Centre pilote destiné aux victimes de viol
Les statistiques officielles ne reprennent qu’une partie de cette réalité sordide, les victimes hésitant souvent à déposer plainte. Pour venir en aide aux femmes victimes, l’Agence nationale pour l’Egalité de chances a récemment inauguré le premier Centre pilote de crise destiné aux victimes de viol, au sein même de l’Hôpital universitaire des urgences de Bucarest. Daniela Draghici, secrétaire d’Etat à l’Agence nationale pour l’Egalité des chances, estime que le Centre qui vient d’ouvrir pourra offrir le soutien nécessaire aux victimes de viol. Ecoutons-la :
România Internațional, 09.01.2019, 17:17
Les statistiques officielles ne reprennent qu’une partie de cette réalité sordide, les victimes hésitant souvent à déposer plainte. Pour venir en aide aux femmes victimes, l’Agence nationale pour l’Egalité de chances a récemment inauguré le premier Centre pilote de crise destiné aux victimes de viol, au sein même de l’Hôpital universitaire des urgences de Bucarest. Daniela Draghici, secrétaire d’Etat à l’Agence nationale pour l’Egalité des chances, estime que le Centre qui vient d’ouvrir pourra offrir le soutien nécessaire aux victimes de viol. Ecoutons-la :
« Nous souhaitons que notre démarche constitue un signal fort, adressé à toutes les femmes de Roumanie, un signe d’espoir dans la construction d’un nouveau modèle de bonnes pratiques pour la gestion intégrée des cas de viol. Notre démarche part d’un constat simple, même s’il s’agit d’une réalité regrettable. C’est qu’une majorité de victimes, peut-être à cause de vieilles mentalités et des idées reçues, hésite à déposer plainte, y renonce ou abandonne la procédure en cours de route. Partant de ce constat, nous nous sommes adressés à l’Institut de médecine légale, pour identifier les possibilités légales afin que les médecins puissent procéder aux prélèvements biologiques nécessaires au sein même du service de garde. Et ce pour éviter d’envoyer la victime faire d’elle-même toutes ces démarches qui, souvent, la feront hésiter et renoncer à aller jusqu’au bout. C’est aussi pour en finir avec l’impunité des violeurs ».
Graţiela Drăghici détaille le fonctionnement du Centre :
« La condition essentielle est que la victime déclare le viol. Ensuite, le médecin de garde va alerter le groupe opératif de proximité, un service spécialisé dans ce type de criminalité. Des agents vont se présenter au service de garde de l’hôpital, et vont solliciter le consentement de la victime pour déposer plainte. Une fois le consentement acquis, on peut considérer que le cas de viol est étayé d’un point de vue juridique. Plus avant, on procède aux prélèvements des preuves biologiques, en utilisant pour ce faire le kit fourni par l’Institut de médecine légale. Enfin, la victime sera conseillée et accompagnée vers un abri destiné aux victimes de la violence domestique. Là, elle recevra l’aide nécessaire, y compris une aide juridique adaptée, pour que l’agresseur soit traduit en justice ».
Le projet pilote est voué à s’étendre à l’échelle nationale, et vise à terme une diminution du nombre d’agressions de nature sexuelle. Pour l’instant, la situation est pour le moins préoccupante. L’année dernière, pas moins de 46 femmes et de 12 enfants ont perdu la vie suite à des faits de violence domestique. Tous les deux jours, un cas d’agression sexuelle sur fille mineure est rapporté, et ce n’est que la partie visible de l’iceberg. Plus grave encore, 55% des Roumains considèrent que le viol pourrait être justifié dans certaines situations. Graţiela Drăghici :
« Selon les données fournies par la Police, une information judiciaire a été ouverte dans 500 cas rapportés de viol en 2017. La statistique pour l’année 2018 est en cours, mais nous savons d’ores et déjà qu’elle dépassera les 450 cas. Par ailleurs, un pourcentage important de faits de violence domestique n’est pas rapporté. Certaines estimations font état de 70% des cas qui demeureraient inconnus, toutes formes de violence confondues, que l’on parle de la violence domestique ou de la violence sexuelle. Ces chiffres ne sont donc que la partie visible de l’iceberg. » .
Les organisations féministes saluent évidemment l’initiative prise par l’Agence nationale pour l’Egalité de chances. Voici ce que nous dit Andreea Bragă, directrice exécutive du Centre Filia, une organisation qui lutte contre les inégalités de genre, à travers l’activisme, le plaidoyer et la recherche. Ecoutons-la :
« Il s’agit d’un pas dans la bonne direction. Nous ne disposions d’aucun centre de ce type jusqu’ici. Or, nous sommes très loin d’être une société qui mette l’accent sur le droit des victimes ou qui leur accorde la protection qui leur est due. L’on ressent un gros besoin en termes de nombre de professionnels, qui sachent travailler avec les pathologies du trauma sexuel. Trop souvent, la victime est culpabilisée, ce qui ne fait que l’enfoncer davantage. Imaginez le nombre de démarches qu’elle doit entreprendre, et le nombre de fois où elle doit raconter et revivre l’abus. Dans les autres Etats européens, l’intervention est centrée sur la protection de la victime, pour minimiser le risque de la faire revivre maintes fois le trauma qu’elle vient de subir. Mais pour cela et en parallèle, nous avons besoin d’éducation, pour apprendre et pour comprendre ce qu’est le consentement. Et puis beaucoup de cas de viol, de violences sexuelles, d’actes sexuels perpétrés à l’encontre d’un mineur ne sont toujours pas rapportés et demeurent de ce fait inconnus », affirmait encore Andreea Bragă, directrice exécutive du Centre Filia.
(Trad. Ionut Jugureanu)