La Syrie – un conflit encore loin de s’éteindre
Plus de 250.000 morts et 12 millions de personnes qui ont quitté le pays – c’est le bilan, encore provisoire, de la situation en Syrie, zone d’affrontements entre les rebelles qui s’opposent au régime de Damas et les forces loyales à Bachar al-Assad. Cette situation, dont l’impact sur la sécurité régionale et européenne est important, s’est compliquée davantage au moment où Moscou a répondu à la demande du leader syrien de lancer des bombardements contre ses adversaires.
Corina Cristea, 23.10.2015, 13:20
Acteur important dans ce conflit, Washington soutient les rebelles. Les Américains ont pourtant un ennemi en commun avec le régime de Damas: les djihadistes de l’Etat Islamique auto-proclamé et les milices d’al-Qaïda actives dans la zone. Malgré leurs opinions divergentes, Moscou et Washington ont néanmoins réussi à aboutir à un accord visant à éviter des incidents regrettables entre les parties sur le front syrien.
Le correspondant de la Radio publique roumaine à Moscou, Alexandr Beleavski, explique: « Il s’agit d’un mémorandum censé «prévenir des incidents et sécuriser les vols lors de l’opération en Syrie». Le document gère les actions des avions de combat et des drones dans les zones de combat du ciel syrien. «Le mémorandum recèle les règles et restrictions complexes permettant de prévenir des accidents entre les appareils russes et américains», a déclaré le ministère russe de la Défense. D’après le mémorandum, les pilotes de la coalition contre les terroristes de Daesh en Syrie doivent aussi obéir à ces règles. Le ministère russe de la Défense déclare, en même temps, que les forces russes se trouvent légalement en Syrie, à l’invitation des autorités de ce pays, ce qui n’est pas le cas de la coalition dirigée par les Etats-Unis. »
Les opérations militaires russes en Syrie sont devenues plus intenses après le déclenchement de l’offensive terrestre de l’armée syrienne. Selon le ministère russe de la Défense, l’aviation russe a détruit des centaines d’objectifs de Daesh et d’autres organisations terroristes, qui sont en déroute et au sein desquelles on commence déjà à enregistrer des déserteurs.
Les succès de l’armée syrienne sont pourtant modestes dans les villes qui ne font pas l’objet de frappes aériennes russes, les islamistes disposant de positions bien défendues et de réseaux de communications souterraines très bien développés.
A quoi ressemble la situation en Syrie vue depuis Washington ? Nous écoutons la correspondante de la Radio publique roumaine aux Etats-Unis, Doina Saiciuc : «L’Administration américaine essaie de relancer les négociations de paix pour la Syrie avec la Russie, la Turquie, l’Arabie saoudite et potentiellement même avec l’Iran. Ce sont des négociations censées mener à la cessation des combats entre l’armée du président Assad et les forces modérées d’opposition et permettre à toutes les parties de se concentrer pour vaincre les militants de l’Etat islamique. Au Département d’Etat, le porte-parole John Kirby a insisté que le Mémorandum d’accord entre le Département américain de la Défense et le ministère russe de la Défense sur les règles de navigation en sécurité dans l’espace aérien syrien des pilotes de la coalition ne modifie pas l’objectif des Etats Unis d’une transition politique en Syrie, donc le départ du président Assad du pouvoir. »
« Si vous regardez les cibles que la Russie continue de frapper et le soutien qu’elle accorde au régime syrien sur le terrain, la seule conclusion à laquelle vous pouvez arriver, c’est que la Russie entend soutenir le régime Assad. Cela ne fera qu’exacerber le conflit, enflammer les tensions sectaires et conduire à plus d’extrémisme là-bas et dans d’autres parties e la région. Je veux le dire sans équivoque, la signature du mémorandum important pour la sécurité des pilotes ne fait rien pour calmer nos inquiétudes sur les activités militaires russes en Syrie », a ajouté John Kirby.
D’autre part, la Maison Blanche a critiqué la Russie après la visite, cette semaine, du président syrien Bashar al-Assad à Moscou, pour y rencontrer le président Vladimir Poutine. « Nous voyons la réception sur tapis rouge d’Assad, qui a utilisé des armes chimiques contre son propre peuple, en contradiction avec le but déclaré par les Russes pour une transition politique en Syrie », a affirmé le porte-parole de la Maison Blanche, Eric Schultz. Bucarest considère que la paix en Syrie ne peut être rétablie que par le dialogue.
Le président Klaus Iohannis : « Le fait que la Russie se soit engagée militairement en Syrie n’aide pas à solutionner la crise, mais complique la situation, selon nous. La seule voie d’issue à cette crise, c’est celle de la négociation. C’est le point de vue officiel de la Roumanie et ce point de vue, nous le faisons connaître partout. Ce point de vue n’est pas simplement théorique. La Roumanie compte parmi les seuls pays qui ait encore du personnel à son ambassade de Damas. Nous ne sommes pas un des grands acteurs, mais vu que nous sommes là, nous pouvons faciliter les discussions pouvant conduire à la paix dans la région. »
L’intervention de la Russie en Syrie est considérée par certains analystes comme une tentative de Moscou de modifier le paysage stratégique au Proche Orient, Vladimir Poutine profitant d’une réaction faible de l’Administration américaine pour restaurer le rôle que la Russie a perdu dans cette région dans les années ’70. (Trad. Dominique, Ligia Mihaiescu)