Entrepreneuriat social en Roumanie
Ce guide, dédié à l’entrepreneuriat social, part d’une vingtaine d’histoires parlant d’associations, de fondations, d’entreprises ou d’applications mobiles qui n’en sont qu’à leur début ou encore d’espaces de co-travail et d’affaires en cours de changement. Jennifer Brandel, journaliste et entrepreneure américaine, a été l’invitée spéciale du lancement du guide DOR. Après avoir expérimenté différents modèles d’entrepreneuriat qui ne satisfont plus aux besoins actuels de la société, Jennifer Brandel a décidé de proposer une alternative à la compagnie dite « licorne ». Celle-ci monopolisait le marché et imposait le bénéfice et la compétition comme valeurs essentielles pour la réussite d’une affaire. Or, le nouveau modèle entrepreneurial, baptisé « zèbre », propose une approche ciblée sur le facteur humain et sur l’impact social d’une entreprise. Jennifer Brandel: « Ces dernières années, j’ai écrit pour expliquer dans quel monde nous souhaiterions vivre, quel type d’affaires nous voudrions voir naître, tout cela pour promouvoir des valeurs différentes de celles d’aujourd’hui. Les entreprises auxquelles nous avons pensé, nous les avons dénommées « zèbres ». A la différence des licornes, les zèbres existent bel et bien. A l’image du pelage blanc et noir de cet animal, une entreprise zèbre vise tant le bénéfice que la mission. Elle peut faire deux choses en même temps : réaliser des bénéfices et participer au progrès social. Les zèbres se regroupent en troupeau pour s’entraider. Il s’agit donc d’un animal dont l’avantage compétitif est dans la coopération. Cette série de valeurs n’est pas opposée, mais différente. En clair, au lieu de viser la croissance accélérée, les entreprises zèbres sont pérennes. Au monopole, elles préfèrent une myriade d’affaires capables de coexister. C’est comme dans un jeu où il n’y a plus de gagnants ni de perdants. Bref, ça offre des possibilités de coopération de sorte que tout le monde y gagne suffisamment. »
Monica Chiorpec, 20.11.2019, 13:16
Les valeurs mises en avant par Jennifer Brandel, on les retrouve dans le « Guide d’entrepreneuriat social » lancé par la revue mentionnée. L’impact sur la communauté, le niveau de confiance des employés et celui de satisfaction des clients, mais aussi la chaîne d’approvisionnement fondée sur l’éthique et la bonne coopération entre les partenaires comptent le plus dans ces exemples d’affaires. Ecoutons Irina Tacu, coordonnatrice du Guidé DOR: « Nous nous sommes donné pour tâche de trouver des gens qui gèrent des affaires et des organisations à travers le pays et qui ont un impact dans différents domaines d’activité. Nous avons visé tout d’abord à comprendre la vision de l’entrepreneuriat social chez les gens qui connaissent ce milieu, du fait de travailler dans des organisations qui appuient les entrepreneurs sociaux, tels Ashoka România, la fondation NESsT ou bien Social Innovation Solutions. Nous voulions savoir ce qui les poussait à faire ce travail, quelle était leur mission. »
Les idées entrepreneuriales comprises dans le Guide DOR impliquent plusieurs secteurs d’activité, y compris l’éducation. Ce sont les pédagogies alternatives, en accord avec les besoins émotionnels des enfants, qui sont à l’origine du projet Tzitzi-Poc. Irina Tacu nous en a fourni davantage de détails : « Parmi les histoires sur lesquelles nous nous sommes documentés aux côtés de l’équipe DOR figure aussi Tzitzi-Poc. Une affaire par le biais de laquelle Mirona Păun s’est proposé d’intégrer les émotions dans l’éducation des enfants âgés de 3 à 8 ans. C’est à cette fin qu’elle a créé un spectacle de théâtre permettant aux petits spectateurs d’interagir, de s’impliquer dans l’histoire des personnages. Ainsi peuvent-ils mieux saisir des émotions telles que l’empathie, l’amitié ou l’anxiété, malgré leur âge tendre. »
Le domaine de l’alimentation est lui aussi pris en compte par l’entrepreneuriat social. Les nouvelles coopératives agricoles entendent venir en aide aux petites communautés d’entrepreneurs et fournir aux Roumains des légumes frais. Une pâtisserie offre des emplois aux femmes issues de familles défavorisées. Irina Tacu: « Nous nous sommes rendus à Apahida, localité du département de Cluj, à la coopérative agricole de Lunca Someşului Mic. C’est là que nous avons fait la connaissance de Anca Marcu, directrice des ventes. Elle nous a expliqué comment fonctionne une coopérative agricole moderne, qui aide les agriculteurs à s’unir et à collaborer pour mieux vendre leurs légumes, afin que nous puissions les acheter directement aux producteurs. « Tort de Bezea » (« Gâteau meringué » c’est comme cela que Simona Crăciun a décidé de nommer son affaire. Au bout de trois ans d’activité, Simona est toujours à la recherche des modalités les plus efficaces permettant d’améliorer la vie des femmes qu’elle emploie dans sa pâtisserie-confiserie. »
Dans les pages du Guide DOR, on retrouve aussi l’histoire d’un groupe d’architectes, précise Irina Tacu : « Au sein de l’association ArhiPera nous avons appris la merveilleuse histoire d’un groupe d’architectes qui pratiquent l’architecture participative. Ils aident les familles défavorisées de certaines régions du pays à se faire bâtir une maison. Ces architectes élaborent les plans et construisent les maisons avec la participation des familles respectives. FABER, c’est le nom d’un autre projet en cours de réalisation, à Timisoara. Là, 13 personnes travaillant dans des industries de la création ont uni leurs forces pour rénover un bâtiment historique de la ville qui devrait abriter aussi un hub créatif, un bistrot et un espace évènements. Cela parce qu’ils souhaitent souder la communauté créative de la ville en vue d’une meilleure collaboration. »
Le Guide 2019 proposé par les journalistes de DOR, qui, en dehors des exemples d’entrepreneuriat social, offre des renseignements sur « l’Académie des esprits créatifs », est à retrouver aussi sur le site internet www.dor.ro. (Trad. Mariana Tudose)