Les ours… caméramans
Ana-Maria Cononovici, 28.12.2021, 13:25
Une nouvelle
campagne pour la protection des grands carnivores a été mise en place, fin
novembre, en Roumanie. Lancée par la filiale locale de World Wildlife Fund (soit
le Fonds mondial pour la nature ou WWF) et ses partenaires, dans le cadre du
projet LIFE# EuroLargeCarnivores, la campagne a permis aux passionnés de nature
de suivre sur les réseaux sociaux des images filmées du point de vue de
l’animal dans son milieu naturel. Tout cela grâce à des caméras embarquées dont
les ours ont été équipés.
Gavril Marius Berchi, manager de projet chez
WWF Roumanie, raconte : « Cette
idée nous est venue après avoir constaté qu’en fait, on connait très peu sur le
comportement social des ours, vu les difficultés qu’une telle recherche
implique, notamment à long terme. C’est donc grâce au Projet européen de
gestion des grands carnivores EuroLargeCarnivores que l’on s’est proposé d’en
apprendre davantage. On a donc équipé trois ours de trois caméras embarquées.
Il s’agit d’un mâle de 4 ans qui a été expatrié dans les Monts Călimani, après
avoir constaté sa présence aux abords de la ville de Târgu Mureş. Et puis, de
deux autres oursons, un mâle et une femelle, âgés d’un an, un an et demi et qui
vivent dans le Centre pour les ours orphelins Bear Again du département de
Harghita. »
Qu’est-ce que
les chercheurs ont découvert une fois récupérés les colliers GPS dotés de
caméras ? Gavril Marius Berchi, chef de projet chez WWF Roumanie : « On a observé que même orphelins, les
oursons se débrouillent tout seuls. Ils socialisent les uns avec les autres et
vivent ensemble. Une fois relâchés dans la nature, ils continueront à rester
ensemble une période avant de se séparer et devenir solitaires. Dans le cas du
troisième ours, l’adulte, un aspect très important à signaler fut le constat
que cet exemplaire a parcouru une distance très grande de presque 500
kilomètres, à travers la Roumanie et il n’est jamais revenu sur les lieux d’où
on l’a pris. »
En fait, aux
dires de Gavril Marius Berchi, force est de constater que dans le cas des
grands carnivores, une fois déplacés, ils ne reviennent plus là d’où ils sont
partis. En plus, ils peuvent parcourir de grandes distances dans très peu de
temps, ce qui rend leur gestion encore plus difficile.
Gavril Marius
Berchi : « Les données recueillies
nous ont permis de constater que l’ours avait détruit plusieurs ruchers. Il
s’était déplacé sur plus de 500 kilomètres à travers la Roumanie avant de
passer en Ukraine où la connexion s’est interrompue. Les seuls dégâts qu’il ait
fait furent quelques ruchers, aussi bien en Roumanie qu’en Ukraine. »
On ne saurait
dire si c’est suite à un problème de caméra ou si c’est parce que l’ours est tombé
victime des braconniers que les données recueillies à la fin par les
écologistes se sont avérées insuffisantes.
Une chose est certaine
: des informations manquent toujours, affirme Gavril Marius Berchi : « A part les données en rapport
avec leur organisation sociale et leur comportement, on aurait bien aimé en apprendre
davantage sur les différents habitats des ours, sur les territoires transités,
les routes empruntées, les barrières qu’ils doivent surmonter et surtout, sur
la confirmation de la fonctionnalité de certains corridors écologiques. Tout
cela parce qu’on a des projets qui se proposent ou qui se sont proposé d’identifier,
dans les Carpates, de possibles corridors écologiques et on voudrait savoir
lesquels d’entre eux seraient fonctionnels. Un autre aspect tout aussi
important serait l’interaction des ours avec d’autres espèces, tout comme leur
présence auprès des villages. Eh bien, toutes ces données, nous, on aurait dû
les collecter grâce à l’ours perdu en Ukraine. On aurait aimé en savoir
davantage sur sa présence, près des villages, si c’était le cas. »
En tant qu’omnivores, les ours sont attirés par les endroits où l’accès
à la nourriture est facile, notamment dans les zones peuplées, où la gestion
des déchets est déficitaire. Souvent, ils sont obligés de chercher de la
nourriture ailleurs à cause de l’exploitation exhaustive des ressources
naturelles au sein de leur habitat (par exemple cueillette des champignons ou
des fruits des bois). Par conséquent, les ours sont perçus comme un danger pour
la population.
Et vu que l’on est en pleine période des fêtes de fin d’année, WWF
Roumanie nous propose d’offrir un cadeau plutôt spécial : une peluche
représentant un animal protégé, dont le rachat équivaut à un don pour la
protection des animaux sauvages de Roumanie.
Gabriel Marius
Berchi, manager de projet chez WWF Roumanie, ajoute : « La
conservation demande des ressources financières importantes. Pour certaines
activités nous ne réussissons pas toujours à couvrir le nécessaire. Par
conséquent, en achetant une peluche, vous recevez l’animal préféré sous forme
de jouet, et nous recevons le don qui nous permet de couvrir certains coûts
(pour protéger les animaux). »
Quant
aux deux bébés ours de la campagne dont nous venons de parler, au printemps,
ils retrouveront la vie en liberté, dans les forêts des Carpates. (Trad. Ioana
Stancescu, Valentina Beleavski)