Le premier musée de Street Art de Roumanie
En novembre dernier, dans le vieux Bucarest, centre de la capitale roumaine, plus précisément à l’adresse 4, Rue Şelari, était inauguré le centre culturel Pop-Up Urban Lifestyle. C’est là que l’on a ouvert le premier musée de Street Art de Roumanie, sur l’initiative de Claudio Scorretti, attaché culturel à l’ambassade d’Italie à Bucarest et fervent admirateur de l’art roumain.
România Internațional, 05.12.2013, 14:55
En novembre dernier, dans le vieux Bucarest, centre de la capitale roumaine, plus précisément à l’adresse 4, Rue Şelari, était inauguré le centre culturel Pop-Up Urban Lifestyle. C’est là que l’on a ouvert le premier musée de Street Art de Roumanie, sur l’initiative de Claudio Scorretti, attaché culturel à l’ambassade d’Italie à Bucarest et fervent admirateur de l’art roumain.
Nous lui avons demandé comment était née l’idée d’organiser un musée pour abriter les oeuvres des artistes qui préfèrent exhiber leur art sur les murs de la ville plutôt que sur les cimaises des galeries spécialisées : « Cela fait une trentaine d’années que je suis l’évolution du phénomène street art. Je l’ai vu d’abord à New York, où j’ai habité, ensuite à Rome, ma ville natale, à Paris, Bruxelles et Londres. Je me trouve à Bucarest depuis quatre ans déjà et je m’occupe aussi de l’art. J’ai pensé que ces couleurs recouvrant les murs pouvaient changer le visage de la ville, qui, d’un point de vue architectural, garde encore les traces de la période communiste ».
10 des artistes les plus connus du moment, graffeurs ou créateurs de street art, exposent leurs ouvrages dans le musée de la rue Selari. Alexandru Ciubotariu, mieux connu sous le pseudonyme Pisica Pătrată, Le Chat carré, affirme que l’endroit occupé désormais par ce musée est très provocateur : « Ce terrain était convoité par de nombreux artistes qui créent dans cette zone du graffiti. C’est un espace très large, aux longues surfaces grises et rugueuses. C’est vrai que la météo n’est pas toujours favorable. En plus, pour dessiner sur les murs on a besoin de charpentes et de sommes d’argent considérables pour s’acheter les peintures et autres matériels nécessaires. Voilà pourquoi on a eu recours à des panneaux qui ont servi de support aux ouvrages de plusieurs artistes. C’est du street art organisé. »
Ceux qui ont choisi d’exprimer leurs émotions à travers le graffiti prennent des risques insoupçonnables, affirme Alex Ciubotariu. A l’époque communiste et même au lendemain des événements de 1990, personne n’aurait osé couvrir de dessins les murs extérieurs des immeubles. 16 années ont dû s’écouler jusqu’à ce que le premier mur de la capitale, celui de l’Institut français de Bucarest, puisse être utilisé comme support pour des graffiti. Cela se passait lors des manifestations consacrées au 70e anniversaire de cette institution. Même s’il était très beau, ce graffiti n’a pas plu à tout le monde, se souvient Alex Ciubotariu. On a donc vite fait de le couvrir : « Les réactions ont été très dures, mais ce tollé nous a profité. Il y a eu d’autres tentatives aussi de faire rentrer dans la légalité cet art et de faire connaître ces artistes dont les oeuvres sont à tort considérées comme des griffonnements. Or, la ville de Bucarest a besoin de ce genre d’artistes. La question qui se pose est de savoir si le street art évolue sous sa forme la plus sincère et la plus correcte. En fin de compte, c’est une intervention illégale. La motivation doit être incitante pour qu’elle vous pousse à sortir en plein nuit, histoire de réaliser ces dessins dans l’espace public qui vont susciter critiques et louanges. La sincérité de cet art consiste en la décision de l’artiste d’intervenir en laissant de côté l’idée du gain, de la célébrité ou de je ne sais quel autre bénéfice, car bien des fois il se cache derrière un pseudonyme. Je trouve nécessaire cet art. Avec mon personnage, le Chat Carré, je n’ai rien fait d’autre qu’intervenir dans certaines zones de la capitale afin de les mettre en valeur. Une tache de couleur et un peu de forme, cela fait du bien à certains endroits à l’air abandonné ».
Revenons-en rue Selari. Claudio Scorretti se réjouit de l’accueil que le public réserve aux ouvrages qui s’étalent dans le vieux centre historique de Bucarest : « Les gens adorent se prendre en photo devant les panneaux du musée de Street art. C’est peut-être cet aspect précis qui attire le plus le public, car dans un musée ordinaire il est interdit de se faire photographier devant un tableau. Autant dire que c’est une manière très amusante d’entrer en contact avec l’art ».
Selon Alex Ciubotariu, c’est à la Gare du Nord que l’on peut admirer le plus beau graffiti de Bucarest : « Il se trouve sur un mur du quai 14 de la gare . Ce graffiti réalisé pour le festival Train Delivery est très visible et très beau. Il me plaît beaucoup ».
Si vous êtes de passage à Bucarest ou si vous y arrivez par le train ne manquez pas de vous rendre à la Gare du nord, quai numéro 14 et puis rue Selari, au musée de Street Art. Vous pourrez même acheter des ouvrages dans le mini-centre commercial aménagé dans plusieurs conteneurs. (trad. : Mariana Tudose)