« Il y a quelqu’un à la maison ? »
Après des études de photographie documentaire, à
Londres, Ionuţ Teoderaşcu est rentré en
Roumanie. Muni d’un appareil photo ou de sa caméra, il s’est mis à redécouvrir
le monde qu’il avait laissé derrière en quittant le pays. Pendant les deux
semaines qu’il a passées cloîtré dans son appartement, Ionuţ Teoderaşcu a préparé
et lancé son projet intitulé « Chantier en temps de pandémie », où il a
immortalisé les travaux menés à l’immeuble voisin. Son projet suivant,
« Les campagnes et la pandémie », dévoile, à travers les photos, le
quotidien des villageois, presque figé dans le temps, avec, pour unique
changement, le port du masque. Ce qui a retenu notre attention, c’est le projet
« Il n’y a personne à la maison », qui a valu à Ionuţ Teoderaşcu le Prix d’or
du concours international de photographie de Budapest (Budapest International
Photo Awards 2020), dans la catégorie « Gens / Famille ».
Ana-Maria Cononovici, 23.02.2021, 11:36
Après des études de photographie documentaire, à
Londres, Ionuţ Teoderaşcu est rentré en
Roumanie. Muni d’un appareil photo ou de sa caméra, il s’est mis à redécouvrir
le monde qu’il avait laissé derrière en quittant le pays. Pendant les deux
semaines qu’il a passées cloîtré dans son appartement, Ionuţ Teoderaşcu a préparé
et lancé son projet intitulé « Chantier en temps de pandémie », où il a
immortalisé les travaux menés à l’immeuble voisin. Son projet suivant,
« Les campagnes et la pandémie », dévoile, à travers les photos, le
quotidien des villageois, presque figé dans le temps, avec, pour unique
changement, le port du masque. Ce qui a retenu notre attention, c’est le projet
« Il n’y a personne à la maison », qui a valu à Ionuţ Teoderaşcu le Prix d’or
du concours international de photographie de Budapest (Budapest International
Photo Awards 2020), dans la catégorie « Gens / Famille ».
Le photographe documentaire Ionuţ Teoderaşcu nous a
raconté les débuts de ce projet : « L’idée du court-métrage documentaire « Il
n’y a personne à la maison » a pris contour en avril 2019, lorsque je suis allé
revoir la maison de ma grand-mère. Comme elle n’était plus habitée depuis une
dizaine d’années, j’étais curieux de voir ce qu’il y avait à l’intérieur. Une
fois là, j’allais constater que toutes les affaires de ma grand-mère étaient
restées intactes, comme enfermées dans une sorte de capsule temporelle.
J’allais y revenir, en compagnie de mon père, que j’ai prié de me raconter son
enfance et la vie de ses parents. Je n’avais pas connu mon grand-père paternel,
mort à seulement 44 ans. Puis, une autre fois, j’y suis retourné avec mes tantes.
Leurs récits m’ont aidé à découvrir une bonne partie du passé de ma grand-mère.
C’est en ces temps et lieux que l’idée m’est venue de tout agencer dans un
court-métrage documentaire, car cela me permettait de combiner les images et les sons que
j’avais enregistrés lors de mes visites à la maison de ma grand-mère,
accompagné de mes parents ou de mes tantes. Ce court-métrage documentaire, je l’ai
réalisé à la fin de l’année dernière… »
L’accueil réservé à ce court-métrage a dépassé les
attentes de l’auteur. Ionuţ Teoderaşcu : « Au moment du lancement, en
Roumanie, lors d’un Takeover, il est apparu sur l’image Instagram du magazine Rien
qu’une revue. C’est là que j’ai raconté l’histoire, pour la première
fois. En fait, le court-métrage avait déjà été présenté au Royaume-Uni, sur une
plateforme dédiée à la photographie documentaire. J’ai également participé avec
ce projet à une compétition, organisée avant la fin de l’année. Un album photo
avec des étudiants, l’un des premiers réalisés par Canon, a accueilli mon
projet. Puis j’ai participé à un concours à Budapest, où j’ai remporté le Gold
Vibe, le Prix d’or. Plus tard, il a été diffusé sur d’autres réseaux, ici, en
Roumanie. »
Ionuţ Teoderaşcu nous a présenté l’histoire du film : « C’est
le sentiment de plonger dans une autre époque. Dès que l’on pénètre dans la
maison, on est sous l’emprise d’images à fort impact émotionnel : murs
décrépits, immenses toiles d’araignées. Des images que l’on ne voudrait pas
voir, surtout quand on a un lien personnel avec la famille qui y a vécu.
Pourtant, on a là un espace qui préserve très bien l’histoire d’une famille,
car, en fin de compte, on est défini par l’endroit où l’on vit. Tout au long
des années qu’elle y a vécues et surtout les 20 dernières qu’elle y a passées
seule, ma grand-mère a rassemblé et sagement rangé tout ce dont elle avait
besoin, y compris les choses nécessaires à son enterrement. J’y ai retrouvé des
médicaments ou bien des lettres que ma grand-mère avait gardées. Toutes ces
choses-là racontent l’histoire de la personne qui y a vécu. »
Le film nous emmène au village de Crăieşti, dans le comté
de Galati. L’auteur, qui y a passé son enfance, nous fait découvrir une maison
à part. Ionuţ Teoderaşcu : « Elle est atypique pour la région, en ce sens
qu’ici on construit habituellement des maisons de petites dimensions, avec deux
pièces. La maison de ma grand-mère a son histoire à elle. Elle avait été
destinée initialement à abriter une préfecture ou une mairie. Ce n’est que plus
tard qu’elle a été vendue à mon grand-père. Construite il y a une centaine
d’années, avec des matériaux de bonne qualité, dont du bois massif, la maison,
perchée sur une colline, surplombe le village sur lequel elle offre une vue
imprenable. »
Ionuţ Teodereşcu
nous a également lancé une invitation : « Je vous invite à regarder ce
court-métrage documentaire, que vous trouverez sur mon site internet teoderaşcu.com,
sur YouTube ou sur ma page Facebook. A mon avis, il raconte l’histoire de
plusieurs familles et nous montre comment appréhender le passé familial, tout
en sachant qu’il y a toujours une part de subjectivité dans le récit. Puisqu’on
veut croire que nos parents ont eu une belle vie, on essaie, après leur mort,
de reconstruire le passé et d’y apporter une touche romantique. Voilà donc
cette autre chose dont je parle dans mon film, en plus de l’histoire de vie de
mes grands-parents. »
A noter aussi que
la ville de Zalău accueille l’exposition « Les visages de la
pandémie », réunissant des photos réalisées par Ionuţ Teoderaşcu. (Trad. Mariana Tudose)