La fin de la pandémie serait pour quand?
Si la pandémie a pris de court et a bouleversé le monde, elle a aussi posé un gros défi aux chercheurs de tous les pays, pour qu’ils trouvent le Graal sous la forme du vaccin tant espéré. Et dans une mobilisation sans précédent, à moins d’un an après le premier cas déclaré, voici la potion magique qui arrive sur le marché, sous les bannières conjointes de la compagnie américaine Pfizer et de l’allemande BioNTech. Le vaccin de Moderna suit de près le premier couple. Dorénavant, rien ne semble pouvoir gripper la machine censée mettre un terme à la pandémie qui avait endeuillé la planète, si ce n’est la réticence du public face à l’usage du vaccin, ou encore les éventuels couacs dans la chaîne d’approvisionnement, considèrent les experts. L’interrogation qui flotte dans l’air se réfère toujours au moment précis où l’on pourrait considérer avoir mis un terme à la pandémie.
Corina Cristea, 22.01.2021, 13:11
Sur Radio Roumanie, le médecin Emilian Popovici, vice-président de la Société roumaine d’épidémiologie, détaille ce que les spécialistes entendent par immunité collective. Emilian Popovici : « Les spécialistes recommandent la vaccination d’au moins 60% de la population globale, au cours de cette année, et que l’on fasse un maximum pour éviter les contacts et réduire la prévalence de l’épidémie, tout cela pour réduire au minimum les risques de mutation du virus dans l’intervalle. Car plus la transmission est importante, plus les chances de voir apparaître des variants augmentent, ainsi que l’on a récemment constaté au Royaume-Uni. Il faudrait donc poursuivre de front ces deux objectifs : 60% des gens immunisés dans les 12 prochains mois et bien contrôler la transmission pendant ce temps. Et si l’on arrivait à faire vacciner plus de 70% de la population globale, à ce moment-là, l’immunisation collective fera le reste pour mettre un terme à la pandémie. »
Selon la prestigieuse revue Science, la recherche et le développement du vaccin contre le nouveau coronavirus, en un si bref laps de temps, représente l’événement scientifique majeur de 2020. Le docteur Marius Geantă, président du Centre pour l’innovation en médecine, mentionne quelques-uns des facteurs qui ont permis l’exploit :« Parlons tout d’abord des technologies qui ont permis la mise à jour de la séquence intégrale du génome du nouveau coronavirus. Le séquençage génomique des souches, l’analyse des données, ce sont des techniques arrivées à maturité, qui ont permis de « connaître » le virus 30 jours après la déclaration du premier cas officiel. C’est six fois plus rapide de ce que l’on était habitué en la matière. Le séquençage du génome a été publié le 10 janvier 2020. Et c’est dès cette date que la communauté scientifique mondiale s’est lancée dans la course au vaccin : concevoir le vaccin, mener tambour battant les tests cliniques, et jusqu’à sa commercialisation. Dès le mois de janvier l’on était là, à l’étape où, auparavant, l’on n’aurait été qu’au mois de juin ou de juillet. Un gain de presque six mois, arraché dès le départ donc. Pour ce qui est de la deuxième étape, celle de la mise au point du vaccin, il s’agit là aussi de l’utilisation d’une technologie qui n’est plus à un stade expérimental, d’une technologie qui n’est peut-être pas à son azimut non plus, mais qui est déjà bien maîtrisée. C’est la technologie qui fait usage de l’ARN messager, sur laquelle repose le premier vaccin mis sur le marché, et qui a reçu l’aval provisoire des autorités sanitaires de l’UE : le vaccin de Pfizer-BioNTech. Une technologie qui avait été imaginé il y a 30 ou 40 ans déjà, et qui comptait plus de mille études cliniques aux Etats-Unis, mais qui était encore et toujours balbutiante. Or, dans le contexte de l’urgence qu’imposait la crise sanitaire actuelle, l’intérêt pour cette technologie est monté en flèche. Et là, l’on peut parler d’un troisième niveau d’innovation scientifique : celle qui touche aux institutions. Parce que, voyez-vous, nous étions habitués à ce que l’enrôlement des 44 mille personnes, impliquées dans les essais cliniques de phase 3 du vaccin Pfizer – BioNTech, se déroule sur un laps de temps beaucoup plus étendu. Rallonger la période c’est diluer aussi les risques, y compris financiers. Or, là, on y est allé, les moteurs tourés à plein régime. En même temps, le nombre de gens impliqués dans les essais cliniques reste significatif. Et l’innovation vient de là : on s’est montré prêt à assumer ce risque. Les autorités de régulation et les compagnies privées ont joué le jeu, agissant de concert. Enfin, 4e élément : les autorités, qui ont agréé de laisser tomber les barrières bureaucratiques dont l’un des effets était de retarder la mise sur le marché du produit. »
Cela dit, la mise sur le marché accélérée du vaccin anti-Covid n’est pas synonyme de risque accru. Ce qu’il importe actuellement, c’est que la vaccination se fasse dans les plus brefs délais et que des mesures soient toujours prises pour contenir la transmission. C’est la voie suivie paraît-il en Israël, pays qui se targue de vacciner 1% de sa population tous les jours. Dragoş Ciocîrlan, correspondent de Radio Roumanie en Israël : « La population d’Israël a tôt fait de comprendre l’utilité de la vaccination rapide, déroulée en masse. Mettre un terme à la pandémie signifie pouvoir redémarrer l’économie avant les fêtes de Pâques. L’on estime qu’à peu près l’entièreté de la population israélienne soit vaccinée à la mi-mars. Il s’agit en outre d’une priorité nationale, car la santé publique demeure une priorité de la stratégie nationale d’Israël. Depuis quelques jours, les unités armées ont débuté la vaccination. J’ignore les chiffres exacts, mais, ce qui est sûr, c’est que les unités militaires doivent maintenir leurs capacités opératives. Et cela semble correspondre aux attentes. En effet, pas d’agglomération, rien. Aux centres de vaccination, tout roule, depuis le contrôle d’identité et jusqu’à l’issue du processus. » Dans l’UE, la campagne de vaccination a été officiellement lancée le 27 décembre passé, le nombre de doses étant distribuées de manière équitable, en fonction de la population de chaque Etat membre. (Trad. Ionuţ Jugureanu)