S’échapper de Bucarest…
La capitale roumaine, Bucarest, agit comme un aimant auprès des Roumains en quête d’un niveau de vie meilleur et d’un job mieux rémunéré. Pourtant, au bout des dizaines d’années durant lesquelles les habitants de la Roumanie avaient tous les yeux rivés sur la capitale, voilà qu’un autre phénomène se fait sentir depuis 8 ans déjà: l’attraction de la campagne est devenue tellement forte que de plus en plus de Bucarestois choisissent d’y emménager. Voici comment s’explique l’apparition de plus en plus de quartiers de maisons et de villas dans les communes entourant la capitale.
Christine Leșcu, 11.09.2013, 14:42
La capitale roumaine, Bucarest, agit comme un aimant auprès des Roumains en quête d’un niveau de vie meilleur et d’un job mieux rémunéré. Pourtant, au bout des dizaines d’années durant lesquelles les habitants de la Roumanie avaient tous les yeux rivés sur la capitale, voilà qu’un autre phénomène se fait sentir depuis 8 ans déjà: l’attraction de la campagne est devenue tellement forte que de plus en plus de Bucarestois choisissent d’y emménager. Voici comment s’explique l’apparition de plus en plus de quartiers de maisons et de villas dans les communes entourant la capitale.
Qu’est ce qui pousse les Bucarestois à quitter la vie en ville et tous les avantages qui en découlent, ce sera à Ioana Mihai, journaliste de Ziarul Financiar, de nous le dire: « Une première catégorie de Bucarestois qui s’évadent est représentée par les retraités qui, à la fin de leur parcours professionnel, choisissent de regagner la province et le village natal. A cette catégorie s’ajoute celle des étudiants qui ont du mal à s’adapter au rythme de la capitale. Bien qu’une ville comme Bucarest offre de gros salaires, elle demande des sacrifices à commencer par le temps et les nerfs. Il suffit de penser au stress quotidien qu’un Bucarestois doit subir dans le trafic. Une fois arrivés au bureau, on a déjà les nerfs tendus. Or, cela n’arrive pas en province. Une troisième catégorie est celle des professionnels et je pense à tous ces managers de top qui se permettent le luxe de renoncer à un moment donné à faire carrière pour élever leurs enfants loin de la capitale. Je connais des managers qui ont tourné le dos à des postes importants dans de grandes compagnies bucarestoises pour s’installer en province et mettre sur pied leur propre affaire » .
La plupart des Bucarestois qui souhaitent s’échapper au rythme alerte de la capitale préfèrent s’installer à ses portes, dans le département d’Ilfov, une région rurale et agricole. Pourtant, il y a d’autres qui choisissent les comtés aux taux d’investissements les plus élevés, comme celui de Timis. Quelque 11.000 Roumains s’y sont établis depuis 2011. Quant à la vie bucarestoise, il convient de mentionner que l’avantage des gros salaires que l’on peut y toucher est chassé par le coût de la vie qui ne cesse de grimper.
Repassons le micro à Ioana Mihai: « Il suffit de comparer le niveau des loyers ou le prix au mètre carré pour conclure que la vie en dehors de Bucarest est moins chère. A cela s’ajoutent également les économies de carburant qu’on peut faire en province. Il y a des villes qu’il est possible de traverser en 5 minutes, tandis qu’à Bucarest, les 5 minutes nous suffisent à peine pour franchir un feu rouge. En plus, la vie bucarestoise implique toute sorte de frais. Et n’oublions pas qu’il y a des personnes qui au lieu de perdre chaque jour une heure et demie au volant préfèrent consacrer plus de temps à leur famille. Or, la province rend ce souhait possible » .
Et c’est toujours à la famille — notamment aux enfants — qu’a pensé Sabina Dumitrescu lorsque, secondée par son mari et par un autre couple d’amis, la famille Barbu, elle s’est lancée dans la production et la vente de légumes, qu’elle cultive. Pour ce faire, elle a acheté des terrains dans le comté de Ialomiţa, à une soixantaine de kilomètres à l’est de la capitale. Elle voulait aussi pouvoir offrir à ses enfants une nourriture saine et un coin de nature où ils puissent jouer et respirer de l’air pur. C’est pourquoi Sabina et son mari ont quitté le quartier bucarestois qu’ils habitaient et se sont installés à la campagne, dans le département voisin, celui d’Ilfov. Par conséquent, ils font la navette, deux fois par semaine, dans le comté de Ialomiţa, où se trouvent leurs cultures. Sabina raconte: « Nous n’en voulions plus de la pollution. Et je peux dire que, le premier jour et la première nuit que nous avons passés là-bas, nous nous y sommes sentis chez nous. Les enfants étaient tellement heureux! Nous n’avions jamais habité une maison avec cour et jardin. Il est vrai que notre appartement se trouvait à proximité d’un grand parc. Pourtant, ce n’est pas pareil. Pour eux, c’est tout à fait autre chose de voir la forêt tout près, de voir le champ, d’avoir une cour pour jouer. Ca change tout » .
L’adaptation fut facile. L’endroit où ils habitent se trouve plutôt dans la banlieue bucarestoise, donc ils bénéficient à la fois du confort de la ville et du calme de la campagne. Sabina Dumitrescu : «Puisqu’on doit se déplacer beaucoup, il faut très bien organiser ses voyages en voiture. Pourtant, à mon avis, ça vaut la peine. Au moment où l’on rentre chez soi, l’ambiance est tout à fait différente. Il y a la cour, il y de l’espace. Je n’ai pas été depuis toujours obsédée par la nature ou les fleurs. J’aimais la vie en ville, la vie citadine active, cela me faisait plaisir de sortir avec les amis. Au moment où les enfants sont venus au monde, cela a commencé à changer; d’autres choses ont commencé à prendre le dessus et cela m’a paru tout à fait naturel de changer de place» .
Lorsqu’ils ont démarré leur affaire, les 4 amis, tous trentenaires, ne connaissaient rien à l’agriculture. Ils avaient chacun une autre formation — en psychologie, informatique, architecture et mathématiques. 4 ans se sont écoulés depuis et ils sont en train de se lancer dans la culture biologique. Matei Dumitrescu : « En général, nous cultivons des légumes et assez peu d’arbres fruitiers. Et parmi les légumes, nous nous contentons des plus habituels. Nous avons toute une équipe — surtout en été, quand la saison agricole bat son plein, nous avons de nombreux ouvriers saisonniers. C’est là un des secrets de l’affaire: savoir choisir les meilleurs ouvriers. J’espère que dans deux ou trois ans, nous obtiendrons le certificat et pourrons appliquer le sceau agriculture écologique (AE) sur nos produits. Toutes les sociétés qui souhaitent faire de l’agriculture écologique passent, au début, par une période de transition qui peut durer plusieurs années » .
Par conséquent, pendant cette période de crise, les solutions pour mieux vivre semblent se diversifier. Qu’ils soient en quête d’une vie plus décente ou plus saine et plus proche de la nature, les Roumains commencent à se tourner vers la campagne, contrebalançant quelque peu la migration et le travail à l’étranger. (trad.: Ioana Stăncescu ; Dominique)