Les débats sociaux de l’année 2017
L’année 2017 a débuté sous le signe des manifestations: pendant plusieurs semaines, dans toutes les villes du pays, des milliers de personnes ont bravé des températures glaciales et ont contesté dans la rue des décisions du gouvernement fraîchement installé à Bucarest. La presse internationale écrivait : « Bleu, jaune, rouge : des dizaines de milliers de manifestants ont formé à Bucarest un drapeau roumain géant illuminé par leurs téléphones portables, pour réclamer la démission de l’exécutif, qu’ils accusent de miner la lutte contre la corruption. » – pour citer l’AFP.
Christine Leșcu, 10.01.2018, 15:15
L’année 2017 a débuté sous le signe des manifestations: pendant plusieurs semaines, dans toutes les villes du pays, des milliers de personnes ont bravé des températures glaciales et ont contesté dans la rue des décisions du gouvernement fraîchement installé à Bucarest. La presse internationale écrivait : « Bleu, jaune, rouge : des dizaines de milliers de manifestants ont formé à Bucarest un drapeau roumain géant illuminé par leurs téléphones portables, pour réclamer la démission de l’exécutif, qu’ils accusent de miner la lutte contre la corruption. » – pour citer l’AFP.
Les protestations de Roumanie ont été commentées au Parlement Européen aussi, la plupart des eurodéputés estimant que la mobilisation et la solidarité des manifestants représentaient un message pro-européen. « La Roumanie mérite des hommes politiques qui soutiennent la lutte anticorruption » – déclarait le premier vice-président de la Commission européenne, Frans Timmermans. Il avertissait les responsables de Bucarest contre tout pas en arrière dans la lutte anticorruption, car cela pouvait affecter l’absorption des fonds européens en Roumanie. Ce message était particulièrement important, car en 2017, la Roumanie fêtait le 10e anniversaire de son adhésion à l’UE.
En 2007, la Roumanie comptait parmi les Etats les plus euro-enthousiastes. Fin 2017, les sondages d’opinion montraient une baisse de cet enthousiasme, concordant avec l’état d’esprit dans les autres Etats membres. Selon l’eurobaromètre réalisé à la demande du Parlement européen, 53% des Roumains estimaient que l’appartenance à l’UE était un facteur positif pour leur pays. Bien que s’inscrivant dans la moyenne européenne, ce pourcentage était surprenant pour la Roumanie, où, même avant l’adhésion, les euro-enthousiastes représentaient 70% à 80% de la population.
Malgré ce déclin, les Roumains font beaucoup plus confiance aux institutions de l’UE qu’aux institutions nationales. Selon le même eurobaromètre, 38% des Roumains faisaient confiance au Parlement Européen, contre une moyenne européenne de 25%. 35% des Roumains interrogés estimaient également que leurs voix se faisaient mieux entendre au niveau européen qu’au niveau national. C’est toujours l’Europe qui a apporté un soutien aux initiatives civiques de Roumanie en faveur des « NEET » – terme désignant les jeunes âgés de 15 à 24 ans qui n’ont pas d’emploi et ne suivent pas d’études. Selon les données les plus récentes fournies par l’Institut national de la statistique, la Roumanie en compte un million environ. Dans ces conditions le groupe de réflexion sociale DOers a organisé une conférence nationale pour lancer la plateforme « La Coalition européenne pour les droits des NEET », une initiative financée par le programme Erasmus+ et démarré en janvier 2017 à Bruxelles. Victor Negrescu, à l’époque député européen et actuellement ministre délégué aux Affaires européennes dans le gouvernement de Bucarest, y annonçait son soutien aux démarches d’intégration des « NEET ».
Ce sont toujours des initiatives civiques et privées qui ont rendue possible la mise en œuvre d’un projet extrêmement important pour les enfants malades du cancer de Roumanie : la construction, à Bucarest, d’un hôpital dédié, les établissements hospitaliers où ils sont soignés actuellement étant insuffisants et ne disposant pas de tous les équipements nécessaires. Le nouvel hôpital privé, destiné aux enfants malades du cancer, sera construit dans la cour de l’hôpital « Marie Curie » de Bucarest, lui aussi mal doté pour ce genre de soins. C’est l’ONG « Fais don de la vie » qui a lancé ce projet pour changer la situation désastreuse de Roumanie, où un sur deux enfants malades du cancer meurt, alors qu’en Europe 80% de ces enfants survivent.
D’ailleurs, depuis une quinzaine d’années, l’Etat roumain n’a rien construit pour faciliter l’activité dans le domaine de l’oncologie pédiatrique. Le nouvel hôpital privé, formé d’un ensemble de bâtiments couvrant 8 mille m2, coûte 8 millions d’euros, dont la moitié a déjà été collectée. L’argent provient des fonds offerts par plus de 1500 compagnies et des dons mensuels de 2 euros faits par quelque 50 mille particuliers. Une autre ONG, MagicHome, déroule à présent un projet au bénéfice des parents d’enfants malades du cancer, qui souhaitent rester auprès de leurs petits et qui sont le plus souvent obligés à se tenir sur une chaise près du lit de leur enfant. Le projet prévoit la construction d’un bâtiment de 700 m2 à proximité du plus grand centre hospitalier d’oncologie de Bucarest. Là, les mères et les pères pourront dormir, cuisiner, se laver et laisser leurs larmes couler, sans craindre d’être vus par leurs enfants hospitalisés.
En plus de la jeunesse, les enfants, la santé et la politique, l’écologie s’est avérée, en 2017, une préoccupation majeure des ONGs et de la société entière. Les déboisements illégaux en font partie. Durant les 15 ou 20 dernières années, en Roumanie, la surface boisée a baissé à 27,45% du territoire, contre une moyenne européenne de 32,4%. Selon une étude réalisée par Greenpeace Roumanie, entre 2000 et 2014, le pays a perdu 3 hectares de forêt par heure. D’ailleurs, les militants de Greenpeace et d’autres ONGs ont été les premiers à informer l’opinion publique sur la situation dramatique des forêts de Roumanie. En parcourant les montagnes, de leur propre gré ou alertés par les habitants, les bénévoles des organisations écologistes s’attaquent aux coupes illégales d’arbres et aux transports illégaux de bois. Prouver l’illégalité de ces coupes s’avère pourtant difficile et les militants pour l’environnement sont souvent victimes de la brutalité des personnes surprises en train d’abattre illégalement des arbres.
Voilà pour ce bref survol des principaux thèmes sociaux de l’année 2017. Ils sont beaucoup plus nombreux et ils se trouveront sans doute, en 2018 aussi, à l’agenda des organisations civiques. L’année 2017 finissait d’ailleurs comme elle avait commencé : sur des manifestations qui rassemblaient des citoyens révoltés par les décisions du pouvoir. (Trad. Dominique)