« Stage dogs » : Marcel Iureş şi Florin Piersic Jr. dans un spectacle-rencontre
« Être acteur : voilà une occupation magnifique. Terrible. Superbe. Ridicule. Formidable. Horrible. Exaltante. Pénible. C’est un peu ça, « Strage Dogs » et il y a des chances que le courant soit plus impétueux que jamais. » C’est ainsi que Florin Piersic Jr. présente le spectacle dont il est l’auteur et le metteur en scène, et qui marque la première rencontre sur scène de deux acteurs très connus, talentueux et charismatiques : Marcel Iureş şi Florin Piersic Jr. « Stage dogs » (« Chiens de scène ») est une production du Théâtre Act. Créé il y a une vingtaine d’années, Act est le premier théâtre indépendant de la Roumanie post communiste à disposer de sa propre salle de spectacles.
Luana Pleşea, 18.08.2018, 13:30
« Être acteur : voilà une occupation magnifique. Terrible. Superbe. Ridicule. Formidable. Horrible. Exaltante. Pénible. C’est un peu ça, « Strage Dogs » et il y a des chances que le courant soit plus impétueux que jamais. » C’est ainsi que Florin Piersic Jr. présente le spectacle dont il est l’auteur et le metteur en scène, et qui marque la première rencontre sur scène de deux acteurs très connus, talentueux et charismatiques : Marcel Iureş şi Florin Piersic Jr. « Stage dogs » (« Chiens de scène ») est une production du Théâtre Act. Créé il y a une vingtaine d’années, Act est le premier théâtre indépendant de la Roumanie post communiste à disposer de sa propre salle de spectacles.
Inspiré de la pièce « Une vie au théâtre » de David Mamet, « Stage dogs » est une porte qui s’ouvre sur les coulisses du spectacle de théâtre : « Réjouissez les gens. Faites-les pleurer, faites-les rire, emmenez-les loin, faites-les oublier, mais ne leur mentez jamais ! » Ces mots, écrits par Piersic Jr., sont prononcés par Marcel Iureş vers la fin du spectacle et leur impact sur le public est si puissant, qu’il est difficile de les oublier. Nous avons demandé à Marcel Iureş si c’était facile ou difficile pour un acteur de ne pas mentir au public. « Ça, personne ne le sait. Il y en a beaucoup qui font semblant. Même là, ils font semblant, dans leur désir de tirer les choses au clair, de tirer une conclusion. Sauf que c’est un métier sans conclusions. Ce qui fascine, dans ce spectacle, tel qu’il a été écrit par Florin et que nous le jouons, c’est le fait qu’il jette une lumière dans ce fossé obscur. D’un côté du fossé se trouve le besoin de l’être humain de créer des légendes, d’inventer – on est artiste, quoi ! Il y a beaucoup de mystères, plus ou moins justifiés, et on a sa propre notoriété, sa propre célébrité. Comme Florin le dit à un moment donné : nous montons sur scène comme de pauvres schizophrènes, tous tremblants ; nos plombs sautent sur scène et notre ADN est grillé… Nous avons l’impression d’être quelqu’un en nous faisant passer pour quelqu’un d’autre. Nous tremblons de tous nos membres et nous subissons de petits infarctus, mais nous les subissons tous les soirs. En fait, nous avons la frousse. »
Le texte de « Stage dogs » (« Chiens de scène ») est conçu comme une histoire qui retrace l’évolution des rapports entre l’acteur « monstre sacré » et le jeune acteur. De quels besoins, de quels désirs, de quelle quête intérieure est née cette tentative de dévoiler le spectacle de la vie dans les coulisses d’un spectacle de théâtre ? Florin Piersic Jr. : « Ce sont des choses qui viennent apaiser un peu cette zone du théâtre où des gens montent sur un piédestal et vous regardent, fiers, de là-haut. Nous devons nous le rappeler. Car la magie du théâtre fonctionne, en effet, ça dépend de ce que l’on met en lumière… ça dépend de beaucoup de choses, en fait. Pourtant, les acteurs sont des êtres très fragiles et très malheureux, qui ont un bagage normal de problèmes réels et un bagage immense de problèmes imaginaires – ceux de leurs personnages. Or, ces bagages, ils ne cessent de les porter et c’est ce qui les rend spéciaux. Pourtant, je pense que certaines répliques de ce spectacle sont nécessaires, on doit les faire entendre, pour équilibrer la balance. Un enthousiasme exacerbé n’est pas sain. Et je parle de l’enthousiasme des spectateurs vis-à-vis des acteurs. En effet, l’acteur a un charisme. On a l’impression qu’ils sont des surhommes. Pourtant, ils sont, eux aussi, des êtres humains et c’est ce que le spectacle veut montrer. »
Nous nous sommes entretenus avec Marcel Iureş et Florin Piersic Jr. après le spectacle présenté au Festival international de théâtre nouveau d’Arad (ville sise dans l’est de la Roumanie). Joué pour la 20e fois depuis sa première au mois de mars, « Stage dogs » y a fait salle comble, ce qui arrive à chaque fois. Les gens viennent-ils seulement pour voir les deux acteurs ou le texte touche-t-il aussi leur cœur ? Florin Piersic Jr : « Je me suis demandé, à un moment donné : qui une telle pièce allait-elle intéresser ? Nos collègues, les gens de théâtre, seront-ils les seuls intéressés ? Ou bien les critiques de théâtre, les théâtrologues ? Et je commence à découvrir avec stupeur que ce monde caché, ce monde des coulisses et des loges peut intéresser aussi longtemps que les gens s’identifient avec les comédiens. Ils reconnaissent en eux leurs propres émotions, leurs propres sentiments. Et ils disent : oui, cela est possible. Et puis, l’auto-ironie est une arme très efficace dans un spectacle. »
Puisque « Stage dogs » nous ouvre la porte des loges d’acteur, entrons aussi, pour quelques instants, dans les coulisses des répétitions, pour apprendre comment Florin Piersic Jr et Marcel Iureş ont préparé ce spectacle. Ils nous le racontent, eux-mêmes. Florin Piersic Jr de dire : « Ce qui a été vraiment incroyable, pendant les répétitions, c’était ce rire qui guérit, qui nous a toujours accompagné, les histoires que nous nous sommes racontées, des choses liées à ce que nous étions en train de jouer, des choses qui nous rappelaient combien, en fait, les acteurs sont des êtres humains, combien ils sont de ce monde. Nous nous sommes raconté tellement de choses et nous étions tellement heureux ! Et cela se reflète dans le spectacle, ça aide, car le spectacle est, en grande mesure, une comédie. Tout comme la vie. Je ne crois plus au drame qui ne contient pas une petite touche comique. Tout comme la vie. »
Et Marcel Iureş d’ajouter : « Ce spectacle a été une expérience de vie, une rencontre ; on n’est pas passé l’un à côté de l’autre. Car on peut mimer ou détruire une relation pour garder sa gloire, la légende. C’est stupide. L’idée de nous engager dans cette guerre des célébrités, des noms et des renommées est terrible. Je n’y crois pas. Je crois, au contraire, à une fusion, car, finalement, on se fond l’un dans l’autre, l’un devant l’autre. Ce sont là de grands mots, mais c’est dans cette direction qu’il faut orienter ses efforts. C’est l’effort fondamental des acteurs qui se rencontrent. C’est ça, la collaboration. On peut se tendre la main, comprendre l’autre. Plus de honte, plus de fausse pudeur. Au théâtre, quand on travaille, on se dénude, pour ainsi dire. Enfin, celui qui peut... » (Trad. : Dominique)