Deuxième mandat pour Emmanuel Macron
Le
monde occidental a poussé un long soupir de soulagement après l’annonce des
résultats officiels de l’élection présidentielle française, qui ont confirmé la
victoire d’Emmanuel Macron sur son adversaire d’extrême droite. Une chose est
sûre : une éventuelle victoire de Marine Le Pen, perçue comme proche de la
Russie de Vladimir Poutine, aurait été accompagnée de changements majeurs dans
la politique étrangère de la France. En effet, son agenda politique comprenait,
entre autres, le retrait de la France du Commandement conjoint de l’OTAN, la
révision des relations de Paris avec Washington, mais aussi l’arrêt de la
coopération industrielle avec l’Allemagne dans le domaine de l’armement. Et le
président russe aurait été, à coup sûr, le principal bénéficiaire d’une crise à
l’intérieur de l’Union, écrit à l’unisson la presse européenne.
Corina Cristea, 06.05.2022, 07:56
Le
monde occidental a poussé un long soupir de soulagement après l’annonce des
résultats officiels de l’élection présidentielle française, qui ont confirmé la
victoire d’Emmanuel Macron sur son adversaire d’extrême droite. Une chose est
sûre : une éventuelle victoire de Marine Le Pen, perçue comme proche de la
Russie de Vladimir Poutine, aurait été accompagnée de changements majeurs dans
la politique étrangère de la France. En effet, son agenda politique comprenait,
entre autres, le retrait de la France du Commandement conjoint de l’OTAN, la
révision des relations de Paris avec Washington, mais aussi l’arrêt de la
coopération industrielle avec l’Allemagne dans le domaine de l’armement. Et le
président russe aurait été, à coup sûr, le principal bénéficiaire d’une crise à
l’intérieur de l’Union, écrit à l’unisson la presse européenne.
En
revanche, la réélection d’Emmanuel Macron inscrit dans la continuité les
grandes orientations économiques, européennes et internationales de la
politique française. Après un quinquennat marqué par des crises qui ont secoué
le pays, tels que le mouvement des gilets jaunes ou la pandémie de COVID-19, le
président Macron ne se prive pas de revoir à la hausse ses ambitions, qu’il
annonce par ces paroles : « Par des investissements et des changements
profonds pour assurer des projets concrets au bénéfice de tous, encourager la
créativité et l’innovation dans notre pays, et faire de la France une grande
nation écologique. Je sais que beaucoup de nos compatriotes ont voté pour moi
non pas pour soutenir les idées que j’avance, mais pour bloquer celles de l’extrême
droite. Je veux les remercier et leur dire que j’ai conscience que votre
confiance m’engage pour les années à venir », avait déclaré le dirigeant de
l’Elysée après sa réélection.
Dans
son premier discours post-victoire, Macron a promis une « voie
révolutionnaire » pour diriger la France, assurant que « personne ne
sera laissé de côté ». Mais quels en seront les enjeux dans les 5
prochaines années ? Les Français attendent tout d’abord des mesures qui boostent
le pouvoir d’achat, affecté par la crise sanitaire, puis par la crise
énergétique, la guerre en Ukraine et les sanctions européennes imposées à la
Russie, tous ces événements qui ont bouleversé l’ensemble du marché européen et
même mondial, précise la correspondante de Radio Roumanie à Paris, Daniela
Coman.
Daniela
Coman : « Emmanuel Macron a un programme plutôt complexe de
mesures sociales, pour aider les personnes défavorisées, les mères
célibataires, les autres groupes défavorisés, et il vise aussi la modernisation
des relations de travail. Il s’est par ailleurs engagé à placer l’écologie et
la lutte contre les changements climatiques au cœur de l’action
gouvernementale. L’éducation et la santé connaîtront des réformes profondes et
bénéficieront d’investissements-record, visant à accroître la facilité d’accès à
ces services, notamment de ceux qui en sont privés. Ensuite, il s’est engagé à
renforcer et à investir dans les forces armées, dans les équipements de haute
technologie, et de doubler le nombre de réservistes, pour que la France puisse
assurer son indépendance en matière de défense et pour qu’elle soit en mesure
de faire face à une guerre de grande intensité, qui pourrait frapper le
continent européen, mais aussi au défi des menaces hybrides et des cyberattaques.
»
Pour
mener à bien ces objectifs ambitieux, le président Macron aurait néanmoins
besoin d’une majorité amie au Parlement, et surtout d’un gouvernement qui ne
lui soit pas hostile. Or, la bataille politique ne s’est pas achevée le soir du
24 avril passé, car l’élection présidentielle sera suivie de deux tours d’élections
législatives, prévus en juin.
Mais qu’en
est-il de l’Europe et du rôle que la France se voit jouer dans la construction
européenne ? Invité sur les ondes de Radio Roumanie, l’analyste de
politique étrangère Stefan Popescu s’est exprimé au sujet du leadership
européen de la France et de la politique étrangère que la France entend mener. Car
il reste encore à voir jusqu’à quel point la France saura s’imposer en Europe
après l’adoption par le Bundestag de cet extraordinaire crédit de défense de
plus de 100 milliards de dollars. Selon l’analyste roumain, la France aura du
mal à pouvoir étaler des investissements comparables en matière de défense,
compte tenu de la dette publique, qui s’élève à 120% de son PIB.
Stefan Popescu :
« Cela va légèrement bouleverser l’équilibre
européen à moyen terme, et l’on observe déjà un processus de réflexion sur le
sujet en France, on l’a vu dans les débats des médias français. Car l’Union
européenne est une construction fondée sur un rapport de forces, dans lequel
l’Allemagne est le premier violon économique, et la France compense par son
appartenance permanente au Conseil de sécurité de l’ONU et par ses forces
militaires, y compris conventionnelles. Cependant, si l’Allemagne rompt cet
équilibre, je ne sais pas si la France accepterait le rôle de partenaire junior
de l’Allemagne. Les défis européens sont nombreux à l’agenda de Macron et j’ignore
dans quelle mesure Paris saura reconstruire un leadership dans ce paysage
européen bouleversé. Car l’idée de base demeure l’autonomie stratégique
européenne. Par conséquent, l’Europe devrait devenir un pôle de puissance,
censé constituer une sorte de troisième voie entre la Chine et les États-Unis. Or,
avec le retour des États-Unis sur le Vieux continent, un retour justifié, bien
sûr, compte tenu de la menace venue de l’Est, j’ignore dans quelle mesure la
France arriverait à mener ses projets à bien, du moins dans leur forme initiale.
»
Quoi qu’il en
soit, pour l’heure, Emmanuel Macron, président d’une France qui détient la
présidence tournante de l’UE, demeure l’un des dirigeants les plus écoutés dans
le contexte de grande instabilité mondiale, marqué par les actions d’une Russie
toujours aussi imprévisible. (Trad. Ionuţ Jugureanu)