Mark Zuckerberg devant le Congrès américain
De son intervention devant les élus américains, nous retiendrons deux choses: primo, Mark Zuckerberg ne s’opposerait pas à réglementer Internet, phénomène qu’il estime « inévitable » à terme, vu aussi l’importance croissante que prend Internet. Secundo, il a présenté des excuses publiques, pour n’avoir pas correctement protégé les données personnelles fournies par les utilisateurs de son réseau de socialisation.
Corina Cristea, 04.05.2018, 14:11
De son intervention devant les élus américains, nous retiendrons deux choses: primo, Mark Zuckerberg ne s’opposerait pas à réglementer Internet, phénomène qu’il estime « inévitable » à terme, vu aussi l’importance croissante que prend Internet. Secundo, il a présenté des excuses publiques, pour n’avoir pas correctement protégé les données personnelles fournies par les utilisateurs de son réseau de socialisation.
Mark Zuckerberg : « Facebook est une compagnie idéaliste et optimiste. Le plus clair de notre existence, nous nous sommes concentrés sur le côté bénéfique que revêt la mise en relation des gens. Encore récemment nous avons vu que les mouvements #metoo et « Marchons pour nos vies » ont pris corps grâce, en bonne partie, à Facebook. Suite à l’ouragan Harvey, les gens ont récolté plus de 20 millions de dollars au bénéfice des victimes. Dans un autre registre, plus de 70 de millions de PMEs utilisent Facebook aujourd’hui : pour se développer et pour créer de nouveaux emplois. Mais il nous apparaît clairement maintenant que nous avons fait trop peu pour prévenir une utilisation indélicate, malintentionnée, de cet instrument formidable. Diffuser de fausses informations, permettre l’implication d’intérêts étrangers dans nos élections, publier des discours haineux, ne pas avoir suffisamment protégé la confidentialité des données personnelles, dans tous ces domaines, nous avons failli à notre devoir. Il s’agit d’une énorme erreur de jugement, nous ne nous étions pas rendu compte de l’impact que cela pouvait avoir. C’est mon erreur, et je le regrette. »
L’audience devant le Congrès survient dans le contexte du scandale Cambridge Analytica, compagnie britannique qui a collecté les données des dizaines de millions d’utilisateurs Facebook, des données utilisées pour comprendre les profils psychologiques individuels des électeurs américains et pour faire pencher la balance en faveur de Donald Trump ou encore, dans un autre contexte, en faveur du vote pour le Brexit.
Il nous faudrait réévaluer la relation que l’on a avec nos utilisateurs, et ce dans toutes ses dimensions, et nous assurer de pouvoir correctement assumer nos responsabilités, a encore déclaré devant le Congrès américain le fondateur de Facebook.
Mark Zuckerberg : « Il ne suffit pas que l’on mette les gens en lien, les uns avec les autres. Il nous faut nous assurer que les relations créées soient positives. Il ne suffit pas de mettre à disposition des gens une plateforme où ils puissent s’exprimer. Il nous faut nous assurer que ses usagers ne l’utilisent pas à mauvais escient, pour désinformer, pour se faire mal. Il ne suffit pas d’offrir aux gens la possibilité de décider ce qu’il advient de leurs données. Il faut aussi s’assurer que ceux qui en bénéficient les protègent à leur tour ».
Aussi, parmi les utilisateurs floués dans l’affaire Cambridge Analytica, on retrouve des Roumains. Convié par Radio Roumanie, Bogdan Botezatu, féru des menaces informatiques chez BitDefender, énumère les menaces potentielles qui guettent les données personnelles postées en ligne, et détaille l’affaire Cambridge Analytica : « C’est qu’en ce moment, les données et les informations sur les utilisateurs sont une sorte de nouvelle forme d’or noir. Toute compagnie qui se respecte un tant soit peu va collecter des données télémétriques, va agréger des informations, va acheter des informations détenues par d’autres compagnies et va les agréger. On fait cela contre de la monnaie sonnante et trébuchante, on essayera de gagner grâce à la publicité. Je parle là de la vente des produits. Ce qui distingue l’affaire Facebook, c’est que, dans ce cas, on nous a « vendu » des présidents, des candidats politiques, et peut-être des messages pour quitter, le cœur léger, l’Union européenne. C’est à peu près la seule différence : on a abandonné la vente de produits, on nous a vendu des candidats aux élections ».
Il paraît que les données personnelles de près de cent mille Roumains ont été collectées ainsi.
Pourrait-on distinguer le profil du Roumain vulnérable ou encore du « résistant » ? Bogdan Botezatu : « J’estime que, face à ce type de menaces, on est aussi vulnérable que la plupart des autres pays, des autres populations qui ont accès à cette technologie. Pour cette situation, on a tiré maintes fois la sonnette d’alarme, même si on n’avait pas utilisé le terme de « fake news ». Qu’il y ait eu des Roumains précisément ciblés par l’application Cambridge Analytica, cela montre un intérêt certain. Sur Internet, on peut cibler une population spécifique, et en adapter le message. Au départ, les utilisateurs gagnaient un dollar pour installer cette application et pour participer au sondage. Il va donc de soi que Cambridge Analytica avait identifié quelques centaines, voire quelques milliers de Roumains prêts à prendre part à leur étude bidon. Ils ont donc rencontré là un certain intérêt. Ils ont payé des gens pour y participer. C’est donc qu’ils ont envisagé collecter des données sur les Roumains, dessiner leurs profils psychologiques, probablement dans l’éventualité de dénicher un client potentiel, que ce soit parmi les personnages politiques, les organisations, peu importe de qui il s’agissait au fond. C’était à prendre tous ceux qui auraient été prêts à faire des affaires, à dérouler une campagne menée par ou avec Cambridge Analytica. »
Malheureusement, avoue Bogdan Botezatu, il nous est impossible de créer un programme qui mette en échec ce genre d’applications. (Trad. Ionut Jugureanu)