Des traditions qui perdurent
Aujourd’hui nous parlons traditions.
Souvent, les fêtes religieuses se superposent aux fêtes archaïques. C’est le
cas, entre autres, des célébrations qui marquent le début du carême de Pâques. En
Roumanie ces fêtes s’appellent « Lăsata secului », une sorte de Mardi
Gras, si vous voulez.
Ana-Maria Cononovici, 03.08.2021, 13:11
Aujourd’hui nous parlons traditions.
Souvent, les fêtes religieuses se superposent aux fêtes archaïques. C’est le
cas, entre autres, des célébrations qui marquent le début du carême de Pâques. En
Roumanie ces fêtes s’appellent « Lăsata secului », une sorte de Mardi
Gras, si vous voulez.
Le printemps venu, les Roumains
célèbrent par exemple la « Journée des coucous », une tradition très ancienne
encore vivante à Brăneşti, près de Bucarest. Une fête si importante pour les
habitants de cette petite ville qu’ils ont fait de leur mieux pour la
préserver, raconte M Marius Ovidiu Sebe, professeur de géographie et chef de l’Association
culturelle Brăneşti.
Marius Ovidiu Sebe : « En 2013, nous avons conclu un partenariat avec les institutions
importantes de la ville afin de sauvegarder cette tradition. Concrètement, il s’agit
d’impliquer les établissements scolaires en les invitant à former des groupes
de « coucous » et à participer à un festival censé ressusciter cette
tradition qui, malheureusement se dégradait d’une année à l’autre ; en
fait, elle risquait de disparaître. Cette année, la pandémie qui nous affecte
tous n’a pas épargné cette coutume. L’année dernière nous avons réussi à la célébrer,
le 2 mars, juste avant le confinement. Le festival a accueilli des invités de l’étranger
et ce fut une édition extraordinaire. Cette année, en raison des restrictions
imposées, il a été carrément impossible d’organiser quoi que ce soit. Les rues
de Brăneşti étaient vides à l’exception d’un petit groupe de « coucous
» qui a défilé comme à l’accoutumée juste pour promouvoir la tradition, en
respectant toutes les normes de distanciation sociale, dont le masque. Alors
que l’année dernière il y avait eu des centaines de « coucous » dans
les rues. »
Ce fut quand même une bonne
occasion de débattre de cette tradition en ligne, lors d’un symposium qui est
devenu lui aussi traditionnel, comme nous le dit notre invité, Marius Ovidiu
Sebe. Il nous explique concrètement en quoi consiste la tradition des « Coucous
» de Brăneşti : « Les « Coucous » sont de jeunes hommes mariés,
costumés en vêtements de femmes, portant une ceinture aux clochettes, un masque
sur le visage et une sorte de fichu sur la tête. Ils sautent et dansent et font
du bruit avec leurs clochettes, une sorte de balai à la main, ou plutôt un
bâton avec un fil attaché, au bout duquel il y a une chaussure traditionnelle
appelée « opincă ». Ils parcourent les rues du village pour chasser les
mauvais esprits, en frappant sur les épaules toute personne rencontrée, pour qu’elle
soit en bonne santé toute l’année. Cette tradition fait partie des célébrations
d’avant le carême de Pâques, elle est une des plus anciennes, censée marquer
aussi le passage à une nouvelle année végétale. »
Voilà donc une tradition qui
a failli disparaître et qui survit toujours grâce à une poignée de personnes
très motivées de la commune de Brăneşti, malgré toutes les difficultés imposées
par la pandémie.
Direction maintenant le delta
du Danube, pour découvrir une autre tradition de printemps. A Enisala, dans le
nord de la Dobroudja, parmi les communautés locales de Russes, une autre fête
marque le début du carême. Les Russes des communes de Sarichioi et Jurilovca
ont célébré « la Fête du pardon » près de la citadelle d’Enisala par un
spectacle folklorique. C’était la dernière semaine avant le début du carême de Pâques.
Davantage de détails avec
Catalin Tibuleac, président de l’Association de gestion du tourisme dans le
delta du Danube : « Cette première fête, en partenariat avec la mairie de
Sarichioi et de Jurilovca, a été marquée par les mesures de sécurité sanitaire
en place. Et pourtant, la Fête du pardon a été une raison de joie, une occasion
pour les deux grandes communautés russes du delta du Danube de se réunir. En
effet, deux groupes représentatifs des deux communes se sont réunis près de la
cité, à Enisala, afin de fêter la Maslenita et de marquer la fin de l’hiver et
le début du printemps. D’habitude, cette fête est également connue sous le nom
de la Fête des crêpes, parce que les crêpes au fromage sont des produits
gastronomiques spécifiques que l’on prépare et l’on mange à cette occasion. En
effet, chaque année, les Russes lipovènes marquent la fin de l’hiver et le
début du printemps la veille du carême. La Maslenita constitue en fait une
occasion de demander pardon aux autres, une raison de se réjouir, de chanter et
de se réunir au sein de la famille. C’est une tradition préservée depuis
plusieurs centaines d’années, que les Russes lipovènes respectent rigoureusement.
Les vêtements traditionnels des Russes sont pleins de couleurs, il s’agit de
robes décorées de fleurs, alors que les habits des hommes sont extraordinaires.
S’y ajoutent les chansons traditionnelles tout à fait spéciales. »
Les 14 minorités qui
constituent ce conglomérat qu’est le delta du Danube cherchent à préserver
toutes les traditions de la région, explique Catalin Tibuleac, président de
l’Association de gestion de de la destination touristique delta du Danube, qui
ajoute que : « Cette année, les conditions de sécurité sanitaire et de
prévention nous ont imposé des restrictions majeures, et par conséquent la
réunion des deux communautés de Sarichioi et de Jurilovca s’est réalisée en
ligne, en visioconférence. Nous espérons que l’année prochaine, cette fête sera
organisée d’une manière beaucoup plus ample, dans le contexte post-pandémie, et
que nous pourrons présenter en détail ces fêtes et traditions superbes. Nous
invitons à y participer tous ceux qui souhaitent fêter le printemps. C’est
également une excellente occasion de donner le coup d’envoi à la saison
touristique. Nous invitons donc tous les passionnés de nature et du delta du
Danube à visiter cette contrée. »
Voilà, amis auditeurs,
comment, malgré la pandémie et les nombreuses restrictions, en Roumanie les
traditions authentiques demeurent toujours d’actualité. (Trad. Valentina Beleavski, Alex Diaconescu)