Zones à risque socio-éducatif
Les problèmes du système éducatif de Roumanie sont bien connus et débattus par tous, et ce depuis longtemps déjà. Parents, enseignants, pouvoirs publics, élèves – tous ont exposé leur point de vue et tentent dexpliquer entre autres pourquoi le phénomène de labandon scolaire est si profond en Roumanie. En 2020, il concernait 15,3% des enfants roumains, un taux plus élevé que la moyenne européenne. Qui plus est, bon nombre délèves roumains ont une mauvaise formation : 40% dentre eux sont des analphabètes fonctionnels, selon les chiffres de 2018. Cela veut dire que près de la moitié des élèves roumains, bien quils sachent lire et écrire, ne comprennent pas lessentiel dun texte. A tout cela sajoutent de très nombreux enseignants démotivés. Enfin, il faut aussi tenir compte des zones défavorisées du pays, où les familles sont très pauvres, ce qui a des conséquences néfastes sur léducation des enfants aussi.
Christine Leșcu, 02.12.2020, 13:09
Dans une tentative de mieux comprendre les raisons des faibles performances scolaires des élèves de Roumanie, lassociation Human Catalyst a créé « lIndicateur de Risque Socio-Educationnel », un instrument qui mesure les conditions qui favorisent les faibles résultats scolaires et la marginalisation sociale pour des raisons éducationnelles. 4 années durant, entre 2015 et 2019, lassociation a examiné les élèves du primaire et les collégiens denviron 4000 établissements scolaires sur lensemble du pays.
Les performances scolaires sont directement influencées par le milieu où les enfants vivent, constate Laura Greta Marin, directrice de lAssociation Human Catalyst : « Par des recherches de longue durée, des études théoriques et des déplacements sur le terrain, nous avons trouvé cette formule et cet algorithme qui réunit les données du domaine éducationnel et les informations sur le milieu où lenfant vit ou sur lécole à laquelle il étudie. Cest très important, parce que le contexte de vie a une influence significative sur les performances scolaires. Cest pourquoi notre préoccupation a été de trouver un indicateur fiable afin de lutiliser aux côtés de données officielles du système déducation. Par conséquent, notre indicateur est un instrument qui mesure les données provenant du milieu scolaire et celles du milieu où vit un enfant. »
Au bout de 4 ans de recherches, les résultats de lenquête ont été publiés dans létude intitulée « Lindicateur de risque socio-éducatif, une base pour des politiques responsables fondées sur des données. Analyse pour la période 2015 – 2019 ». Ce volume est complété par une carte en ligne qui présente en détail la situation dans chaque département du pays. A consulter sur http://hartairse.humancatalyst.ro
Quels sont concrètement les indicateurs analysés ? Le premier, cest le taux dabandon scolaire calculé en fonction du nombre délèves en rattrapage, exmatriculés ou dont la situation scolaire na pas été finalisée sur lensemble des élèves de chaque établissement scolaire. Laura Greta Marin poursuit son explication des critères de lanalyse : « Le niveau de formation des enseignants est exprimé par le nombre des profs dépourvus dune formation appropriée pour leur poste sur le total des enseignants dune école. Pour la performance des élèves, nous avons pris en compte le nombre des élèves qui ont participé à lEvaluation nationale et la moyenne de lécole question pour les élèves participants à lévaluation. On a aussi calculé le niveau de développement social et économique de la région ou de la ville où est située lécole. Pour ce faire, nous avons examiné les documents relatifs aux zones urbaines et rurales marginalisées réalisés par la Banque Mondiale. Cette dernière a dépisté 4 niveaux de marginalisation, le 4e étant le plus fort. Marginalisation signifie ici le faible niveau déducation de la population et un faible niveau social et économique de la région. »
Maintenant que lon connaît les critères dévaluation, voyons quels sont les résultats concrets de lanalyse faite par lassociation Human Catalyst. Sur les 4 158 écoles examinées, près de 40% se trouvaient dans la catégorie de risque éducationnel durant lannée scolaire 2018-2019. Cest-à-dire que 1 535 établissements étaient considérés comme « défavorisés » (36,9%). Une hausse importante par rapport à lannée scolaire précédente lorsque 27% des écoles avaient reçu ce diagnostic. Et si lon pense quen 2015-2016, 1 206 établissements en étaient concernés, on peut tirer la conclusion que la situation a beaucoup empiré ces 4 dernières années. Les écoles les plus défavorisées sont à retrouver dans les départements de Covasna (centre-est), Vaslui (est), Mureș (centre), Călărași (sud) et Tulcea (sud-est).
Pour ce qui est des enseignants, la plupart des profs sans la formation adéquate sont également à retrouver dans le centre et le sud du pays, dans les régions considérées comme marginalisées. Cela confirme lidée que les zones défavorisées ont du mal à attirer du personnel qualifié, constate létude.
Pour ce qui est de lEvaluation nationale que les élèves en dernière année de collège sont tenus de passer avant de sinscrire au lycée, les résultats ne cessent de baisser dune année à lautre.
Lancée en présence de plusieurs ministres, cette étude menée par lassociation Human Catalyst, accompagnée de la carte des écoles désavantagées de Roumanie, deviendront des instruments officiels qui devraient servir aux autorités pour créer et mettre en place des politiques censées remédier au plus vite aux problèmes du système roumain déducation. (Trad. Valentina Beleavski)