Le télétravail : quel avenir sur le long terme ?
Réglementé il y a deux ans, le télétravail a pris des galons ces derniers mois, remplissant l’objectif premier de la vie en pandémie : assurer la distanciation physique. Si le 16 mars, le jour de la déclaration de l’état d’urgence en Roumanie, 15 mille contrats de travail comprenaient déjà des clauses prévoyant du télétravail, deux mois plus tard ce nombre s’est vu tripler. Une étude réalisée par Colliers International dans les pays de la région, dont la Roumanie, a mis en évidence que, pour quelque 40% des répondants, faire du télétravail n’était pas commode. Les rencontres entre collègues semblent leur manquer le plus, alors que 67% des répondants accusent l’absence de frontière précise entre vie privée et vie professionnelle. Malgré tout, plus de la moitié des Roumains qui ont expérimenté le télétravail, apprécient avoir gardé la même productivité qu’en temps normal, alors que 23% pensent même avoir vu leur productivité augmenter.
Corina Cristea, 07.08.2020, 09:45
Réglementé il y a deux ans, le télétravail a pris des galons ces derniers mois, remplissant l’objectif premier de la vie en pandémie : assurer la distanciation physique. Si le 16 mars, le jour de la déclaration de l’état d’urgence en Roumanie, 15 mille contrats de travail comprenaient déjà des clauses prévoyant du télétravail, deux mois plus tard ce nombre s’est vu tripler. Une étude réalisée par Colliers International dans les pays de la région, dont la Roumanie, a mis en évidence que, pour quelque 40% des répondants, faire du télétravail n’était pas commode. Les rencontres entre collègues semblent leur manquer le plus, alors que 67% des répondants accusent l’absence de frontière précise entre vie privée et vie professionnelle. Malgré tout, plus de la moitié des Roumains qui ont expérimenté le télétravail, apprécient avoir gardé la même productivité qu’en temps normal, alors que 23% pensent même avoir vu leur productivité augmenter.
Cette nouvelle efficacité retrouvée n’a pas échappé aux chefs d’entreprises, qui ne rechigneraient pas devant l’idée de poursuivre l’expérience. Mais, serait-ce une option viable sur le long terme ? Carmen Avram, eurodéputée social-démocrate roumaine, a bien voulu se pencher sur la question, sur les ondes de Radio Roumanie.: « Je parie que le télétravail sera progressivement embrassé dans toute l’UE. On l’a vu, l’efficacité du travailleur augmente, chose a priori paradoxale. Et je crois qu’il faudrait approfondir davantage le sujet. Ce qui est certain, c’est que là où cela est possible, les gens qui font du télétravail se débrouillent très bien. Parlons un peu de la stratégie européenne. Le budget qui se dessine pour les sept années à venir sera centré sur la stratégie du Pacte vert. Qu’est-ce qu’il prévoit ? La réduction des émissions, la baisse de la pollution. Or, faire faire aux gens le même nombre de trajets domicile/travail et retour comme auparavant, cela serait impensable. Il faudrait donc revoir la copie, et essayer de poursuivre la pratique du télétravail, là où cela serait possible. On envisage ainsi de réduire les émissions, tout en gardant une productivité de haut niveau. Les gens respectent les dates butoir, ils arrivent à bien remplir leurs obligations professionnelles. Donc, du point de vue de ce Pacte, mais aussi du point de vue de l’employeur, il s’agit d’éléments très positifs. »
Mis à part l’endroit choisi comme lieu de travail, le télétravail présuppose néanmoins l’existence d’une certaine infrastructure technologique et de communication. Ce n’est que de la sorte qu’un niveau de haute productivité puisse être garanti. Cela présuppose aussi la maîtrise de certaines habilités, ainsi que la capacité de changer les modèles habituels d’interaction professionnelle.
Pour y voir plus clair dans ces domaines, écoutons l’avis d’un spécialiste en RH, Sorin Faur : « La réussite d’une telle entreprise relève moins des capacités technologiques dont l’on dispose, que de notre état d’esprit, de notre perspective. Quant au manager, en télétravail, en situation de communiquer à distance, son rôle devient encore plus essentiel qu’à l’accoutumée. Parce qu’il doit remplir des tâches nouvelles, des charges dont il n’avait pas l’habitude. Partager le même espace au travail, c’est différent. On se voit, on décode le langage non verbal de l’autre, on s’observe. Or, le travail à distance c’est une autre paire de manches. Prenez une équipe de 15 personnes. Chacune travaille depuis chez soi. Vous n’avez plus de contacts entre les gens, plus rien. Le rôle du manager change complètement. Il devient un nœud de communications. »
Selon le sociologue Mircea Kivu, le télétravail apporte sans doute des facilités, mais aussi pas mal d’inconvénients :« L’homme est un être social par excellence. Il a besoin d’interactions. Et pas qu’au téléphone ou par Skype ; les gens ont besoin de cette proximité physique pour bâtir une équipe. Aboutir à former une équipe, cela confère des avantages, mis en évidence par les dizaines d’années d’études dans le domaine des ressources humaines. Transférer le travail à domicile, nous fait perdre ces avantages. Sachez qu’il y a eu des expériences qui ont été menées bien avant cette pandémie, lorsque de grandes entreprises avaient évalué la possibilité d’implémenter le télétravail, ne fut-ce que pour une partie de leur personnel. Pour ce qui est de l’infrastructure, cela s’est avéré bien évidemment possible. Mais l’on a constaté que les employés ressentaient très vite le besoin de se retrouver ensemble. Il faut donc trouver la parade, pour contrer les inconvénients du système qu’implique le travail à domicile. Et je pense surtout aux formations, censées développer l’esprit d’équipe, et qui soient organisées régulièrement au profit des ceux qui sont réduits à pratiquer le télétravail sur le long terme. »
L’avenir du télétravail demeure sujet à caution. Ce que l’on sait en revanche de façon à peu près certaine, c’est que Bucarest est la meilleure ville au monde pour pratiquer le télétravail, selon les données qui ressortent de l’Indexe réalisée par les Britanniques de Broadband Deals. Ils ont analysé 50 grandes villes à travers le monde, en prenant comme principaux critères la vitesse moyenne des communications par internet, les services disponibles pour livrer des repas à domicile, le nombre disponible d’emplois à distance, le prix d’achat d’un ordinateur portable ou encore le coût de la vie. En lice, après Bucarest, on retrouve trois métropoles américaines, Huston, Las Vegas et Atlanta, suivies par Budapest.(Trad. Ionut Jugureanu)