Quelles conséquences psychologiques et émotionnelles de la pandémie sur les enfants ?
Christine Leșcu, 01.12.2021, 11:51
Silviu Morcan, président du Conseil National des Elèves nous détaille les
résultats : « Nous avons constaté que la sensibilisation à la
question de la transmission des maladies a été très bien réalisée au sein de la
plupart des écoles. Près de 86% des élèves ont affirmé avoir compris
l’intégralité des informations transmises par le personnel de leur
établissement. Seul un petit pourcentage estime avoir eu besoin de davantage
d’informations pour comprendre comment endiguer la propagation du virus
SARS-COV-2, ou affirment ne pas du tout avoir été informés sur le sujet. Les
campagnes de vaccination qui auraient dû être organisées dans les écoles ont
très peu atteint les élèves. Un tiers d’entre eux, près de 36%, affirment que
d’autres types de campagnes ont eu lieu dans leur école ».
Dans de telles conditions, l’école est-elle perçue comme un lieu sûr du
point de vue sanitaire ? Silviu Morcan nous répond : « Le sentiment de sécurité des élèves au sein
de leur école est un autre sujet que nous avons souhaité aborder. Malgré la fréquence
élevée de passage aux cours en ligne suite à un cas covid dans une classe, nous
avons constaté que le sentiment de sécurité subsiste en grande partie à l’école.
La moyenne au niveau de l’échantillon étant de 3,53 points sur 5,5 indiquant
que l’élève considère que l’école est un lieu « entièrement sûr » et 1 « pas du
tout sûr ». La moitié des participants a indiqué ressentir un niveau élevé
de sécurité. Les réponses à la dernière question de notre enquête sont assez
diverses. La moitié des élèves souhaite passer aux cours en distanciel, et
l’autre moitié préfère les cours en présentiel, qu’elle estime être une
solution sûre. La répartition est la même au sujet du protocole sanitaire, par
exemple sur la question de la distanciation et du port du masque. Une
partie des participants souhaite voir ces mesures renforcées, l’autre les voir
disparaître. »
Difficile, avec tout cela, de
déterminer comment l’anxiété se manifeste de manière si insidieuse. Difficile
aussi d’en déterminer la cause exacte. De même, il est compliqué de savoir qui
de l’école ou du contexte global est à l’origine de cette anxiété. Quoi qu’il
en soit, les autorités admettent qu’il n’existe à ce jour aucun instrument
permettant de collecter les données relatives à l’état psycho-émotionnel des
élèves.
Mais,
selon Radu Szekely, conseiller au Ministère de l’Education, les professeurs
peuvent repérer certains signaux et tenter de désamorcer la situation à l’aide
du psychologue scolaire : « Suite à ces discussions, nous sommes
arrivés, grâce à l’aide de spécialistes, à la conclusion suivante :
l’anxiété est bien présente chez les enfants et adolescents dans les écoles,
mais elle ne fait pas l’objet d’assez de surveillance. Les enfants ne la
verbalisent pas. Elle s’exprime donc souvent par des gestes, des moments de
panique, parfois par un manque d’intérêt ou de concentration. Il arrive aussi
que les élèves posent certaines questions qui en cachent en fait d’autres, en
lien avec leur anxiété, mais que nous ne sommes pas capables de repérer sur le
coup, tout habitués que nous sommes à répondre directement à la question qui
nous est posée. Mais c’est le rôle du cadre enseignant et des parents de le
faire. Je reste aussi persuadé que le psychologue scolaire a un rôle à jouer et peut lui aussi observer les
signaux mentionnés plus tôt, afin d’identifier l’origine de l’anxiété et
l’apaiser. C’est très important car certains enfants et adolescents ont
tendance à somatiser leur anxiété. »
De
même, à la maison, les parents doivent rester attentifs, observer et discuter
avec leur enfant. Carmen Truțescu, psychiatre, explique que « notre
société nous encourage à refouler nos émotions, et les enfants n’ont pas la
possibilité de raconter ce qu’ils éprouvent : « Tout changement de
comportement ou d’habitude est un signe. Si un enfant a l’habitude de dormir 10
à 12 heures par nuit et qu’il se met à dormir 18 à 20 par nuit, ou à ne pas
dormir du tout, s’il change ses habitudes alimentaires, s’il est irritable,
c’est parce qu’il n’a pas les outils pour exprimer son anxiété. L’irritabilité
est un indicateur important, il révèle que quelque chose ne va pas. Nous
n’avons pas, en tant que parents, la prétention de poser un diagnostic. Mais
nous sommes à même d’observer ces changements. Au-delà de l’anxiété, de la
dépression, de la difficulté à s’adapter, du harcèlement, le spécialiste qui
rencontre l’enfant est capable d’identifier sa souffrance. Il serait aussi
intéressant que le professeur participe à la consultation, afin d’avoir deux points
de vue différents. J’aimerais beaucoup que les professeurs soient en mesure
d’identifier certains comportements révélateurs : l’élève ne se lève pas
de sa chaise, n’interagit pas avec les autres, pleure, ne mange pas pendant la
pause déjeuner. Un enfant qui ne s’exprime pas en public, qui ne parle pas
devant ses camarades de classe a peut-être des troubles du développement ».
Cette coopération entre parents et professeurs à l’école pourrait être
permise grâce à une récente initiative législative : la création de cabinets de psychologue dans chaque
école. On pourrait ainsi consulter régulièrement
les élèves et il serait plus simple de trouver des solutions afin de
remédier à leurs troubles. A l’heure actuelle cette mesure fait l’objet d’un
débat au Parlement.(Trad. Charlotte Fromenteaud)