L’enseignement secondaire sous la loupe
L’enseignement secondaire de Roumanie a connu pas mal de changements ces 20 dernières années, mais, au regard des maigres résultats au bac 2012, leur efficacité est mise en doute de plus en plus. Dans plusieurs comtés du pays le taux de réussite ayant été nettement inférieur à celui des précédentes sessions du baccalauréat, soit moins de 50%, l’on a pu conclure au manque de maturité tant des élèves que du système éducatifen tant que tel.
Ana-Maria Cononovici, 31.07.2013, 01:00
L’enseignement secondaire de Roumanie a connu pas mal de changements ces 20 dernières années, mais, au regard des maigres résultats au bac 2012, leur efficacité est mise en doute de plus en plus. Dans plusieurs comtés du pays le taux de réussite ayant été nettement inférieur à celui des précédentes sessions du baccalauréat, soit moins de 50%, l’on a pu conclure au manque de maturité tant des élèves que du système éducatifen tant que tel.
En Roumanie, les écoles privées représentent moins de 1% du total des établissements scolaires, les premières étant apparues en 1995. Ceci étant, elles ne sauraient faire une vraie concurrence à l’enseignement public. Les problèmes auxquels ce dernier se confronte relèvent de deux aspects. Il doit composer non seulement avec une base matérielle insuffisante ou défaillante, surtout en milieu rural, mais aussi avec des carences au chapitre ressources humaines. Les raisons financières poussent les professionnels à quitter le système. D’où le grand nombre de vacances et la sélection d’enseignants au niveau de formation plutôt faible.
Une approche schématique révèle pourtant que l’offre scolaire répond aux besoins des élèves, du moins pour ce qui est de la communication en langue maternelle, y compris dans le cas des minorités ethniques, et de l’acquisition de certaines compétences nécessaires à l’intégration sociale, telle l’utilisation de l’ordinateur.
La Roumanie chute dans le classement international, selon les résultats des tests PISA, mis en place en 1997 par l’Organisation de coopération et de développement économique en vue de l’analyse comparativedes évaluations sur les acquisdesélèvesde 15 ans dans plusieurs pays. Bien que contestés, les tests PISA soulèvent à nouveau le problème de la qualité de l’enseignement.
Remus Pricopie, ministre roumain de l’Education, tire la sonnette d’alarme: « A mon sens, se poser la question de savoir ce que l’on fait et pourquoi, et puis combien vaut notre démarche éducative, cela n’est pas censé aboutir à des résultats. Certes, le classement reposant sur les tests PISA est tout différent de celui dit Top-Shanghaï, qui prend en compte les universités. PISA établit une hiérarchie à partir d’acquisitions élémentaires, tenues pour obligatoires à un certain âge, telles que l’intelligence d’un texte ou les calculs. On pourrait, bien sûr, contre-argumenter, dans le cas d’un élève qui peine à lire un texte et à l’interpréter, qu’il a, en échange, une bonne conduite ou qu’il s’y connaît à l’ordinateur ou à je ne sais quoi d’autre. Quelles que puissent être les réserves à l’égard des tests PISA, je pense qu’il faudrait les ranger parmi les indicateurs de qualité du processus éducatif dans tous les pays, Roumanie comprise. Or, si l’on tient compte de ces tests, nous savons que nous ne sommes pas bien placés. »
Malgré l’élan que peut susciter une telle conclusion, Remus Pricopie semble enclin à procéder à une analyse plus poussée. « Je ne saurais opérer un changement du jour au lendemain. Quand il s’agit de la qualité il faut savoir ce qu’un professeur ou un enseignant comprend par qualité. C’est la réalité sur le terrain qui doit nous servir de point de départ. Il est inutile de promouvoir une politique si le terme en question ne se retrouve pas dans le langage de l’enseignant. Le système compte des centaines de milliers d’enseignants. Par conséquent, il faut veiller non seulement au caractère unitaire des cours, mais aussi à la création de certaines valeurs relevant de la qualité. Moi, je vous propose de parler des politiques intégrées, car en parlant de la qualité, on pense aussitôt au professeur. La qualité de l’acte d’enseignement dépend de la qualité de l’enseignant. Les laboratoires, les salles de classe, les mini-bus, qui sont eux aussi importants, arrivent ensuite. Mais la qualité de l’acte d’enseignement équivaut à la qualité de la formation, depuis la formation initiale jusqu’à celle continue. La qualité de l’enseignant, c’est le niveau de rémunération, et au delà de tout cela, ce que l’on investit dans l’enseignant ».
Fin observateur depuis 6 ans du système roumain d’enseignement, l’académicien Solomon Marcus pointe du doigt d’autres défaillances de l’éducation. Hormis le besoin d’identifier les problèmes relevant de la structure des manuels et des curricula et la relation enseignant-élève, l’objet de l’éducation semble lui aussi difficile à comprendre. « Je trouve que « l’objet de l’éducation » est formulé de manière inadéquate. De tout ce que j’ai lu, j’ai compris que l’éducation est présentée comme une accumulation des connaissances et la formation de capacités cognitives. Des capacités de compréhension et de comportement aussi bien dans des situations typiques que dans des situations inédites. Le mot clé, c’est comprendre, et non pas connaître. Je pense qu’on doit prendre comme point de départ les besoins et les droits de l’enfant, de l’adolescent et du jeune. Car on n’en tient pas compte : un besoin fondamental de l’enfant, c’est qu’il comprenne. En même temps, il a besoin de mettre en corrélation l’effort et la récompense. C’est là qu’intervient le droit de l’enfant à faire des erreurs sans qu’il soit puni. S’y ajoute le droit au jeu. Le grand jeu d’apprendre et de créer, tout en gardant le droit de faire des erreurs et d’échouer, est raté. »
Les écoles peuvent être réhabilitées, les salles de classes – rénovées, et les manuels – rééditées. Il reste toutefois le besoin d’accroître l’intérêt des élèves pour l’acte d’éducation et de mettre en exergue son utilité, de sorte que le désir de connaître devienne une option naturelle. ( trad. : Mariana Tudose, Alexandra Pop)