orăscu et les travaux de construction ont commencé le 10 octobre 1857, et ont été achevés à peine le 14 décembre 1869. Au fil du temps, le nombre d’étudiants et de spécialisations ayant augmenté, le bâtiment eut besoin d’un agrandissement, qui fut réalisé au début du 20e siècle. Oana Marinache précise :
« Ce projet d’agrandissement fut entamé avant la Première Guerre mondiale, pourtant, la conflagration mondiale allait l’arrêter pour un certain temps. Cette première étape visait l’aile longeant la rue Academiei. Cette partie du bâtiment, Nicolae Ghika-Budeşti la réalise en collaboration avec son plus jeune confrère, le futur grand architecte Duiliu Marcu, à l’époque à peine de retour à Bucarest après des études à Paris. Les travaux allaient reprendre en 1924, lorsque fut construite l’aile longeant la rue Edgar Quinet et qui allait accueillir la Faculté de Lettres, achevée en 1928. »
Parallèlement, Nicolae Ghika-Budeşti donne des cours à la Faculté d’Architecture et il publie de nombreux études et ouvrages spécialisés, dont le plus remarquable est « L’Evolution de l’architecture en Valachie et en Moldavie ». En 1930, il est élu membre d’honneur de l’Académie roumaine. Il a également travaillé comme restaurateur, entre 1906 et 1943, en tant qu’architecte en chef du Service technique et ensuite comme consultant au sein de la Commission des monuments historiques. Oana Marinache :
« Par le biais de la Commission des monuments historiques, il a été présent sur de nombreux chantiers de restauration. Il a voyagé à travers le pays, pour coordonner et évaluer les travaux de restauration de différents monuments religieux. Nicolae Ghika-Budeşti compte parmi les personnalités de l’enseignement universitaire et de la restauration de monuments historiques les plus importantes. Il a fourni conseil pour la plupart des interventions sur ces monuments. N’ayant plus le temps de coordonner lui-même les chantiers de construction, il réalisait les projets des édifices, qui étaient mis en œuvre notamment par des constructeurs italiens. »
L’architecte et restaurateur Nicolae Ghika-Budeşti s’est éteint le 16 décembre 1943, à Bucarest. Parmi les créations qu’il nous a léguées comptent aussi des projets de décorations intérieures et des pièces de mobilier d’inspiration byzantine.
(Trad. : Dominique)