Billets doux, lettres de pardon et de mal d’amour
Elle remonte à quand, votre dernière lettre manuscrite autre qu’une carte de vœux ou une invitation à je ne sais quelle cérémonie ? Une lettre écrite avec la plume du cœur, commençant par « Cher X, chère Y… », et qui finisse par « Bien à vous… ». J’imagine que cela devait se passer il y a assez longtemps. Nous vivons dans l’ère de la vitesse ; qui a encore le temps d’attendre les lettres envoyées par la poste alors que nous pouvons communiquer instantanément avec n’importe qui se trouvant n’importe où ? En même temps, nous écrivons de moins en moins à la main, sans doute plus difficilement et probablement notre écriture est de moins en moins lisible. Toutefois, les moyens modernes de communication nous imposent souvent des limites, comme par exemple un nombre fini de lettres.
România Internațional, 10.04.2014, 16:47
Elle remonte à quand, votre dernière lettre manuscrite autre qu’une carte de vœux ou une invitation à je ne sais quelle cérémonie ? Une lettre écrite avec la plume du cœur, commençant par « Cher X, chère Y… », et qui finisse par « Bien à vous… ». J’imagine que cela devait se passer il y a assez longtemps. Nous vivons dans l’ère de la vitesse ; qui a encore le temps d’attendre les lettres envoyées par la poste alors que nous pouvons communiquer instantanément avec n’importe qui se trouvant n’importe où ? En même temps, nous écrivons de moins en moins à la main, sans doute plus difficilement et probablement notre écriture est de moins en moins lisible. Toutefois, les moyens modernes de communication nous imposent souvent des limites, comme par exemple un nombre fini de lettres.
Inspirée par un film récent nominé aux Oscars, Loredana Munteanu a décidé d’offrir aux Roumains un service gratuit hors du commun : elle transcrit des messages avec de l’encre sur du papier recyclé. Une manière alternative de communiquer, qui met l’accent sur l’émotion, sur l’histoire, sur les gestes simples qui comptent pour beaucoup, explique Loredana Munteanu : « Un projet spécial sans occasion spéciale, c’est ainsi que nous l’avons appelé. Concrètement, on écrit avec le stylo sur du papier recyclé des lettres qui sont par la suite livrées à bicyclette. C’est aussi un concept responsable avec la nature. Nous devenons une extension de l’expéditeur. A l’heure qu’il est, les gens disposent de tous les gadgets actuels qui les déterminent plutôt à envoyer des courriels, des textos et autres messages virtuels. Nous ne rédigeons pas les messages que nous envoyons, nous les transcrivons tout simplement pour venir en aide aux gens qui n’ont pas le temps de le faire eux-mêmes ou dont l’écriture n’est pas lisible».
Loredana Munteanu et son équipe intitulée «L’art ne mord pas» ont déjà reçu 250 demandes depuis début mars, lorsqu’ils ont fait part de leur initiative aux bucarestois. Ce sont des messages pleins d’émotion, affirme Loredana. Ce ne sont pas uniquement des lettres d’amour, leurs destinataires sont aussi d’anciens amis, les parents ou les grands-parents de ceux qui ne leur ont pas écrit depuis longtemps.
La lettre d’une jeune femme ayant une histoire similaire à la sienne a le plus touché Loredana: «Il s’agit d’une jeune fille qui habite à Bruxelles depuis 3 ans et qui regrette de ne pas avoir réussi à revoir sa mère pendant tout ce temps ; elle lui demande pardon. Je pense qu’elle pleurait en écrivant sa lettre, surtout qu’elle mentionne le fait qu’il était 3 heures du matin, qu’elle était en train d’écouter une chanson qui lui rappelait sa mère, restée seule à Bucarest. Elle espérait pouvoir revenir en Roumanie du moins pour Pâques, après 3 années d’absence. Moi aussi je suis loin de ma mère, qui n’est pas en Roumanie. Nos histoires se ressemblent d’une certaine manière, sauf que les rôles sont inversés : la fille est à Bucarest et la mère est ailleurs».
Combien coûte l’envoi d’une telle lettre, avec une belle écriture, dans une belle enveloppe scellée avec de la cire rouge, comme on le faisait jadis? Rien du tout. Comment ça se passe ? Loredana Munteanu explique : «Nous avons des partenaires qui nous soutiennent et grâce auxquels notre service restera gratuit. Il faut remplir le formulaire se trouvant sur notre site Internet, l’expéditeur ayant la possibilité d’offrir aussi une surprise de la part de nos partenaires, toujours à titre gratuit, par exemple un livre ou des produits de beauté. Nous espérons que les gens deviennent de plus en plus réceptifs à cette idée, nous espérons que cela les rapproche par des gestes un peu oubliés. Nous communiquons à l’aide de gens et non pas à l’aide d’objets. Il faudrait que les gens profitent de ce service et se souviennent plus souvent des personnes importantes dans leur vie».
Le projet de Loredana sera disponible tant que son équipe disposera de ressources… humaines. Surtout qu’ils ont déjà reçu des demandes d’élargir leur zone de livraison au-delà de la capitale.
Loredana Munteanu: « Nous sommes très contents de la façon dont le projet a évolué, car nous avons reçu des messages d’autres villes des 4 coins du pays, de Deva et Cluj (dans le centre du pays), Timişoara (dans l’ouest) et Iaşi (dans le nord-est). Ce sont des gens qui souhaitent nous aider à livrer des lettres dans leur région, notamment des organisations de cyclistes. Et c’est vraiment touchant de voir notre idée fleurir et réunir de plus en plus de bénévoles, mais aussi de constater combien nombreuses sont les personnes qui souhaitent envoyer une lettre écrite à la main à leurs proches. Nous encourageons tous les Roumains à trouver une personne à laquelle ils aimeraient faire une telle surprise, à prendre le temps de réfléchir qui dans leur vie mériterait une lettre».
Et si les Roumains ont du mal à entamer une lettre ou n’ont pas trop de talent littéraire, il leur suffit d’entrer sur le site de l’équipe « L’art ne mord pas » pour trouver la bonne inspiration. A part les formules pour commencer ou terminer une lettre, ils découvriront le principal message de Loredana et de ses collègues: écrivez avec le cœur!
Alors, qu’en pensez-vous, amis auditeurs? Aimeriez — vous envoyer une lettre à quelqu’un de très proche? Alors, à vos stylos! (trad. Mariana Tudose, Valentina Beleavski)