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Les adoptions, de nouveau dans l’actualité

En Roumanie, sur les 58 mille mineurs intégrés au système de protection de l’enfant – et qui se trouvent dans les centres de placement et chez les assistants maternels – 3.500 seulement sont adoptables. Les autres, qui vivent eux aussi loin de leurs familles, ne sont pas seuls au monde. Alors pourquoi l’Etat doit-il les prendre en charge ? Pour 43% de ces mineurs, la réponse est : la pauvreté. L’Etat tâche de les réintégrer à leur famille élargie. Pourtant, cette démarche réussit dans très peu de cas.

Les adoptions, de nouveau dans l’actualité
Les adoptions, de nouveau dans l’actualité

, 13.04.2016, 14:01

En Roumanie, sur les 58 mille mineurs intégrés au système de protection de l’enfant – et qui se trouvent dans les centres de placement et chez les assistants maternels – 3.500 seulement sont adoptables. Les autres, qui vivent eux aussi loin de leurs familles, ne sont pas seuls au monde. Alors pourquoi l’Etat doit-il les prendre en charge ? Pour 43% de ces mineurs, la réponse est : la pauvreté. L’Etat tâche de les réintégrer à leur famille élargie. Pourtant, cette démarche réussit dans très peu de cas.

Quant à l’adoption – qui est la solution pour les autres enfants – elle est un processus qui dure beaucoup trop longtemps pour qu’elle aboutisse facilement. L’actuelle loi des adoptions, en vigueur depuis 2004, exige que l’on fasse le maximum pour que les mineurs puissent être élevés par des membres de leur famille élargie, ce pourquoi un enfant est déclaré adoptable uniquement après que tous ces parents, allant jusqu’au 4e degré, aient été trouvés et refusé de les prendre en charge. Cette quête des parents est malaisée et dure longtemps. Ce n’est pourtant là qu’une des causes menant à la tergiversation et parfois même à l’échec des adoptions.

Gabriela Coman, présidente de l’Autorité nationale pour la protection des droits de l’enfant et l’adoption, explique : « L’entrée des enfants dans le système de protection est plutôt facile. Il s’agit d’environ 5.000 enfants par an, chiffre à peu près constant ces dernières années. Ils passent un laps de temps beaucoup trop long – soit environ six ans et demi – dans ce système de protection comportant assistance maternelle, placement ou soins institutionnalisés. Les statistiques indiquent un grand écart entre le nombre d’enfants adoptables et adoptés, entre le nombre de familles bénéficiant d’un certificat leur permettant d’adopter un enfant et celui des enfants adoptés effectivement. En outre, la plupart des familles souhaitent adopter une enfant en bas âge. 85% d’entre elles préfèrent un enfant de moins de 6 ans, cliniquement sain. Or, le nombre d’enfants répondant à ces critères est largement inférieur à celui des familles qui souhaitent adopter.

Amendée à plusieurs reprises, la loi des adoptions a été récemment révisée suite à des consultations avec la société civile et avec le bureau de l’UNICEF en Roumanie, qui salue ces changements par la voix de sa représentante à Bucarest, Sandie Blanchet : « Le processus d’adoption est actuellement trop lent et les responsables roumains le reconnaissent. Il dure environ 15 mois. Suite à la révision de la loi, ce délai devrait être considérablement réduit. Nous saluons également l’introduction du congé accordé à l’un des parents qui adoptent l’enfant et dont la durée maximale est d’une année. Le parent en question recevra une indemnité mensuelle de 1.700 de lei (soit 380 euros). J’aimerais souligner le fait qu’il faut faire très attention lorsqu’on parle des cibles à atteindre : réduire la durée de l’adoption ne signifie pas que toutes les adoptions doivent s’achever dans un certain délai, ce n’est pas là le principal but. Le principal but est que la situation de l’enfant change, lui trouver une famille appropriée. » D’autres amendements concernent la diminution d’une année à 6 mois de la durée de la quête des parents allant jusqu’au 4e degré. Le délai de 2 ans pendant lequel le mineur garde le statut d’enfant adoptable sera également été éliminé. A partir de 2017, ce statut, obtenu suite à la décision d’un tribunal, demeure valable jusqu’à ce que l’adoption est approuvée ou jusqu’à ce que l’enfant atteint l’âge de 14 ans. A partir de ce moment, l’enfant aura son mot à dire sur sa propre adoption. La validité du certificat de famille adoptive a également été portée d’un an à deux ans. D’ailleurs, les tribulations par lesquelles passent les futurs parents adoptifs représentent l’autre facette dramatique des adoptions en Roumanie. Nicoleta Cristea-Brunel, Roumaine établie en France et rapatriée en vue de l’adoption d’un enfant, nous parle de l’échec de sa tentative d’adopter. SON : « Ce qui se passe dans le système de protection des mineurs de Roumanie, c’est du génocide muet. Environ 60.000 ne peuvent pas s’épanouir au sein d’une famille pour la simple raison que, pour la plupart d’entre eux, l’adoption n’aboutit jamais. C’est si frustrant, si douloureux ! Moi, en tant que personne qui souhaitais adopter un enfant, j’ai été incapable d’aller dans les centres de placement voir ces enfants, car j’aurais souhaité les prendre tous à la maison. Et ce n’était pas possible, non seulement parce que j’aurais été incapable d’élever 60 mille enfants, mais surtout parce qu’on ne m’a pas donné le droit d’en adopter au moins un. J’ai pourtant fait de mon mieux. Nous avons commencé par des démarches teintées d’une touche kafkaïenne, nous avons enfin réussi à obtenir le fameux certificat pour l’adoption de l’enfant, et ce fut tout. Tout le processus à travers lequel j’ai essayé d’adopter un enfant de Roumanie s’est concrétisé uniquement par l’obtention de ce papier. Et ce papier est resté dans mon bureau, alors qu’une année durant, je tressaillais à chaque appel téléphonique depuis un numéro que je ne connaissais pas, pensant que quelqu’un allait me dire de venir voir un enfant. Pourtant, cet appel, je ne l’ai jamais eu. Aucun enfant n’a pu être trouvé pour moi, alors que dans les maternités de Roumanie on abandonne 4 nouveau-nés par jour. »

Entre temps, Nicoleta Cristea-Brunel est devenue la maman d’une fillette qu’elle a eue par fécondation in vitro et elle a créé l’Association « SOS Infertilitatea » – SOS Infertilité – militant pour les droits des familles qui souhaitent avoir un enfant, soit par adoption, soit par des techniques de procréation assistée. Puisqu’elle connaît si bien les embûches de la bureaucratie roumaine, elle considère d’un œil prudent la révision de la loi des adoptions. Nicoleta Cristea-Brunel : « Ces amendements me semblent salutaires, notamment celui concernant le congé accordé aux parents qui adoptent un enfant. C’est que la plupart des enfants adoptés ont plus de deux ans et, chose inouïe, les parents n’avaient pas un seul jour de congé. On prenait l’enfant chez l’assistant maternel pour le confier tout de suite à une nounou ou une grand-mère pour que l’on puisse aller au travail. La période d’adaptation n’était pas prise en compte. Les autres amendements aussi sont les bienvenus, mais moi, je souhaite les voir appliquer. Sur papier, j’ai vu toute sorte de bonnes choses. Selon les règlements, les décisions judiciaires doivent être prises très vite, dans un délai de 10 jours, ce qui en réalité, n’arrive pas. »Récemment adoptés par la Chambre de Députés, les amendements à la loi des adoptions attendent d’être promulgués par le président roumain et publiés au Journal officiel pour entrer en vigueur. ( Trad. : Dominique)

(sursa foto pixabay@Vertax)
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