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Le centenaire du roi Michel I de Roumanie

2021, année riche en anniversaires diverses, marque aussi le centenaire du roi Michel I, le dernier souverain roumain. Le roi Michel a été un grand roi, qui avait mené le bateau de la Roumanie contre vents et marées, à une époque charnière de l’histoire du 20e siècle.

Le centenaire du roi Michel I de Roumanie
Le centenaire du roi Michel I de Roumanie

, 01.11.2021, 09:41

2021, année riche en anniversaires diverses, marque aussi le centenaire du roi Michel I, le dernier souverain roumain. Le roi Michel a été un grand roi, qui avait mené le bateau de la Roumanie contre vents et marées, à une époque charnière de l’histoire du 20e siècle.






Né le 25 octobre 1921 au château de Peleș, la résidence d’été des
souverains roumains à Sinaia, fils du roi Carol II et d’Hélène, princesse de
Grèce et de Danemark, dans les veines du futur roi coulait le sang de la reine
Victoria de Grande-Bretagne, mais aussi le sang des prestigieuses lignées des Hohenzollern
et des Romanov. Mais le roi Michel I a toujours martelé : « Je suis
Roumain, de naissance et d’élection ». Son nom avait été choisi en mémoire
du célèbre voïvode de Valachie du 17e siècle Michel le Brave, sous
le sceptre duquel furent réunies pour la première les provinces historiques de
Valachie, de Moldavie et de Transylvanie. Le roi Michel I fut appelé à monter
pour la première fois sur le trône de la Roumanie en 1927, lorsqu’il n’avait
que 6 ans, à la mort de son grand-père, le roi Ferdinand I. Son père, le roi Carol
II, tombé sous le charme d’une demi-mondaine, Elena Lupescu, avait renoncé à
ses droits de succession une annnée auparavant, en 1926. Après trois années de
régence pourtant, il revient en Roumanie et reprend la couronne, avec l’aval du
gouvernement et sous les acclamations de ses partisans. Le roi Michel, âgé de 9
ans à l’époque, reçoit le titre de Grand Voïvode d’Alba Iulia, étant relégué
par son père au statut de prince héritier. Dix années plus tard, en 1940, débutait
le second règne du roi Michel, après l’abdication du roi Carol II. La Roumanie
venait d’être dépecée, d’importantes parties du territoire national ayant été
concédées à l’URSS, à la Hongrie et à la Bulgarie. Le général Ion Antonescu devenait
au même moment le dirigeant de facto du pays, poussant le roi Carol II à
l’abdication et rappelant au trône le roi Michel. Tout au long de la guerre,
les relations entre le jeune souverain et le général seront glaciales et
empreintes de méfiance.






Dans l’interview que l’ancien souverain avait accordée à la
Radiodiffusion roumaine en 2008, interview conservée dans les archives du
Centre d’histoire orale de cette dernière, le roi Michel remémore les années de
son second règne : « Le général Antonescu m’avait toujours
considéré comme une sorte de fantoche, de symbole un peu vide, qui devait juste
signer les décrets qu’il rédigeait, qui gardait certes le titre de chef de
l’Armée, qu’il était sans doute utile de montrer à l’occasion des défilés
militaires, mais qu’il fallait garder dépouillé de tout pouvoir réel. Il
montrait du respect envers ma mère, la reine Hélène, qu’il avait rappelée de
son exile en septembre 1940 pour qu’elle soit auprès de moi, et pour
cela je lui ai toujours manifesté ma reconnaissance. Mais les choses se sont
progressivement gâtées entre nous deux. Il y a eu aussi cette scène, lorsque
j’avais adressé mon message de Noël 1943 à la Nation, dans lequel j’exprimais
mes réserves quant à la poursuite de la guerre. Ce message avait aussi agacé
les Allemands, mais sans plus. »






Les antimonarchistes ont pourtant tenu rigueur au roi Michel de ne pas
avoir accordé sa grâce au général Antonescu, devenu maréchal durant la guerre,
puis arrêté vers sa fin et condamné à la peine capitale, pour crimes de guerre.
En effet, le 23 août 1944, le roi Michel fit renverser et arrêter le maréchal
Antonescu, demandant l’armistice aux Alliés, avant de joindre la Roumanie au
camp allié. La Roumanie recouvrait de la sorte le nord de la Transylvanie, territoire
perdu à l’été 1940, à la suite du Diktat de Vienne.






Le roi Michel explique : « Beaucoup ont pensé que j’aurais
pu accorder la grâce au maréchal Antonescu. C’était ignorer la constitution et
le principe de la monarchie constitutionnelle alors en vigueur, qui faisait que
tout acte du roi devait avoir le contreseing du ministre. Or, il s’agissait
d’un ministre communiste, M. Pătrăşcanu, qui détenait le portefeuille de la
Justice. Et il refusait de signer. Mais les critiques font semblant d’ignorer
cette donne constitutionnelle. Par ailleurs, ni les Russes ni les
Anglo-Américains n’auraient jamais accepté qu’il soit gracié. »








Après la guerre, le parti communiste
accapara le pouvoir, avec le soutien manifeste de l’Armée rouge, d’occupation.
Le roi Michel fit de son mieux pour défendre bec et ongles les droits
démocratiques et constitutionnels des Roumains et freiner le
rouleau-compresseur soviétique. Mais face à l’absence de réaction des Grandes
Puissances occidentales, sa résistance ne pesait pas lourd. Le 30 décembre
1947, sous occupation soviétique, la démocratie roumaine se voyait contrainte
de déposer les armes. La monarchie, dernier symbole encore debout d’une
Roumanie indépendante, passait à son tour à la trappe. Le roi Michel signa,
sous la menace, l’acte d’abdication. Il quitta ensuite le trône et le pays,
pour commencer la longue traversée du désert de l’exile. Il avait 26 ans.








Tout au long des années de dictature communiste qui ont suivi son départ,
la voix et les messages du roi étaient écoutés religieusement sur les ondes
courtes des radios libres. Avec la chute du communisme, survenue fin 1989, le
souverain rentrait au pays, un retour non exempt de péripéties. Occasion pour
les générations nées après 1947 de découvrir un souverain dont le nom, devenu
tabou, avait été banni des livres d’histoire de l’époque communiste.




Dans son interview de 2008, le roi Michel s’adresse aux générations
futures : « Il faut que vous soyez généreux, il ne faut mépriser
personne, sous aucun prétexte. Il faut être bon, généreux, cela ne veut pas
dire se laisser rouler, car il faut savoir aussi résister et s’opposer à une
réalité faite d’injustices. J’assiste à des choses terribles, je vois des gens
qui se sentent ignorés et méprisés par les autorités. Des choses impensables
autrefois. Moi, j’avais appris à respecter tout un chacun, le plus humble qu’il
soit, peu importe. Il m’est difficile de demeurer insensible, de ne pas réagir
devant tant d’injustice, devant ce mépris dont on accable les pauvres gens, que
l’on traite comme s’ils étaient des détritus. Il se passe de nos jours des
choses inacceptables. »






Le 25 octobre, date du centenaire du roi
Michel I, la Roumanie célèbre également ses forces armées, car c’était le 25
octobre 1944 que le dernier pan du territoire national était libéré de
l’occupation allemande et hongroise. (Trad. Ionut Jugureanu)

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