Respecter les droits des enfants en les écoutant
La conclusion est d’autant plus surprenante qu’elle intervient à une époque où la Convention de l’ONU sur les droits de l’enfance stipule dans un de ses articles le droit des enfants de se voir demander l’opinion dans différentes questions qui les concernent. Face à l’ignorance des enfants par rapports à leurs propres droits et à la négligence des adultes envers les petits, UNICEF Roumanie a pris la décision de lancer le Conseil des enfants, un concept réunissant une communauté d’élèves allant de l’école primaire jusqu’au lycée.
Christine Leșcu, 02.09.2020, 13:15
La conclusion est d’autant plus surprenante qu’elle intervient à une époque où la Convention de l’ONU sur les droits de l’enfance stipule dans un de ses articles le droit des enfants de se voir demander l’opinion dans différentes questions qui les concernent. Face à l’ignorance des enfants par rapports à leurs propres droits et à la négligence des adultes envers les petits, UNICEF Roumanie a pris la décision de lancer le Conseil des enfants, un concept réunissant une communauté d’élèves allant de l’école primaire jusqu’au lycée.
Despina Andrei, chargée de la Communication et de la collecte de fonds au sein de l’UNICEF nous en donne des détails : « Il s’agit d’une initiative unique au niveau national que l’UNICEF a lancée en janvier 2019 avec, pour principal but, d’encourager les enfants à respecter l’article 12 de la Convention de l’ONU concernant leurs droits. Aux termes de cet article, les enfants se voient offrir la possibilité de participer à la prise de décisions les concernant. A l’heure où l’on parle, que ça soit en Roumanie ou ailleurs, les politiques publiques à l’intention des enfants sont élaborées par les adultes. C’est normal que ça se passe de cette manière, mais, il serait mieux qu’on demande aussi l’opinion des enfants, surtout que ces politiques jouent sur leur avenir. Voilà pourquoi on a décidé de mettre sur pieds ce Conseil réunissant des enfants issus de différents milieux sociaux et économiques. Il s’agit des enfants du milieu aussi bien rural qu’urbain, des enfants typiques ou souffrants de certaines défaillances, des enfants vivant au sein de leurs familles ou des enfants pris en charge par différentes structures de la Protection de l’enfance. »
Un premier pas que le Conseil a fait fut d’adopter la Déclaration de Bucarest des enfants européens, un document envoyé par la suite à tous les Etats membres. A présent, les enfants attendent le retour des institutions communautaires.
Despina Andrei : « On voudrait bien que notre démarche aboutisse sur la mise en place d’un mécanisme européen permettant aux enfants de donner leur avis sur les décisions qui les concernent. La Roumanie a considéré opportun de se lancer dans cette direction, en espérant que les autres Etats s’y joignent. Nous, on a profité de notre mandat européen pour mettre cette idée sur le tapis. Après nous, ce fut le tour de la Finlande d’assumer la présidence européenne et puis de la Croatie. Or, j’ai appris auprès de mes confrères d’UNICEF Croatie que leur pays aussi voudrait créer un Conseil des enfants, selon le modèle roumain. On sait très bien à quel point c’est lent le processus de mise en place de toute initiative législative. On a donc discuté avec les enfants du Conseil de chez nous pour leur demander d’avoir de la patience afin de pouvoir cueillir les fruits de notre démarche dont les résultats vont se voir d’ici quelques années. »
Sophia Cîrlan a 17 ans et elle est élève au Lycée Gheorghe Lazar de Bucarest. Dernièrement, elle a fait du bénévolat au sein de plusieurs ONG. Du coup, elle a souhaité rejoindre le Conseil des enfants, surtout qu’elle non plus, n’était pas au courant de son droit de dire son opinion sur les décisions concernant ceux de son âge.
Sophia Cîrlan : «Moi, j’ignorais complètement notre droit de pouvoir exprimer nos opinions. Voilà pourquoi, je fus contente d’apprendre que le Conseil des enfants UNICEF cherche de nouveaux membres. Je me suis dit que ça vaut le coup d’essayer d’intégrer cet organisme. Si par mes efforts j’arrive à augmenter, ne serait-ce que d’1% le nombre d’enfants à se faire demander l’avis, je serai contente. Si ce n’est pas le cas toute de suite, ce sera peut-être pour la prochaine génération. Deux domaines suscitent mon intérêt: l’éducation et la protection de l’environnement.»
Une enquête menée en 2019 par la Fondation Friedrich Ebert auprès des personnes âgées de 14 à 29 ans met en lumière le désintérêt des jeunes vis-à-vis de la participation à la vie sociale. Le pourcentage des jeunes roumains impliqués dans des projets participatifs atteint à peine les 25%. A la différence des jeunes des neuf autres pays sud-est européens pris en compte par le sondage, la Roumanie affiche le moindre pourcentage de moins de trente ans activement impliqués.
Qu’en pense Sophia Cîrlan ? Elle répond : « Les chiffres sont vrais, surtout parce qu’en Roumanie, les enfants et les jeunes ne se voient pas offrir l’occasion de s’impliquer activement dans la vie de la cité. Et du coup, ils ne savent pas comment le faire. Ils s’étonnent de découvrir un droit dont ils n’avaient jamais entendu parler. Or, le Conseil des enfants se donnent aussi la mission d’informer les jeunes sur leurs droits. Toutes ces statistiques s’avèrent inquiétantes car une partie de ces jeunes sont déjà des adultes. Mais puisqu’on ne leur a jamais appris de s’impliquer, une fois à la maturité, ils sont encore plus réticents. Avec les autres membres du Conseil des enfants, on a commencé à informer nos collègues de classe sur nos droits. L’information se propage lentement, mais continuellement. »
A l’heure où l’on parle, le Conseil des enfants recense 34 membres, dont 10 anciens et 24 nouveaux. Ces derniers viennent d’être recrutés, après avoir répondu à un questionnaire en ligne comportant 15 questions imaginées par des enfants. Parmi les nouvelles recrues, on retrouve Rareş Dragomir, âgé de 11 ans. Souffrant d’un handicap locomoteur, Rareş voudrait bien se voir impliquer dans la prise des décisions à l’intention, notamment, des personnes aux défaillances.
Rareş Dragomir : « Sans pouvoir affirmer avoir des attentes concrètes, j’aimerais bien que notre voix se fasse entendre. L’avenir, c’est nous et donc, il faut qu’on nous écoute. Pour l’instant, grâce à mes parents, j’arrive à mener une vie presque normale malgré mon handicap. Je n’ai pas une demande particulière à formuler à l’intention des institutions. Mais, je suis conscient qu’au fur et à mesure que le temps passe, des problèmes feront surface et j’aimerais bien pouvoir les solutionner ».
Les enfants ont certainement des revendications et ils espèrent que les institutions publiques se doteront d’un mécanisme censé leur offrir le droit à la parole. (Ioana Stancescu)