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Les perspectives de la retraite en Roumanie

Environ 54% des Européens envisagent de rester actifs après l’âge de la retraite, constate une enquête réalisée récemment par une importante banque européenne dans 15 pays dont 13 d’Europe. Au niveau européen, un quart de la population seulement s’attend à avoir le même niveau de vie après la retraite. Les Roumains, eux, sont encore plus pessimistes. 63% des Roumains interrogés estiment qu’ils seront obligés de travailler après l’âge de la retraite tout simplement pour pouvoir payer leurs factures.

Les perspectives de la retraite en Roumanie
Les perspectives de la retraite en Roumanie

, 28.03.2019, 14:09

Environ 54% des Européens envisagent de rester actifs après l’âge de la retraite, constate une enquête réalisée récemment par une importante banque européenne dans 15 pays dont 13 d’Europe. Au niveau européen, un quart de la population seulement s’attend à avoir le même niveau de vie après la retraite. Les Roumains, eux, sont encore plus pessimistes. 63% des Roumains interrogés estiment qu’ils seront obligés de travailler après l’âge de la retraite tout simplement pour pouvoir payer leurs factures.

Pour mieux comprendre cet état de choses, nous avons invité au micro Manuela Stănculescu, sociologue à l’Institut de recherches sur la qualité de la vie. A son avis, il s’agit là avant toute chose d’opinions et d’attentes comparables aux réponses des enquêtes sur le bonheur personnel ou sur la direction dans laquelle se dirige tel ou tel pays.

Qui plus est, ces sondages mettent en lumière des comportements et des mentalités, affirme Manuela Stănculescu : « Les Roumains ont un certain type de comportement. Cela ne fait que quelques années que certains d’entre eux ont commencé à se faire des plans sur le long terme. Par exemple : ils pensent à leur retraite. A cause de notre passé communiste, nous avons tendance à penser toujours que « la retraite viendra ». Comme si elle nous était donnée en cadeau. Par contre, les étrangers savent qu’ils doivent se préoccuper tous seuls de leur retraite. De plus, à l’étranger, il existe plusieurs instruments et possibilités financières pour planifier sa retraite. Les Occidentaux sont habitués à ce type de pensée dès leurs années d’école. En Roumanie, cela ne s’apprend pas à l’école, ni en famille. Ce n’est que dernièrement, et uniquement au niveau de la classe moyenne supérieure, que l’on remarque ce type de comportement : planifier ses vacances ou planifier l’éducation des enfants à l’étranger. Ces pratiques n’existaient pas auparavant. »

Autrement dit, une grande partie des Roumains, à l’instar d’autres Européens de l’Est marqués par le communisme, doivent comprendre que planifier sa retraite est tout simplement une responsabilité personnelle à assumer. La même mentalité fait surface au moment où il est question d’économiser. Dans ce cas, les conditions de vie comptent pour beaucoup. Et pour cause. 69% des Roumains affirment ne pas réussir à épargner en raison des revenus trop bas. A la pauvreté et aux mentalités s’ajoute une raison très concrète : l’offre des institutions bancaires et financières, ajoute Manuela Stănculescu.

Elle explique les causes réelles du taux si bas des économies chez les Roumains : « Premièrement, le niveau de pauvreté de la population est très élevé. Beaucoup de gens ne peuvent pas faire des économies parce qu’ils n’ont rien à mettre de côté. Deuxièmement, épargner n’est pas une pratique très répandue. C’est parce qu’il n’y a pas d’éducation en ce sens. Le problème des pays ex-communistes, c’est justement l’absence d’éducation financière dans les écoles. Troisièmement, il n’y a pas de diversité de produits financiers qui encouragent les économies, car en Roumanie, les banques ne proposent pas suffisamment de produits bancaires ou financiers de ce type, comme c’est le cas dans le reste de l’Europe. »

Néanmoins, les perceptions et les attentes de la population sont soutenues, partiellement du moins, par des données concrètes. Depuis 2009 déjà, la Banque Mondiale avertissait que le déficit des retraites en Roumanie dépassera les 5% du PIB avant 2020 et que ce déficit continuera à se creuser, pour stagner par la suite et arriver à 6,2% du PIB en 2050. Ces déficits sont engendrés par le rythme de vieillissement de la population, mais aussi par les coûts de transition d’une partie des contributions du 1er Pilier vers le 2e Pilier.

En 2009, au moment de ces prévisions, la Roumanie venait de réformer son système de retraites pour le structurer autour de trois Piliers : le 1er Pilier, les retraites assurées par le système public, gérées par l’Etat et financées par le budget de la sécurité sociale ; le 2e Pilier, obligatoire à ce moment-là pour les moins de 35 ans et optionnel pour les 35-45 ans, avec des retraites assurées par les contributions obligatoires aux fonds privés de pensions ; et le 3e Pilier, un système facultatif de retraites entièrement géré par des compagnies privées.

Pour le moment, un peu plus de 7 millions de Roumains contribuent au 2e Pilier. Pour ce qui est du 3e Pilier, 410.000 personnes cotisaient pour une retraite privée fin 2016. C’est, selon les interprétations, le nombre de Roumains qui avaient compris que la planification de leur retraite était aussi une question de choix individuel ou bien celui de personnes qui avaient les moyens de cotiser, en plus de la pension d’Etat obligatoire, à une pension privée.

Pour conclure, le pessimisme des Roumains relatif à la nécessité de continuer à travailler après l’âge de la retraite s’explique par le niveau de vie actuel, mais aussi par des données concrètes.

Manuela Stănculescu revient avec des détails : « Les problèmes liés aux retraites futures ont trois sources principales. La première est le vieillissement de la population. Nous traversons actuellement un processus de vieillissement, ce qui fait que dans 10-20 ans, il y aura de plus en plus de personnes à l’âge de la retraite soutenues par de moins en moins de personnes actives. Cela mettra beaucoup de pression sur le fonds de retraites. La deuxième raison d’inquiétude est liée à l’économie informelle, très développée en Roumanie. A court terme, c’est une manière de survivre, mais c’est ce qui nous « tuera » à long terme. Travailler au noir, sans déclarer ses revenus, se traduit par des retraites soit très faibles, soit inexistantes. Enfin, la troisième cause est l’immigration, souvent liée au travail au noir. Il existe des personnes qui travaillent à l’étranger sans être déclarées et qui, lorsqu’elles reviennent au pays, touchent le salaire minimum ou bien elles n’ont aucune forme de revenu. Souvent, ces personnes repartent à l’étranger pour faire la même chose. Pour le moment, elles arrivent à s’en sortir, mais elles ne cotisent pour aucun système, ni en Roumanie, ni à l’étranger. Il y aura, à l’avenir, des générations qui, à cause de tout cela, traverseront de grandes difficultés. Nous pourrons commencer à parler de la pauvreté des retraités en Roumanie. C’est possible que, dans un avenir assez proche, ils soient la principale catégorie exposée à la pauvreté. Pour le moment, ce sont les enfants et les jeunes qui se trouvent en dessous de ce seuil de pauvreté absolument inadmissible pour toute société. »

C’est peut-être justement en prenant en compte l’amélioration de la situation des jeunes que le système des retraites pourrait devenir plus soutenable. (Trad. Valentina Beleavschi, Elena Diaconu)

(sursa foto pixabay@Vertax)
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