Les décharges sauvages, un fléau sans cure ?
La quantité de déchets générés dans le monde
passera de 2.010 millions de tonnes en 2016, à 3.400 millions de tonnes en
2050, selon les estimations de la Banque mondiale. C’est dire combien les
systèmes de recyclage sont mis à rude épreuve. Toute la question est de
comprendre dans quelle mesure ils sont préparés à cette augmentation en flèche
de la quantité des déchets à traiter.
Corina Cristea, 15.07.2022, 08:22
La quantité de déchets générés dans le monde
passera de 2.010 millions de tonnes en 2016, à 3.400 millions de tonnes en
2050, selon les estimations de la Banque mondiale. C’est dire combien les
systèmes de recyclage sont mis à rude épreuve. Toute la question est de
comprendre dans quelle mesure ils sont préparés à cette augmentation en flèche
de la quantité des déchets à traiter.
Les statistiques sur la gestion des déchets municipaux
solides dans l’UE font état de grandes disparités entre les États membres. Mais
ce qui saute aux yeux sont les disparités entre les quantités de déchets mises
en décharge et celles destinées au recyclage. La mise en décharge, qui est la
pire « option » en matière de gestion des déchets, semble avoir
malheureusement encore le vent en poupe dans certains États membres. En
Roumanie, la collecte sélective bat de l’aile, tandis que le traitement des
déchets recyclables ne se porte guère mieux. La Roumanie occupe d’ailleurs une
bien méritée avant-dernière place de la classe dans l’UE, avec un taux quatre
fois inférieur à la moyenne européenne en matière de recyclage. Cette dernière
souffre à son tour, se situant autour de 47 % du total des déchets, bien
en-deçà de l’objectif assumé pour 2020, soit celui de 50 %. Un nouveau bilan
sera réalisé en 2025, l’Union visant alors le seuil de 55% de déchets recyclés.
Objectif difficile, s’il en est, pour la Roumanie, qui bataille ferme contre les
décharges illégales et autres pratiques peu orthodoxes. Qui plus est, au défi
du traitement des déchets locaux s’ajoute encore le fléau des importations
illégales de déchets en provenance d’Europe occidentale.
En effet, le prix payé par les entreprises
occidentales pour faire traiter leurs déchets en Roumanie est beaucoup plus
avantageux, et des entreprises de recyclage indélicates se sont engouffrées dans
la brèche, mues par l’appât du gain et le besoin des matières premières obtenues
grâce au recyclage de ces volumes supplémentaires de déchets. Par ailleurs, sous
prétexte de recyclage, des tonnes de déchets entrent allègrement dans le pays,
pour finir par être déversées dans des champs ou brûlées illégalement dans des
décharges sauvages.
La Roumanie a plus que jamais besoin de véritables
campagnes de sensibilisation et d’une véritable politique de gestion des
déchets, clament à l’unisson les militants écologistes.
S’exprimant à ce sujet sur les ondes de Radio
Roumanie, le ministre de l’Environnement, Tánczos Barna, estime que le
changement de mentalité est la pierre angulaire d’un changement de paradigme et
évoque les initiatives prises par ses services à cet égard.
Tánczos Barna : « Le changement de
mentalité s’avère un processus long et difficile. C’est pourquoi nous avons
commencé à viser dans nos campagnes le public jeune et très jeune, nous
commençons à l’école, grâce au projet « la Roumanie instruite », nous
partageons l’information dans chaque classe, dans chaque école, jusqu’à la fin
de l’année scolaire. On parlera aux enfants, 10 minutes, 15 minutes, on leur présentera
l’importance de la collecte sélective, l’importance de jeter ces déchets dans
des endroits spécialement aménagés. Nous introduisons l’année prochaine une « semaine
verte »dans le programme scolaire, soit une semaine consacrée au respect
de l’environnement, une semaine dédiée non seulement au traitement des déchets,
mais aussi à la manière dont nous nous respectons la forêt, dont nous prenons
soin des habitats, des espèces, de la biodiversité. Il faut donc aller dans les
écoles, car les enfants sont 10 fois, peut-être 100 fois plus réceptifs aux
campagnes de sensibilisation de ce genre, et j’espère qu’ils sauront éduquer ensuite
les adultes, qui s’avèrent souvent bien plus irresponsables que les
enfants. »
Parallèlement aux campagnes de
sensibilisation, une vaste campagne nationale de nettoyage a également été
lancée par le ministère de l’Environnement, une campagne où les autorités
locales, les institutions et les organisations non gouvernementales, tout comme
monsieur et madame Tout-le-monde ont vocation à s’y impliquer. Une telle action
intervient dans les conditions où les commissaires de la Garde de l’environnement
identifient presque quotidiennement des endroits où des déchets sont abandonnés
à la sauvette, où aucune mesure n’est prise au niveau local en faveur de
l’assainissement, affirme le ministre Tánczos Barna.
Tánczos Barna : « Il y a des
dizaines de milliers d’emplacements où l’on trouve des déchets abandonnés. Nous
aurions probablement besoin de milliers de bénévoles pour arpenter les rues, parcourir
les champs et les bois, pour identifier et assainir ces décharges sauvages.
C’est pourquoi, pour assainir ce pays, pour assainir la Roumanie, nous avons
besoin avant tout du soutien des autorités locales. Au-delà de ce soutien, nous
aurons certainement besoin d’un changement de mentalité, car nous allons
d’abord nettoyer, mais ensuite nous allons devoir garder ces lieux propres. »
Au-delà de ces initiatives de grande
ampleur, les autorités doivent aussi fournir des efforts pour améliorer
l’infrastructure de la collecte sélective, afin que les pneus et les plastiques,
par exemple, puissent être recyclés, que les textiles et autres matériaux
recyclables puissent retourner dans l’économie circulaire et que le volume des
déchets non traités diminue progressivement. Car les déchets correctement
traités constituent une matière première indispensable à l’économie circulaire.
La législation vient d’inclure des mesures pour criminaliser les actes ayant un
impact significatif sur l’environnement, la qualité de l’air et la santé
publique. (Trad. Ionuţ Jugureanu)