Direction Schengen, à pas mesurés
« L’espace Schengen est l’un des grands exploits de l’UE, un exploit
que nous devons protéger et développer davantage. Et pour ce faire, il nous
faut fermer la boucle. La Croatie, la Roumanie et la Bulgarie remplissent l’ensemble
des conditions techniques pour devenir membres à part entière de l’espace Schengen »,
avait récemment affirmé le chancelier allemand Olaf Scholz, dont son pays, avec
les Pays-Bas, s’était opposé farouchement à l’adhésion de la Roumanie à l’espace
européen de libre circulation. Il vaut sans dire que la déclaration de M. Scholz
a rapidement ravivé les espoirs de la Roumanie, pour qui l’adhésion à l’espace
Schengen constitue l’un des principaux objectifs de politique étrangère.
Corina Cristea, 16.09.2022, 07:48
« L’espace Schengen est l’un des grands exploits de l’UE, un exploit
que nous devons protéger et développer davantage. Et pour ce faire, il nous
faut fermer la boucle. La Croatie, la Roumanie et la Bulgarie remplissent l’ensemble
des conditions techniques pour devenir membres à part entière de l’espace Schengen »,
avait récemment affirmé le chancelier allemand Olaf Scholz, dont son pays, avec
les Pays-Bas, s’était opposé farouchement à l’adhésion de la Roumanie à l’espace
européen de libre circulation. Il vaut sans dire que la déclaration de M. Scholz
a rapidement ravivé les espoirs de la Roumanie, pour qui l’adhésion à l’espace
Schengen constitue l’un des principaux objectifs de politique étrangère.
Pour
comprendre la portée réelle de la déclaration du chancelier allemand, nous
avons approché Bogdan Aurescu, le chef de la diplomatie de Bucarest, qui déclare : « Il s’agit d’une déclaration forte, car c’est pour
la première fois que l’Allemagne signifie son soutien clair et net, sans
réserve, et depuis le plus haut niveau de l’Etat, à l’adhésion de la Roumanie à
l’espace Schengen. Cette déclaration fait suite à la déclaration du président
français Emmanuel Macron qui, à mi-juin, lors de la visite qu’il effectuait à
Constanta, avait à son tour clamé le soutien, sans réserve, de la France. Avoir
l’appui des deux principaux Etats de l’UE, des Etats qui avaient auparavant
exprimé, rappelez-vous, leurs réserves à ce sujet, cela représente un atout
majeur. »
Car Bucarest s’était en effet montré bon élève. Après avoir
intégré l’UE en 2007, la Roumanie s’attendait à pouvoir rejoindre l’espace
Schengen au mois de mars 2011, moment où elle remplissait déjà les conditions
techniques nécessaires. Malgré
tout, en dépit des échecs successifs enregistrés pendant tout ce temps, les
signaux positifs commencent à s’amonceler dernièrement. Helsinki et Copenhague,
deux capitales frileuses à l’égard de la candidature roumaine à l’espace
Schengen, semblent avoir changé de cap.
Invité sur les ondes de Radio Roumanie,
Radu Magdin, consultant et annaliste en
politique étrangère, pense que le moment de l’adhésion ne sera toutefois pas
pour demain : « Cela prendra du temps. Ne pensez pas que d’ici demain, ou même dans
quelques jours, le gouvernement hollandais dira, voilà, j’avais lu la
déclaration allemande, et comme nous sommes souvent d’accord entre nous, nous
allons leur emboîter le pas. Cela ne veut pas dire que la déclaration allemande
soit sans importance. Mais malgré cela, la réserve exprimée par les Pays-Bas à
l’égard de l’adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie à l’espace Schengen demeure.
Leur attitude ne semble pas avoir été ébranlée, ou du moins pas encore. »
Mais qu’est-ce qui va changer de fait une fois l’adhésion à l’espace
Schengen actée, qu’il s’agisse du transport des personnes ou des biens. A
nouveau, Radu Magdin : « Pratiquement, le contrôle à la frontière sera supprimé, qu’il s’agisse
des frontières terrestres, aériennes ou maritimes. On passe en voiture entre la
France et l’Espagne, sans s’arrêter. On passe en train entre la Belgique et l’Allemagne,
sans se rendre compte. C’est ainsi partout en l’espace Schengen. Pour les
transporteurs, la mise est autrement plus importante. Voyez-vou s, nos
frontières ont été submergées par l’afflux de marchandises depuis et vers l’Ukraine.
La Roumanie est devenue un véritable hub logistique pour l’Ukraine, au même
titre, voire davantage que la Pologne. Dès les premières semaines de guerre, les
postes de frontière entre la Roumanie et la Hongrie se sont agglomérés. On a vu
la frustration des transporteurs. Or, tous ces problèmes seraient résolus dès
que nous adhérerons à l’espace Schengen. »
Si les avantages d’appartenir à cette zone exempte de contrôle aux
frontières sont plus qu’évidentes, la question la plus ardue, celle de l’horizon
de temps nécessaire pour que la Roumanie adhère pour de bon à l’espace Schengen
demeure. Selon Radu Magdin, on avait déjà enregistré bon nombre de déclarations
politiques européennes favorables à l’adhésion de la Roumanie à cet espace,
sans que cela fasse avancer le dossier. La Commission européenne confirme
périodiquement la justesse de la demande de la partie roumaine. Ce qui n’a pourtant
pas infléchi la position hollandaise. Maintenant, il faudrait voir si les
Pays-Bas sauront passer outre ses mises de politique intérieure, et mettre de
côté ses propres intérêts, sur l’autel de l’intérêt commun, au bénéfice de la
solidarité européenne. Une solidarité qui se manifeste généralement à double
sens.
(Trad.
Ionut Jugureanu)